Un hiver difficile Le pétrole repart à la hausse et le gaz s'envole

vj

23.8.2022 - 09:12

Les prix des hydrocarbures continuaient d'augmenter mardi, ceux du pétrole repartant à la hausse alors que le gaz naturel poursuivait son envolée. Ce dernier demeure propulsé par les incertitudes portant sur les livraisons de gaz russe en Europe via le gazoduc Nord Stream 1, ravivant les craintes que la crise énergétique ne provoque une récession sur le Vieux-Continent.

Les prix des hydrocarbures continuaient d'augmenter mardi, ceux du pétrole repartant à la hausse alors que le gaz naturel poursuivait son envolée. (archives)
Les prix des hydrocarbures continuaient d'augmenter mardi, ceux du pétrole repartant à la hausse alors que le gaz naturel poursuivait son envolée. (archives)
KEYSTONE/EPA/TOMS KALNINS

Keystone-SDA, vj

Peu avant 08h00, le contrat à terme du TTF néerlandais, référence du marché européen du gaz naturel, bondissait de 13,17% à 276,75 euros le mégawattheure (MWh), après avoir touché la veille les 295 euros, un niveau inédit depuis les séances très volatiles des premières semaines de l'invasion russe de l'Ukraine mi-mars.

Le géant gazier russe Gazprom a annoncé vendredi que ses livraisons de gaz à l'Europe par le gazoduc Nord Stream 1 seraient interrompues pendant trois jours, du 31 août au 2 septembre, pour des raisons de «maintenance». Une «tentative évidente d'exploiter la dépendance de l'Europe au gaz russe», selon Ludwig Möhring, directeur de l'Association des producteurs allemands de pétrole, gaz et de la géothermie (BVEG).

Si «en soi, une brève fermeture du gazoduc ne ferait pas une grande différence», Ludwig Möhring explique que cette nouvelle met en lumière deux risques: que la Russie «prétende à tort qu'elle ne peut pas rouvrir le gazoduc», en prétextant un nouveau problème technique, ou qu'elle ferme ses autres gazoducs approvisionnant l'Europe. La dernière fois que le gazoduc a été fermé pour maintenance, les Russes ont rétabli le flux de gaz, mais dans une bien moindre mesure, rappelle pour sa part Ipek Ozkardeskaya, analyste de Swissquote.

Un hiver difficile se profile

En l'espace d'une semaine, les prix du gaz ont décollé de 25,7%, les hausses mensuelles et annuelles s'établissant désormais à plus de 56% et 563%, respectivement.

Bjarne Schieldrop, de la banque suédoise Seb, prédit à l'AFP une situation énergétique «extrêmement difficile» en Europe cet hiver, arguant que la Russie pourrait jouer «le tout pour le tout» en faisant encore baisser les exportations de gaz naturel, en particulier à «chaque fois que les prévisions météorologiques seront vraiment froides». Dans ce contexte, l'analyste d'Oanda Edward Moya ne se montre guère hésitant, «la récession en Europe est une certitude».

Aux Etats-Unis aussi, le gaz naturel flambe et son prix montait encore mardi à 9,915 dollars par million de British thermal unit (BTU), unité de mesure anglo-saxonne. Lundi, il s'était hissé à 9,982 dollars/BTU, une première depuis 14 ans.

Mais ce mouvement est surtout lié à la vague de chaleur qu'ont connu plusieurs régions américaines durant l'été, observe Andy Lipow, de Lipow Oil Associates. Elle a augmenté les besoins en énergie, notamment pour l'air conditionné, tandis que le faible niveau de l'eau dans plusieurs installations hydroélectriques dans l'Ouest limitait la production d'électricité renouvelable.

Pétrole bon marché

En comparaison des prix extrêmes du gaz naturel et de l'électricité en Europe, le brut semble désormais «exceptionnellement bon marché», relève M. Schieldrop, ce qui ne va pas non plus sans peser sur les cours de l'or noir. Après avoir plongé en début de journée lundi, les cours se sont néanmoins redressés, tant le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en octobre que celui de WTI américain repartant à la hausse mardi, à la faveur de déclarations, à l'agence Bloomberg, du ministre saoudien de l'Energie Abdulaziz ben Salmane.

Le responsable a estimé que la volatilité actuelle du marché du pétrole et la baisse des cours, qui intègrent de façon prématurée, selon lui, un ralentissement économique marqué, pourraient justifier une baisse de production de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep+). Mardi, les 159 litres de Brent de la mer du Nord se négociaient ainsi à 97,01 dollars, en hausse de 0,58%. Leur équivalent américain de West Texas Intermediate (WTI), progressaient eux de 0,74% à 91,02 dollars.

Pour Andy Lipow, une baisse de production de l'Opep ne suffirait pas à redresser nettement les prix de l'or noir, car «l'Europe est sur la voie de la récession et l'impact économique va se ressentir à travers le monde» et peser sur la demande, et donc sur les cours.