Interview Joël Dicker: «Je l’ai remarqué avec Patrick Dempsey, lors du tournage»

De Laura Campisano/AllTheContent

25.6.2019

Joël Dicker
Joël Dicker
Valery Wallace

Auteur incontournable de ces dernières années, le Genevois Joël Dicker a démontré qu’il était un maître du suspens, arrivant à instaurer des rebondissements jusqu’aux dernières pages de ses romans, ce qui les rendent presque addictifs pour ses lecteurs. Toujours résident de sa ville natale, il revient avec beaucoup de simplicité sur son parcours littéraire.

Le succès international de «La vérité sur l’affaire Harry Québert» et vos nombreux voyages à travers le monde auraient pu vous amener à vous installer dans la ville de votre choix, et pourtant c’est à Genève, votre ville natale, que vous vivez. Pourquoi?

C’est vrai, j’aurais pu aller n’importe où. Mais je me sens bien à Genève, j’ai la chance de voyager, et de rentrer ensuite à la maison. Genève est une ville agréable, avec une qualité de vie que j’apprécie, je ne me pose même pas la question, c’est naturel.

Songez-vous un jour à écrire un thriller au bord du lac Léman, ou bien est-ce trop proche de vous pour le plonger dans la fiction?

C’est la grande difficulté justement. Mon plaisir est d’inventer des lieux, des villes qui n’existent pas. Les Etats-Unis, c’est idéal pour cela. Si j’écrivais sur Genève, ou la Suisse, j’aurais l’impression de déformer la réalité, il n’y aurait pas cette distanciation à laquelle je tiens.

Quand avez-vous senti la chance tourner, ce petit moment qui vous oblige à ne pas renoncer?

Je ne sais pas s’il y a eu un moment-clé. J’ai assez vite compris, après les premiers refus, qu’il fallait écrire par plaisir. A force qu’on me refuse des livres, j’écrivais, non plus pour être édité, ce n’était pas une finalité mais par pur plaisir. Chaque moment d’écriture est pour moi un moment de plaisir.

«Chaque moment d’écriture est pour moi un moment de plaisir.»

Dans vos trois derniers ouvrages, on sent la présence très forte de Southampton, c’est un endroit qui vous a marqué pour une raison particulière?

C’est un endroit que je connais bien, qui se prête bien à une atmosphère de roman. On est proche de New York, qui à portée de main avec sa vie tumultueuse, c’est à la fois très calme avec ce côté bouillonnant difficile à décrire si on n’y a pas vécu.

Vos romans sont si précis qu’on croirait voir un film en les lisant, leur adaptation apparaît presque naturelle. Dès lors, «La Disparition de Stéphanie Mailer» va-t-elle, également, être adaptée au petit (ou grand) écran?

Peut-être bien… mais vous savez un projet au cinéma, c’est très long, mais il vaut mieux un bon projet que pas de projet du tout. Pour «Harry Québert», j’ai reçu une centaine de propositions d’adaptation, et à la première contrainte, les gens sont beaucoup moins enthousiastes. Mais voir les personnages qu’on a créés s’incarner, c’est une aventure humaine très chouette, voir toutes les émotions jouées devant moi, c’est génial. Donc, oui ça me plairait que ce livre soit adapté également, il faut mûrir les projets.

Et vous, que lisez-vous, Joël Dicker?

Je lis un peu de tout, je ne me mets pas de barrières, j’ai une tendance à lire plutôt des fictions que des essais. Dernièrement, je me suis mis à lire Sherlock Holmes. C’est une lecture fascinante, on se prend vraiment au jeu. J’aime beaucoup les ambiances des vieux polars anglais, comme ceux d’Agatha Christie. Ce n’est pas tant le meurtrier, le sang, la violence, d’ailleurs je mets le moins possible de descriptions de ce genre dans mes livres. C’est vraiment l’ambiance qui est intéressante. Pour moi le plaisir de lire est de m’échapper de la réalité.

Y a-t-il une passion qui vous tient à coeur, en dehors de l’écriture?

Difficile de répondre, mais j’ai une grande passion pour la musique que j’aurais aimé pratiquer davantage, je vis dans la musique, elle m’accompagne tout le temps.

«Parler de ce que je prends au petit-déjeuner, je ne pense pas que ce soit très intéressant»

Vous avez réussi à préserver votre vie privée, on sait finalement très peu de choses sur vous. Est-ce simple d’éviter les paparazzis malgré le succès?

Je pense que c’est un état d’esprit. Je ne pense pas que ce soit très intéressant qu’on s’intéresse à moi, je préfère transmettre le virus de lire, encourager les gens à lire et les vertus de la lecture. J’ai la grande chance d’avoir du succès pour pouvoir parler de livres et de lecture, de ce que j’aime lire. Mais parler de ce que je prends au petit-déjeuner, je ne pense pas que ce soit très intéressant. Dès lors ça ne me demande pas d’effort considérable de ne pas en parler. C’est très différent du métier d’acteur, où on s’identifie à lui, on veut tout connaître de lui. Je l’ai remarqué avec Patrick Dempsey, durant le tournage d’«Harry Québert». Les gens l’appellent par son prénom, comme s’ils le connaissaient. Pour ma part dans 99% des cas, les gens m’appellent M.Dicker, ce n’est pas que je tienne à ce qu’on m’appelle Monsieur, c’est juste que les gens ont aimé mes livres, et qu’ils ne s’identifient pas à moi, en tant qu’écrivain.

Auriez-vous un conseil à donner, à de jeunes auteurs qui rêvent d’une carrière comme la vôtre, en Suisse romande et ailleurs?

Ce serait prétentieux de me positionner comme pouvant donner des conseils, le succès vient beaucoup de la rencontre avec mon éditeur. Je pense que, pour quiconque écrit, le plus important c’est d’aimer le faire et d’avoir du plaisir à le faire. Le plaisir qu’il nous apporte à nous, c’est génial. Quand le livre est lu par quelqu’un d’autre que nous, il est terminé. Le livre est un rapport à soi-même, dans chaque livre que vous aimez, il appelle quelque chose en vous. C’est important pour n’importe quel écrivain. Je pense que tout le monde aime lire mais ne le sait pas encore, c’est une émotion très forte. On plonge en soi, sans interaction avec le téléphone, ou l’extérieur, comme le cinéma par exemple. Je pense vraiment que lire est un exercice particulier, c’est un vrai travail pour le cerveau, et c’est précieux.

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