Paiement différé Les consommateurs sont vulnérables face à cette nouvelle mode 

ol

8.10.2021 - 10:35

Le marché suisse du paiement en différé ("Buy now, pay later», BNPL) est en plein essor. Apprécié des consommateurs souhaitant essayer les articles commandés avant de les payer et ceux préférant régler leurs factures en plusieurs fois, cette méthode n'est néanmoins pas sans risque, de l'avis des associations de protection des consommateurs.

Keystone-SDA, ol

«Le public cible de ces facilités de paiement sont précisément les personnes à bas revenus ou qui ont déjà des dettes et ne peuvent se permettre une grosse dépense en une fois. (image d'illustration)
«Le public cible de ces facilités de paiement sont précisément les personnes à bas revenus ou qui ont déjà des dettes et ne peuvent se permettre une grosse dépense en une fois. (image d'illustration)
KEYSTONE

Une solution qui profite à tous, c'est comme cela que se présentent les spécialistes du BNPL en Suisse: le commerçant accroît la conversion de ses clients et profite de montants d'achats supérieurs – selon les spécialistes, proposer le BNPL permet d'augmenter en moyenne de 20% la valeur du panier d'achats – tandis que le client a le temps d'essayer avant de payer et peut échelonner son paiement.

Avec le développement des applications mobiles de BNPL, le marché tend désormais à inclure des achats de plus petits montants et s'éloigne ainsi du paiement par facture traditionnel. Les risques ne sont pas pour autant moins élevés. «Plus les possibilités de contracter des crédits ou d'utiliser de facilités de paiement sont grandes, plus le risque de surendettement est grand», souligne Fanny Froidevaux, juriste chez Caritas.

«Le public cible de ces facilités de paiement sont précisément les personnes à bas revenus ou qui ont déjà des dettes et ne peuvent se permettre une grosse dépense en une fois. De plus, le risque d'endettement est fort, car quand bien même les montants des achats ne sont pas ou peu élevés, les frais qui vont venir s'ajouter à cette dette initiale sont parfois conséquents, peuvent rapidement augmenter et seront réclamés au débiteur» avertit-elle.

Pour Mme Froidevaux, des changements législatifs, «notamment une extension du champ d'application de la loi sur les crédits à la consommation» (LCC), pourraient constituer une solution. La LCC ne s'applique en effet que pour des crédits de plus de 500 francs.

Pénalités de retard

Si les prestataires de BNPL réalisent le gros de leurs recettes grâce aux commissions sur les achats versés par les commerçants, ils sont parfois épinglés sur leurs pratiques concernant les pénalités de retard imposées au consommateur lorsque celui-ci ne règle pas la facture à temps.

«Nous ne gagnons jamais d'argent sur les pénalités de retard, que nous ne facturons que pour couvrir nos coûts administratifs si le client est en retard de plus de 60 jours», assure Matteo Bozzo, co-fondateur d'Heidi Pay.

«En comparaison internationale, les lois suisses offrent une solide protection au consommateur. Des contrôles stricts sont effectués», renchérit Jean-Christophe Calmes, fondateur de la société Swissbilling. De plus, la sévérité du système de recouvrement suisse décourage les mauvais payeurs: «la Suisse a la mémoire longue quand il s'agit de dettes».

Mme Froidevaux estime toutefois que la Suisse peut mieux faire: «la protection du consommateur passe également par la prévention ou pourrait aussi passer par l'interdiction ou un cadrage plus strict de la publicité», conclut-elle.