Le message lancé lundi à l'ouverture d'une réunion mondiale sur la biodiversité est clair: la destruction de la nature menace l'Homme «au moins autant» que le changement climatique. Elle mérite donc autant d'attention pour éviter des impacts dévastateurs.
Scientifiques et diplomates de plus de 130 pays sont réunis jusqu'à samedi pour adopter la première évaluation mondiale des écosystèmes depuis près de 15 ans, un sombre inventaire d'une nature pourtant vitale pour l'humanité.
«Les preuves sont incontestables: notre destruction de la biodiversité et des services écosystémiques a atteint des niveaux qui menacent notre bien-être au moins autant que les changements climatiques induits par l'Homme», a déclaré Robert Watson, président de Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES).
Le groupe d'experts a travaillé pendant trois ans sur un rapport de 1800 pages. Ce document devrait devenir la référence scientifique en matière de biodiversité comme le sont ceux du Giec pour le climat.
Vivre «en harmonie avec la nature»
Si le mot «biodiversité» semble parfois bien abstrait, il concerne toutes les espèces animales ou végétales vivant sur la planète, y compris l'espèce qui se met elle-même en danger en détruisant la nature: l'Homme. Et l'Homme ne peut vivre sans cette nature qui lui rend des services inestimables, des insectes pollinisateurs aux forêts et océans absorbant le CO2, en passant par les médicaments ou l'eau potable.
Beaucoup espèrent que cette évaluation sera le prélude à l'adoption d'objectifs ambitieux lors de la réunion en 2020 en Chine des Etats membres de la Convention de l'ONU sur la diversité biologique (COP15).
Quasiment aucun des 20 objectifs précédemment définis pour 2020, qui visent une vie «en harmonie avec la nature» d'ici 2050, ne seront atteints, selon le projet de synthèse du rapport obtenu par l'AFP. Ce projet sera discuté, amendé et adopté ligne par ligne par les délégués avant sa publication le 6 mai.
Accélération du taux d'extinction
«Le patrimoine environnemental mondial (...) est en train d'être altéré à un niveau sans précédent», met en garde ce texte. Un quart des 100'000 espèces évaluées -portion minime des 8 millions estimées sur Terre- sont déjà menacées d'extinction, sous pression de l'agriculture, de la pêche, de la chasse, ou encore du changement climatique.
Mais «une accélération rapide imminente du taux d'extinction des espèces» se profile, selon le projet de rapport: entre 500'000 et un million devraient être menacées, dont «beaucoup dans les prochaines décennies».
Le texte fait clairement le lien entre les deux menaces majeures que sont le réchauffement et les atteintes à la nature. Il identifie certaines causes similaires, en particulier les pratiques agricoles et la déforestation, responsables d'environ un quart des émissions de CO2 mais aussi de graves dommages directs aux écosystèmes.
Le tout sur une planète de plus en plus peuplée dont les habitants consomment de plus en plus. «Il ne faut pas seulement modifier la production agricole, il faut aussi modifier notre consommation. Par exemple, un régime alimentaire bien équilibré est bon pour notre santé et aussi bon pour la planète», a expliqué Paul Leadley, un des auteurs du rapport.
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