CriseAussi touchés par la crise, les food trucks ne roulent pas sur l'or
sj, ats
7.2.2021 - 10:00
Contrairement à une idée reçue, les food trucks ne tirent pas leur épingle du jeu dans la crise liée au coronavirus, en profitant par exemple de la fermeture des restaurants. S'ils ne souffrent pas autant que les cafetiers-restaurateurs, ils subissent néanmoins la baisse de fréquentation dans les rues dues au télétravail, l'absence de festivals et de fêtes privées.
Un tour d'horizon effectué par Keystone-ATS dans le canton de Vaud montre que la baisse du chiffre d'affaires peut aller jusqu'à moins 50-60% en 2020 par rapport à 2019. Fermeture imposée des marchés, annulation des festivals et des manifestations publiques, absence de fêtes privées et diminution du monde dans les rues en raison du télétravail: les camions-restaurants sont tout sauf les gagnants de la pandémie.
«C'est dur. J'ai bien de la peine. Au niveau financier, ça se dégrade. L'année dernière j'ai passé trois mois sans pouvoir travailler en raison de la fermeture des places de marchés et je n'ai fait qu'une seule fête privée, alors que celles-ci représentent normalement 30 à 40% de mon chiffre d'affaires», témoigne Nicole Favre du food truck «Chez Nini» (cuisine du terroir), présent à Cheseaux et Lausanne depuis quatre ans.
Ne pas trop s'endetter
Son chiffre d'affaires total a baissé de 53% en 2020 par rapport à 2019 et sur le seul mois de janvier 2021, elle est déjà à moins 55%. «J'ai dû emprunter 8000 francs dans le cadre des mesures d'aide, remboursables sur cinq ans. Mon but est de ne pas m'endetter plus», dit-elle. «Heureusement que pour le moment les marchés ne ferment pas à nouveau. Mais c'est sûr que le télétravail fait des dégâts. Il y a moins de gens dans les rues», ajoute-t-elle.
Dans l'ensemble, Mme Favre pense toutefois s'en sortir mieux que les restaurants, car elle a moins de charge fixe et de fonctionnement et aucun employé. «Je travaille un peu mieux lorsque les restaurants ferment, grâce aux repas de midi et les gens qui continuent de travailler au bureau», explique-t-elle.
Les oubliés de la crise
Même s'il n'a jamais totalement arrêté son activité durant le Covid, Brice Tahmazian, gérant de «Folies Burgers», reconnaît que 2020 a été «une année très fragile». Il estime avoir perdu environ 30% de son chiffre d'affaires annuel uniquement en raison de l'annulation des festivals et entre 40 et 45% au total du fait du télétravail. «C'est très chaud. Je ne connais pas beaucoup de salariés qui accepteraient de travailler ainsi», confie-t-il.
Egalement président de l'Association des food trucks de Lausanne, M. Tahmazian pense lui aussi que «globalement notre situation est plus facile que celle des cafetiers et restaurateurs. Ce n'est pas autant la catastrophe». Il observe toutefois que la restauration mobile est «un peu l'oubliée de la crise». Beaucoup sont des indépendants et certains ont subi une baisse massive de leurs résultats, selon lui.
Pour lui, les food trucks ne tirent donc absolument pas leur épingle du jeu. «Il n'y a pas de concurrence directe entre restaurants et camions-restaurants. Ils sont plutôt complémentaires. Nos vrais concurrents sont les boulangeries, les épiceries et surtout les supermarchés», explique-t-il.
L'importance de l'emplacement
Une nuance vient se glisser dans les témoignages recueillis: les food trucks qui bénéficient d'un emplacement à l'année sur une place publique sont bien moins affectés que ceux qui sillonnent dans les festivals. Et parmi eux, une minorité affirme même que les affaires ne vont pas si mal.
La question de l'emplacement reste clairement déterminante. Certains lieux marchent mieux que d'autres comme un campus universitaire, une zone industrielle ou commerciale, avec des gens qui étudient ou travaillent encore sur place. Une place fixe permet par exemple de fidéliser une clientèle, même en cette période, soulignent certains propriétaires de food trucks.
Malgré tout, plusieurs responsables de camions-restaurants ont déjà décidé de mettre la clé sous la porte, surtout parmi ceux qui courent les festivals, selon M. Thamazian. ll s'attend même à ce que beaucoup d'autres arrêtent leur activité, notamment ceux qui n'ont pas encore obtenu leur licence.
Depuis le 1er janvier 2018, l'exploitation d'un food truck est soumise à l'obtention préalable d'une autorisation de la Police cantonale du commerce, sous la forme d'une licence. Pour l'obtenir, il faut suivre un cours de douze jours dispensé par GastroVaud. A ce jour, 181 licenciés sont actifs dans le canton.