Interview Hugo Clément: «Il ne faut surtout pas baisser les bras»

Caroline Libbrecht/AllTheContent

25.11.2019

Hugo Clément a fait ses armes aux côtés de Yann Barthès, dans «Quotidien» (TMC). Le trentenaire se retrouve aujourd’hui à la tête d’un ambitieux documentaire sur l’environnement, «Sur le front», diffusé en prime-time. Un pari audacieux pour France2.

Quels sont les sujets abordés dans ce premier volet de «Sur le front»?

On commence par aborder la question des océans. Au Mexique, on accompagne Sea Sheperd qui mène une vraie bataille navale contre les cartels de la drogue qui pêchent illégalement les poissons dans la mer de Cortès et les revendent sur le marché noir asiatique. Ensuite, on part en Méditerranée qui est la mer la plus polluée par le plastique. On va voir des spécialistes des tortues, ainsi que des baleines. On fait des prélèvements sur les baleines et on retrouve du plastique dans leur épiderme. Enfin, on part en Australie et on montre les conséquences des projets industriels sur l’écosystème. Les Australiens sont en train de construire une énorme mine de charbon qui aura un impact terrible sur le récif corallien. Une tonne de charbon sera extraite par seconde. On rencontre des scientifiques, des activistes, on s’est fait arrêter par la police. De cette arrestation, découle une enquête pour filmer le port où transitera le charbon. Les travaux ont commencé. C’est une tâche noire sur la carte postale australienne.

Comment ne pas basculer dans l’éco-anxiété ?

Grâce à des séquences positives. «Sur le front» montre aussi des modèles d’espoir. Ce qui nous intéresse, c’est le caractère urgent des situations, mais on ne veut pas être seulement dans le constat de la catastrophe imminente. On veut aussi montrer que des solutions existent, comme au Mexique par exemple, où des pêcheurs ont créé une réserve. Résultat, aujourd’hui, c’est devenu une des plus belles réserves marines du monde et la biomasse a augmenté de 400%.

«On rencontre des scientifiques, des activistes, on s’est fait arrêter par la police»

Quelle est votre inspiration pour cette grande enquête ?

L’idée, c’est de réaliser un documentaire de découverte, d’exploration, avec des images magnifiques, des paysages jamais vus et des animaux incroyables. Il y a une part d’aventure et d’émerveillement. Puis, il y a un aspect investigation dans la mesure où on révèle des scandales environnementaux et où on cherche des réponses. Et enfin, il y a un aspect action, car on met en valeur les hommes et les femmes qui se battent sur le terrain tous les jours pour défendre les écosystèmes. Le téléspectateur doit se dire que l’action est possible, que des gens le font et il faut les soutenir.

Comment le concept est-il né?

C’est un projet que j’avais en tête depuis un moment avec mon associé, le producteur. On en discutait depuis quelques années, et l’an passé, on est allés voir France Télévisions. Ils avaient justement envie d’une émission événementielle sur l’environnement, avec une nouvelle écriture. Donc ça a fonctionné! France Télévisions traitait déjà de l’environnement à travers des reportages diffusés dans «Envoyé Spécial» ou «Cash Investigation»… Mais «Sur le front», c’est un format inédit qui renforce le positionnement de la télévision publique sur la question centrale de l’environnement.

Ce type de journalisme - incarné, embarqué, engagé - vous correspond-t-il?

Oui, tout à fait! Le téléspectateur est pris par la main, je m’adresse à lui facilement à travers la caméra; c’est une expérience immersive. Un trait d’union entre ce qui se passe sur le terrain et ce que voient les téléspectateurs qui sont devant leur écran. Quatre numéros de deux heures chacun seront diffusés en prime-time, entre aujourd’hui et juin prochain, sur France2.

La nouveauté, c’est aussi la déclinaison de «Sur le front» sur internet…

Un format hebdomadaire intitulé aussi «Sur le front» sera diffusé aussi sur les réseaux sociaux. Cette offre numérique est réalisée spécialement pour internet. Il s’agira de reportages inédits sur les questions environnementales et climatiques, et non pas de reportages recyclés pour le net. Ces deux offres – télé et internet – se complètent. Pour moi, c’est important d’attirer un public jeune qui est très présent sur les réseaux sociaux, et un peu moins devant la télévision.

«Il y a de plus en plus de solutions proposées. Cela me booste beaucoup et cela me donne de l’espoir.»

Pourquoi avoir quitté la bande de Yann Barthès et l’émission «Quotidien» (TMC)?

J’ai quitté «Quotidien» pour faire quelque chose que je ne savais pas faire, de l’information numérique destinée aux plus jeunes. J’ai toujours travaillé sur des médias généralistes (France2, Canal+, TMC) et là je voulais parler aux gens de mon âge et faire des formats différents, notamment numériques. J’ai saisi la proposition de Kombini (média sur internet). Cette expérience numérique était géniale et j’ai beaucoup appris. Aujourd’hui, je réunis les deux: les reportages pour les médias sociaux et pour la télévision. Pouvoir le faire pour la télévision publique, c’est un rêve!

Quel est le public cible de «Sur le front»?

Quand on fait des documentaires diffusés en prime-time, il faut parler à tous: je me dis qu’il faut que ma petite sœur et ma grand-mère puissent le regarder ensemble en apprenant plein de choses. Il faut que cela puisse intéresser toutes les tranches d’âge et tous les milieux sociaux.

Parvenez-vous à rester optimiste quant au devenir de notre planète?

C’est justement pour cela que je fais «Sur le front» : ce qui donne envie d’y croire, ce sont tous ces gens qui se battent à travers le monde pour défendre l’environnement. C’est un mouvement qui grossit, il ne faut surtout pas baisser les bras. Au contraire, il faut donner un coup d’accélérateur. Il y a de plus en plus de solutions proposées. Cela me booste beaucoup et cela me donne de l’espoir.

En tant que futur papa, avez-vous des angoisses nouvelles?

Non, pas pour l’instant, en tous cas! (rires) J’ai envie de rester optimiste et de me dire que, collectivement, on va redresser la barre.

Sur les réseaux sociaux, vous n’hésitez pas à dévoiler des clichés personnels, notamment en compagnie de votre compagne, Alexandra Rosenfeld. Pourquoi choisir de partager ces moments de votre vie privée?

Je me comporte sur les réseaux sociaux comme n’importe quel jeune de 30 ans aujourd’hui. Je poste des photos de mon travail, de ma vie, de ce que je trouve joli. Quand on se cache, d’autres se chargent de dévoiler votre vie. Moi, je n’ai rien à cacher, je suis heureux dans ma vie, avec ma famille et mes amis. Et puis, je ne mets pas tout sur les réseaux sociaux, seulement quelques contenus choisis, c’est tout!

Vous avez écrit un livre «Comment j’ai arrêté de manger les animaux» (Ed. Seuil). Quel message voulez-vous délivrer?

Plus qu’un message, c’est une quête d’information. Sur ces questions animales (élevage, pêche, etc), il y a un fossé entre les informations disponibles et le niveau d’information des gens. Peu de gens savent ce que cela implique de manger de la viande, quelle vie ont les animaux, comment cela se passe dans les abattoirs. C’est normal que les gens sachent peu de choses, car il y a une volonté de dissimulation de la part de l’industrie agro-alimentaire. C’est la base de leur business. Mon livre est une enquête accessible à tous, avec plein de sources, des informations vérifiées.

Comment êtes-vous devenu vegan?

Il y a trois ans, j’ai cessé de manger de la viande et du poisson. Je me suis rendu compte qu’en consommer n’était absolument pas nécessaire, que cesser d’en manger n’était absolument pas frustrant. Aujourd’hui, je n’y pense plus, c’est facile! Je suis en cohérence avec mes idées. Je reçois beaucoup de messages de gens qui réfléchissent, après avoir lu mon livre. Heureusement, nous sommes dans une société où les gens se questionnent sur leur alimentation.

Retrouvez Hugo Clément:

sur France2: «Sur le front», mardi 26 novembre, à 21H05
En librairie: « Comment j’ai arrêté de manger les animaux » (Ed. Seuil)

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