Sigourney Weaver, Javier Bardem et... Hillary Clinton: la Berlinale, premier grand festival de cinéma de l'année en Europe, déroule son tapis rouge à partir de jeudi. Une nouvelle direction et aux manettes de cette 70e édition aux accents politiques.
La célèbre actrice d'«Alien» doit ouvrir les festivités jeudi soir aux côtés de Margaret Qualley. Elles viendront présenter «My Salinger year» du Canadien Philippe Falardeau (hors compétition), sur les ambitions littéraires d'une jeune femme travaillant chez un célèbre agent.
Durant les onze jours du festival, quelque 340 films venus du monde entier seront projetés. Dix-huit d'entre eux sont en lice pour l'Ours d'or, qui sera remis le 29 février par un jury présidé par l'acteur britannique Jeremy Irons.
Un film suisse et deux coproductions figurent dans la compétition officielle: «Schwesterlein» («Petite soeur») de Stéphanie Chuat et Véronique Reymond. «Le sel des larmes» de Philippe Garrel (France/Suisse) et «Favolacce» («Bad Tales») de Fabio et Damiano D'Innocenzo (Italie/Suisse).
Le Britannique a affiché son soutien aux mouvements pour «protéger les femmes contre toute forme de harcèlement», au droit à l'avortement et au mariage gay. Il tentait ainsi de déminer une polémique naissante, suite à la réapparition dans la presse allemande d'une ancienne interview où il tenait des propos jugés sexistes.
«J'espère que certains des films que nous allons voir parleront de ces questions... et voir des films qui nous incitent à questionner nos attitudes, nos préjugés», a-t-il déclaré lors de la conférence de presse du jury. Celui-ci compte notamment dans ses rangs Bérénice Bejo («The Artist») et Luca Marinelli («Martin Eden») ainsi que des réalisateurs Kenneth Lonergan («Manchester by the sea») et Kleber Mendonça Filho («Bacurau»).
Passé nazi
En plus d'être un anniversaire, cette 70e édition ouvre un nouveau chapitre pour la Berlinale: après avoir officié pendant 18 ans, l'Allemand Dieter Kosslick a cédé sa place à un duo plus jeune, composé de l'Italien Carlo Chatrian, ancien directeur du festival de Locarno, et de la Néerlandaise Mariette Rissenbeek.
Le début de polémique autour de Jeremy Irons n'est pas le seul chantier que le duo a dû déminer en amont: des révélations récentes sur le passé nazi d'un ancien directeur de la Berlinale les a contraints à renommer le Prix Alfred-Bauer et à le remplacer par un Ours d'argent.
Le festival a d'ailleurs confié une enquête à ce sujet à l'Institut d'histoire contemporaine de Munich.
Objectif de cette nouvelle édition: «faire de la place à la diversité». Il propose de nombreux films réalisés par des femmes, des oeuvres du monde entier, avec un gros contingent venant du Brésil, des sujets politiques et une nouvelle section baptisée «encounters», proposant souvent des films de niche entre documentaire et fiction.
Après les Bafta britanniques et les Oscars, le débat sur le manque de femmes et d'artistes noirs dans le cinéma bat son plein. La Berlinale va proposer six films dirigés ou codirigés par des réalisatrices cette année. Soit, un peu moins que l'an dernier.
Grand écart
Mêlant auteurs connus des cinéphiles (Philippe Garrel, Tsai Ming-liang et Kelly Reichardt) et découvertes, la sélection 2020, ouverte au public comme aux journalistes, n'hésite pas à faire le grand écart. Elle présente par exemple «There is no evil» de l'Iranien Mohammad Rasoulof, interdit de sortie de territoire, et la dernière comédie du duo français Kerven-Delépine qui s'attaque aux géants du web et à nos habitudes numériques.
Hors compétition, les spectateurs pourront également découvrir le nouveau film de l'écurie Pixar («En avant»), le «Pinocchio» de Matteo Garrone, déjà sorti en Italie et plusieurs séries dont «The Eddy», bientôt sur Netflix, de Damien Chazelle, le réalisateur de «La La Land».
Ours d'honneur pour Helen Mirren
La liste d'invités est fournie: la présence de Javier Bardem, Elle Fanning et Salma Hayek, à l'affiche de «The Roads not taken» (en compétition), devrait ravir les photographes. Tout comme celle de Johnny Depp qui incarne à l'écran le photographe W. Eugene Smith dans «Minamata» (hors compétition). Helen Mirren recevra quant à elle un Ours d'honneur pour l'ensemble de sa carrière.
Malgré une dimension glamour, le festival n'en sera pas moins politique avec une programmation à l'avenant. Hillary Clinton est attendue pour la projection du documentaire qui lui est consacré. Le réalisateur ukrainien Oleg Sentsov, emprisonné cinq ans, doit présenter son deuxième film «Numbers», inspiré de son incarcération.
L'an dernier, le jury présidé par Juliette Binoche avait sacré «Synonymes» de Navad Lapid, film critique sur l'identité israélienne.
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