Bas-Rhin Bas-Rhin: 150 emplois supprimés dans les bus électriques

ATS

1.10.2021 - 12:09

Alstom a créé puis supprimé Aptis, sa filiale dédiée à la fabrication de bus électriques, un véhicule prometteur mais qui a eu toutes les peines du monde à démontrer sa fiabilité (archives)
Alstom a créé puis supprimé Aptis, sa filiale dédiée à la fabrication de bus électriques, un véhicule prometteur mais qui a eu toutes les peines du monde à démontrer sa fiabilité (archives)
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En trois ans, Alstom a créé puis supprimé Aptis, sa filiale dédiée à la fabrication de bus électriques, un véhicule prometteur mais qui a eu toutes les peines du monde à démontrer sa fiabilité. La fin du projet engendre la suppression de 150 emplois sur le site de Hangenbieten (Bas-Rhin).

Keystone-SDA

Le projet semblait pourtant idéalement engagé: en 2017, NTL, entreprise détenue par Alstom et la Banque Publique d'Investissement, reçoit le prix de l'innovation pour son prototype de bus électrique.

Il détonne. Inspiré du tramway et alimenté par batterie, ses roues directrices à chaque extrémité lui permettent de se déplacer en crabe et son plancher bas facilite l'accès des poussettes et fauteuils roulants.

Fort de ce succès et des retours d'expérimentations dans plusieurs villes en France et à l'étranger, Alstom passe la vitesse supérieure et rachète en 2018 l'ensemble de l'activité bus électriques de NTL pour créer Aptis, filiale à 100% d'Alstom Transport. Le groupe français est alors l'un des premiers grands acteurs du secteur à se lancer sur le marché des bus électriques. Et compte bien conserver son avance sur ses concurrents.

Douze bus pour Strasbourg

Rapidement les premières commandes arrivent, 12 bus pour Strasbourg, 7 pour Grenoble, 4 pour La Rochelle, 12 pour Toulon et 50 pour la RATP. Dans ces villes, les élus veulent réceptionner les bus avant les élections municipales de 2020, pour démontrer leur engagement écologique. Les délais sont courts mais Alstom se montre confiant.

A Hangenbieten (Bas-Rhin), sur le site de conception où travaillent environ 150 personnes, le changement d'entité entre NTL et Alstom-Aptis ne passe pas inaperçu. «On a été nombreux à déchanter», se remémore Florian Bouché, secrétaire du CSE. «Beaucoup de directeurs du groupe sont arrivés, on est tombé dans un fonctionnement Alstom, avec beaucoup de process, de validations... Une inertie s'est installée, alors qu'on avait besoin de réactivité».

Au-delà des méthodes, Alstom procède à de nombreuses modifications sur le véhicule, au moment de passer du prototype à la fabrication en série.

Après avoir largement remanié son prototype, Alstom se lance dans la fabrication pour honorer ses premières commandes. Mais il ne dispose pas des capacités de produire en série et entame en parallèle la création d'une chaîne capable de produire plus de 150 véhicules par an. Mais la chaîne de montage ne sera opérationnelle que début 2021.

«On s'est retrouvé avec une ligne de production pour faire des bus en série, mais avec les problèmes des premiers bus livrés, on n'avait plus aucune commande nouvelle, plus aucun client», indique l'ingénieur de conception.

Car pour tenir les délais, Alstom a raccourci la période de tests de plusieurs mois, au détriment de la fiabilité. Strasbourg a reçu ses premiers bus, assemblés comme les prototypes, courant 2019. «On a peut-être accepté de livrer des bus à Strasbourg qui n'étaient pas totalement validés, parce que c'était les premiers qu'on faisait», admet le directeur, Didier Pfleger.

La CTS (compagnie strasbourgeoise de transports) met finalement un terme à l'exploitation des bus Aptis et réclame un remboursement. De longues discussions s'engagent.

«Dans un premier temps, Alstom était dans le déni», déplore un élu. «Au début on ne savait pas qui était en tort, mais comme ça s'est reproduit plusieurs fois, et dans d'autres villes, Alstom a bien été obligé de reconnaître qu'il y avait un souci.»

Face aux difficultés, et en l'absence de perspectives de rentabilité, le groupe tire un trait sur le projet, et les 150 emplois qui vont avec. Au final, l'entreprise a vendu ses bus à un prix unitaire proche de 700'000 euros, pour un coût réel d'environ 1,3 million d'euros. Ses comptes font apparaître une perte de 17 millions d'euros en 2019, puis 10 millions en 2020.

Salariés inquiets

La ligne de production, quasi neuve, ne sera donc pas utilisée pour produire une deuxième génération de véhicules, qui aurait intégré les améliorations apportées depuis les premières ventes, et permis d'amortir les coûts fixes.

Seuls quelques bus, pour la RATP, doivent encore être assemblés. Malgré l'accord entre les syndicats et la direction sur les mesures d'accompagnement du plan social, les salariés se demandent de quoi l'avenir sera fait.