Interview Zibbz: «nous démarquer n'est pas notre but à l'Eurovision»

par Marjorie kublun

28.4.2018

Bluewin a rencontré les Zibbz deux semaines avant le Concours Eurovision de la chanson.
Bluewin a rencontré les Zibbz deux semaines avant le Concours Eurovision de la chanson.
Image: mk

Ma dernière rencontre avec le duo Zibbz était il y a six ans devant leur dressing dans leur maison parentale pour une émission mode de la chaine Joiz. Depuis, il s'est passé beaucoup de choses dans la vie de Corinne "Co" et Stefan "Stee" Gfeller. Le 8 mai, le frère et la sœur vont représenter la Suisse au Concours Eurovision avec leur chanson "Stones". Une bonne raison pour les revoir et papoter concurrence et costumes de scène pour l'Eurovison et sur leur vie pas toujours facile entre deux mondes, Los Angeles et la Suisse. Nous nous retrouvons autour d'un thé froid au café Sphères à Zurich.

"Bluewin": Félicitations! Vous représentez la Suisse au Concours de l'Eurovision. Qu'est-ce que ça signifie pour vous?

Stee: c'est un honneur de représenter la Suisse à l'Eurovision et d'en faire partie. C'est une super expérience.

Co: surtout en tant que groupe de musique pas très connu.

Tu dis qu'on ne vous connaît pas trop en Suisse?

Co: la Suisse nous connaît quand-même mais pas aussi bien que Gölä ou DJ Bobo ou d'autres artistes qui ont déjà participé à l'Eurovision comme les Lovebugs. C'est fantastique que la Suisse nous soutienne.

Est-ce que pour vous c'est "participer à tout prix" ou "gagner à tout prix"?

Stee (rit): notre but est en tout cas d'atteindre la finale.

Co (approuve): nous avons déjà gagné par le fait que nous représentons la Suisse. La Suisse apprend à nous connaître tout comme un public international. Le concours de l'Eurovision a une grande communauté dont on peut beaucoup profiter.

Cela fait 10 ans que vous faites de la musique. Pourquoi ne pas avoir tenté plus tôt?

Co: le concours de l'Eurovision avait encore il y a quelques années un côté très glamour où le show comptait plus que la musique. Nous avons toujours pensé que ce n'était donc pas pour nous et que notre style et musique n'allaient pas avec l'Eurovision. On pensait qu'on n'aurait aucune chance. Mais les dernières années nous ont donné une autre impression: des prestations comme celle de Salvador Sobral, le gagnant 2017 ou celle de «Common Linnets», duo country hollandais qui s'est placé en deuxième position il y a quatre ans nous ont encouragés à participer. Avant, la devise était "plus la prestation est déjantée, mieux c'est". Ce qui compte désormais à nouveau, ce sont les bonnes chansons. C'est la raison pour laquelle nous avons à mes yeux plus de chance de réussir que les années précédentes.

Stee: heureusement, ces dernières années, de vrais musiciens étaient de la partie. Malheureusement beaucoup de choses sont artificielles : je n'aime pas trop les formations créées uniquement pour l'Eurovision.

Qu'espérez-vous de votre participation à l'Eurovision?

Co: notre but est d'agrandir notre communauté. C'est déjà le cas quel que soit le nombre de points que nous recevrons. Nous pouvons nous présenter face à un public international, ce qui est vraiment super pour nous.

"Stones", votre chanson de participation parle de mobbing, d'intimidation… Avez-vous fait de mauvaises expériences lors de votre adolescence ou en avez-vous été témoins?

Stee: dans une certaine mesure, nous avons été témoins de ce genre de moments d'harcèlement.

Co: lorsque tu écris une chanson, tu écris sur ce qui te tient à cœur et tu ne t'interroges pas trop. Etant la sœur ainée d'un frère et d'une sœur, je les ai toujours protégés à l'école où il y avait beaucoup de taquineries. Aujourd'hui le thème est surtout très présent en rapport avec les réseaux sociaux où on tombe sans arrêt sur de méchants commentaires, souvent pas réfléchis. Des mots que l'on écrit rapidement derrière un écran mais qui peuvent blesser une personne. Il y a sans arrêt des suicides à cause du "cybermobbing".

Comment réagissez-vous à de méchants commentaires? Répondez-vous ou les effacez-vous?

Stee: nous ne les effaçons pas, nous les ignorons en général. Nous essayons de ne pas être trop à l'écoute des potins. Il faut se construire une carapace, force que n'ont souvent pas encore les enfants et adolescents. Mais l'autocritique est souvent la pire des choses…

Que diriez-vous à quelqu'un d'autocritique?

Co: l'autocritique est quelque chose que je connais bien. Je suis ma plus grande critique et me rabaisse parfois moi-même. Dans ces moments-là, Stee m'aide en me confrontant à la photo ou vidéo en question et je dois regarder exactement. Souvent je m'aperçois qu'il a raison et que ce qui me dérange tant n'est pas si grave que ça en réalité. De l'extérieur les choses n'ont d'ailleurs probablement pas été perçues de la même façon.

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Comment vous préparez-vous à moins de deux semaines du show? Faites-vous du sport pour être en forme?

Co: nous partons au Portugal déjà fin avril. Je fais de l'exercice tous les jours. Stee jamais. Je répète la chanson tous les jours. Stee jamais. (rit)

Stee: mon job a été avant. J'ai produit la chanson.

En dehors de la musique, quels autres côtés appréciez-vous? Les voyages?

Co: nous rentrons juste de Tel Aviv, mais à côté du travail, nous n'avions pas le temps pour autre chose malheureusement. J'aurais tellement aimé y faire du shopping. Ce que j'aime beaucoup est la création de nos costumes de scène. Avec Erik Blum, créateur de chapeaux chez Onkai nous créons chapeaux, ceintures et les tenues.

Pouvez-vous nous en dire plus sur vos tenues?

Stee: il y aura un chapeau, c'est sûr.

Co: Et nos tenues ne seront pas colorées. Elles vont être plutôt sobres avec des accessoires comme un chapeau et une ceinture.

Ne veut-ont pas, lors d'un tel événement, plutôt se faire remarquer grâce à des tenue originales?

Co: se faire remarquer n'est pas notre but. Notre but c'est d'assurer sur scène. D'ailleurs il est très difficile de se faire remarquer pas sa tenue vu le nombre d'artistes qui se démarquent déjà de par leur personnalité ou apparence extravagante.

Stee: nous voulons être authentiques. Nous ne voulons pas nous présenter d'une manière différente juste parce qu'il s'agit de l'Eurovision. Ceux qui nous connaissent doivent nous voir et nous reconnaître.

Quels sont vos plus grands concurrents?

Stee: la concurrence est rude. Cette année, bizarrement, il y a beaucoup de duos. Mais ils sont tous différents. Nous sommes plutôt classés côté rock alors qu'en fait on est plutôt pop. On trouve plutôt des ballades chez les autres.

Co. Parmi les favoris, Netta Barzilai d'Israël. Elle a une super chanson tout en étant un peu déjantée dans un sens positif et se démarque. La France est également bien représentée avec le duo Madame Monsieur, un couple qui fait également de la musique depuis 10 ans.

Êtes-vous déjà tout excités?

Stee: nous avons récemment eu un meeting concernant nos activités au Portugal. Ce sera coup sur coup. À ce moment-là nous avons réalisé que ça devient sérieux! Normalement, la nervosité se manifeste seulement quand ça commence vraiment.

Co: je ne suis pas encore vraiment excitée pour le moment et j'accomplis les choses au jour le jour. Mais si je pense au moment de performer devant autant de personnes et qu'il ne faut pas se planter – là, la nervosité se manifeste.

Avez-vous un "rituel détente" juste avant de monter sur scène?

Co: bien respirer juste avant. Parfois je fais des exercices physiques calmes pour m'échauffer.

Stee: le calme est très important juste avant d'entrer en scène. Nous avons vraiment fait cette expérience: les fois où on a eu beaucoup de remue-ménage juste avant, le show n'a pas été top. Il faut vraiment se concentrer.

Est-il difficile de percer en tant qu'artiste suisse et de gagner de l'argent avec sa musique?

Stee: peu importe si tu es musicien, acteur ou autre artiste; il est toujours difficile de se construire sa marque dans le milieu créatif. Il n'y a pas de guide pour réussir. Par contre il est important de toujours se relever. Mais en tant qu'artiste suisses, tu as pas mal de possibilités en Suisse. Tu comprends cela lorsque tu vas à Los Angeles par exemple où nous sommes très souvent. Là-bas il y a tellement de groupes et tout le monde joue gratuitement. N'attend pas être payé pour un show. En Suisse, la plupart du temps les concerts sont payés. Il y a plus de possibilités ici.

Vous vivez en Suisse et à L.A. Comment peut-on s'imaginer votre mode de vie?

Co: nous alternons entre les deux pays où nous passons à chaque fois plusieurs mois. La vie de pendulaire n'est pas toujours chose facile. Tu n'as jamais de "chez-toi". À L.A. Stee et moi vivons dans une colocation de créatifs avec nos compagnons. Ce n'est évidemment pas optimal pour une vie de couple. Et en Suisse nous sommes chez nos parents à Gisikon (LU). Nous n'avons encore jamais touché de salaire suisse. Aucun mois. Il faut vraiment faire des compromis en tant qu'artiste. En revanche, nous avons du temps et beaucoup de liberté et pouvons vivre notre rêve de faire de la musique. Il faut savoir ce qui compte pour soi-même. Et c'est cette voie que nous avons choisie.

Co, tu t'es mariée récemment, toutes nos félicitations! Quelle place tient le planning familial dans ta vie?

Elle sort sont portable et fait défiler des photos à faire rêver.

Co: C'était à Tulum au Mexique. Yves et moi nous sommes mariés en petit comité. C'était magnifique. Fonder une famille compte parmi mes futurs projets mais d'abord je me concentre sur l'Eurovision.

Et comment imaginez-vous votre vie si vous voulez fonder une famille un jour?

Co: ce qui est fascinant dans la vie d'un artiste c'est le fait que tu ne saches jamais ce qui va se passer à l'avenir. Il y a un an, nous n'aurions jamais songé une minute participer à l'Eurovision. Avec les nouvelles opportunités qu'apporte la vie les changements viennent eux aussi. Yves est heureusement très ouvert face à des changements. Nous sommes à l'aise aux deux endroits. Nous ne vivrons sans doute jamais à un seul endroit.

Que faites-vous quand vous êtes en Suisse?

Co: la fondue est très importante lorsqu'on revient. Ce qui me manque souvent c'est le brunch du dimanche en famille. J'ai toujours hâte d'y être à mon retour.

Un conseil anti jet-lag?

Co: beaucoup boire!

Stee: le Kneipp!

Stee, tu fais des scéances Kneipp? Comment ça fonctionne?

Stee: il faut marcher pieds-nus dans de l'eau froide. J'ai essayé mais en fait je n'ai pas constaté de différence.(rit) Mais il paraît que ça aide! Non en fait, ce n'est pas mon conseil. Mon astuce est: "ne pas regarder sa montre!"

Avec quels artistes aimeriez-vous travailler?

Stee: Jack White!

Co: Jack White serait le rêve. Ou Pharrell Williams, même s'il a un autre style de musique.

Quels sont les avantages ou inconvénients lorsqu'on travaille avec son frère ou sa sœur?

Stee: l'avantage est qu'on se connaît très bien. l'inconvénient…

Co. …on se connaît très bien! (rires)

Stee: on sait exactement ce qui fait flipper l'autre donc on essaie d'éviter d'en arriver là. Nous sommes très complémentaires et compensons nos points faibles.

Merci et bonne chance!

Les Zibbz, Co et Stee Gfeller avec Marjorie Kublun, rédactrice Bluewin. les Zibbz partent au Portugal fin avril.
Les Zibbz, Co et Stee Gfeller avec Marjorie Kublun, rédactrice Bluewin. les Zibbz partent au Portugal fin avril.
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