L'Allemagne a abaissé mercredi un peu plus ses prévisions de croissance pour 2019, un «signal d'alarme» pour le gouvernement d'Angela Merkel, pressé par ses partenaires d'arrêter de se reposer sur les acquis de sa décennie dorée.
Berlin table désormais sur une hausse du produit intérieur brut (PIB) de 0,5% cette année, de moitié inférieure au 1,0% encore attendu pour 2019 en janvier.
Néanmoins, l'économie allemande devrait augmenter de 1,5% en 2020 et la phase de ralentissement «sera de nouveau surmontée», tempère le ministre de l'Economie, Peter Altmaier.
Comme ses voisins, l'Allemagne dit pâtir du «ralentissement mondial dû aux conflits commerciaux et à l'impact négatif du processus du Brexit».
A domicile, malgré une solide demande intérieure qui porte la croissance, Berlin dit avoir «raté une rampe de lancement» en 2019 : entre autres, la sécheresse de 2018 a affecté le secteur stratégique de la chimie, quand l'entrée en vigueur de nouvelles normes européennes antipollution a désorganisé celui de l'automobile.
Sous-investissement chronique
Mais, en toile de fond, l'Allemagne est rattrapée par ses vieux démons: sa main d'oeuvre vieillissante et son sous-investissement chronique dans les infrastructures ou l'innovation, qui creuse son retard technologique et menace durablement son attractivité.
La première économie européenne a peut-être échappé de justesse à la récession technique, mais sa décennie dorée post-crise de 2008 est terminée: la hausse du PIB allemand est passée de 2,2% en 2017 à 1,4% en 2018.
«La phase de faiblesse que traverse actuellement l'économie allemande doit servir de signal d'alarme», a reconnu le ministre de l'Economie.
Un sursaut est d'ailleurs réclamé de plus en plus ouvertement par le Fonds monétaire international (FMI) qui, comme les partenaires européens, redoute que l'accès de faiblesse allemand ne contamine durablement le reste de la zone euro.
Le FMI presse donc l'Allemagne de lancer un plan de relance et d'investissements, ce dont Berlin a les moyens compte tenu de son confortable excédent budgétaire.
Duel de ministres
Mais, sur ce sujet, deux ministres et deux approches s'opposent de plus en plus ouvertement.
Aux finances, le social-démocrate Olaf Scholz refuse de céder aux pressions et met en avant des investissements déjà en nette hausse, dans les infrastructures, l'énergie ou l'innovation.
«Nous ne sommes pas en récession, notre croissance ralentit», a-t-il martelé la semaine dernière lors d'une réunion des pays du G20 à Washington, assurant que l'Allemagne «avait déjà fait ce qu'on lui a demandé de faire».
A l'inverse, le ministre conservateur de l'Economie reconnaît lui depuis janvier que le coup de froid actuel nécessitera des mesures plus ambitieuses et des incitations pour les entreprises.
Dans une critique voilée inhabituelle lors de telles annonces macroéconomiques, Peter Altmaier, un proche de la chancelière mais très critiqué au sein du gouvernement, a appelé les «autres ministères à participer de manière significative» à un effort de relance.
Sur ses tablettes, une réforme qu'il tente d'imposer en vain depuis des mois, un «crédit impôt recherche» pour les entreprises, destiné à la fois à soutenir l'innovation et à répondre à la concurrence fiscale étrangère.
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