En 1974, Jacques Brel quitte sa Belgique natale pour un tour du globe en voilier. Sur le papier une aventure unique. Mais le voyage est vite perturbé par une succession d'allers et retours vers l'Europe pour l'artiste, malade et en proie à de «profonds tourments».
Le chanteur Jacques Brel assis sur le quai du port de Marseille, le 1er décembre 1970
Jacques Brel à Cannes pour la présentation de son film "Far West", le 28 mai 1976
Des photos et objets en souvenir de Jacques Brel exposés dans le hangar où son bateau Askoy II est en restauration, le 3 avril 2018 à Zeebruges, en Belgique
Maddly Bamy (c), dernière compagne de Jacques Brel, arrive à Hiva Oa avec les cendres du chanteur, le 13 octobre 1978 aux Iles Marquises
Jacques Brel lors de son dernier concert à l'Olympia, le 7 octobre 1966 à Paris
La tombe de Jacques Brel en mai 2005 à Hiva OA, aux Iles Marquises
Brel en voilier sur l'océan, un voyage très tourmenté raconté par sa fille
Le chanteur Jacques Brel assis sur le quai du port de Marseille, le 1er décembre 1970
Jacques Brel à Cannes pour la présentation de son film "Far West", le 28 mai 1976
Des photos et objets en souvenir de Jacques Brel exposés dans le hangar où son bateau Askoy II est en restauration, le 3 avril 2018 à Zeebruges, en Belgique
Maddly Bamy (c), dernière compagne de Jacques Brel, arrive à Hiva Oa avec les cendres du chanteur, le 13 octobre 1978 aux Iles Marquises
Jacques Brel lors de son dernier concert à l'Olympia, le 7 octobre 1966 à Paris
La tombe de Jacques Brel en mai 2005 à Hiva OA, aux Iles Marquises
L'histoire est racontée dans un documentaire par sa fille France, qui était aux premières loges, dans le bateau avec lui pour la traversée de l'Atlantique.
Son film, «Chronique d'une vie», n'a pas vocation à être distribué dans les salles ou sur internet, mais pourra être visionné sur réservation à la Fondation Jacques Brel à Bruxelles, à partir de la semaine prochaine.
Pour France Brel, qui gère cette Fondation et ses «kilomètres d'archives», il s'agit d'inscrire «dans l'Histoire» un moment controversé et longtemps tu de la vie de son père. En faisant appel à ses souvenirs, ainsi qu'à de nombreuses lettres du chanteur et à quinze témoins (famille, amis, médecins, imprésario etc) ayant accepté pour elle d'abandonner leur «devoir de réserve».
«J'ai voulu présenter un homme avec toutes ses fragilités, ses faiblesses, dans une période profondément tourmentée», explique-t-elle lors d'une projection en petit comité.
Le long métrage (1h45) commence en mai 1973, avec l'échec critique de son film «Le Far West» au festival de Cannes. A l'époque, Brel ne chante plus en public depuis six ans --son dernier concert remonte à 1967--, et il est très peiné de ne pas mieux imposer sa patte dans le septième art.
En juillet 1974, dans le port belge d'Anvers, l'auteur de «Ne me quitte pas» lève l'ancre avec sa compagne Maddly Bamy, une actrice guadeloupéenne rencontrée trois ans plus tôt sur le tournage du film de Claude Lelouch «L'aventure c'est l'aventure».
Mais Brel a aussi promis le voyage à France (21 ans), la deuxième des trois filles qu'il a eues avec son épouse Thérèse Michielsen, alias «Miche».
Selon son récit, France découvre au dernier moment que la rivale de sa mère partagera aussi la cabine de l'Askoy, un voilier imposant de 19 mètres. Mme Bamy n'est pas citée sur ce point, elle n'intervient dans le film que via des images d'archives.
«Une fuite suicidaire»
Maddly Bamy ne sera là qu'un temps, espère France. Au départ il n'est pas exclu que Miche rejoigne l'équipée lors d'une escale, projet qui ne se concrétise jamais. «Je ne te vois pas traînant tes jupes sur l'Askoy», écrit Brel à son épouse.
En définitive Maddly «s'incruste» à bord, déplore-t-on côté famille.
Et le clash survient en janvier 1975, au bout d'une traversée d'océan riche en péripéties. En Martinique, Jacques Brel dit «adieu» à sa fille, avant de poursuivre avec Maddly Bamy jusqu'aux îles Marquises, en Polynésie, où il passe avec elle ses dernières années, loin de sa famille.
Quarante-six ans plus tard, sa fille ne le condamne pas, même si elle ne l'a revu qu'une fois avant sa mort, en 1978 à l'âge de 49 ans.
France Brel assure que la révélation à l'automne 1974 de son cancer du poumon a tout chamboulé chez lui. Sa maladie et sa difficulté à l'admettre sont un axe majeur du récit, émaillé d'anecdotes savoureuses.
En novembre 1974, Jacques Brel, qui veut se cacher des médias, se fait admettre sous un faux nom dans l'aile «maternité» d'un hôpital réputé de Bruxelles pour l'opération de son poumon malade.
Maddly et Miche (décédée en 2020, un des principaux témoins du film, ndlr) se relaient à son chevet.
A ce moment là, l'artiste en est déjà à son troisième retour vers l'Europe, alors que l'Askoy n'a pas dépassé l'archipel des Canaries.
En septembre, il est revenu à Paris pour enterrer en Bretagne son meilleur ami Georges Pasquier, dit «Jojo», puis est allé début novembre à Genève (Suisse) où a été posé le diagnostic du cancer.
A chaque fois il est reparti, mais «ce fut le contraire d'un voyage tranquille, une forme de fuite suicidaire», résume France.
Une projection par jour est prévue à la Fondation, sur rendez-vous à prendre par téléphone ou mail ( info@fondationbrel.be
).
AFP