Santé Public Eye dénonce le prix des médicaments

ATS

31.1.2019 - 16:24

«Les prix exorbitants des médicaments entravent toujours plus l’accès aux traitements vitaux et conduisent à l’explosion des coûts de la santé en Suisse», dénonce Public Eye (photo symbolique).
«Les prix exorbitants des médicaments entravent toujours plus l’accès aux traitements vitaux et conduisent à l’explosion des coûts de la santé en Suisse», dénonce Public Eye (photo symbolique).
Source: KEYSTONE/GAETAN BALLY

Dans une lettre ouverte adressée à Alain Berset, Public Eye demande au ministre de la Santé d'agir pour faire baisser le prix des médicaments via l'instrument de la licence obligatoire, qui permet la commercialisation de génériques. L'ONG lui a prémâché le travail.

«Les prix exorbitants des médicaments entravent toujours plus l'accès aux traitements vitaux et conduisent à l’explosion des coûts de la santé en Suisse», dénonce Public Eye dans un communiqué diffusé jeudi. Mais pour l'association, il existe un remède efficace: la licence obligatoire.

«Comme le montrent plusieurs exemples à l’étranger, la licence obligatoire permet de lutter efficacement contre de tels prix excessifs», estime Public Eye. Ceci «en permettant la commercialisation de génériques moins chers malgré l'existence d’un brevet, sans que la bonne marche des affaires du fabricant n'en soit affectée».

Et comme l'organisation se dit consciente que le conseiller fédéral a «un emploi du temps très chargé», elle a préparé pour lui une demande détaillée de licence obligatoire de 35 pages pour le médicament anticancéreux Perjeta de Roche. «Vous n'avez plus qu'à la déposer» auprès du Tribunal fédéral des brevets, écrit Public Eye dans sa lettre ouverte.

Ce serait une première

L'ONG souligne qu'il s'agirait d'une première. Cet instrument n'a en effet jamais encore été demandé pour un médicament en Suisse, selon elle.

Si Public Eye cible le Perjeta, c'est parce que l'entreprise pharmaceutique bâloise jouit avec ce médicament d'une situation de monopole, selon l'organisation. Ce qui lui permet d'en fixer le prix «pratiquement comme bon lui semble», ajoute-t-elle, citant un reportage diffusé dans l'émission «Rundschau» de la SRF.

Le Perjeta a rapporté 2,2 milliards de francs à Roche en 2017, selon le site internet du géant de la pharma. Ce qui en fait son quatrième médicament totalisant le plus de revenus.

Pas le bon instrument, pour l'OFSP

Contacté par Keystone-ATS, un porte-parole de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) renvoie à une réponse du Conseil fédéral à une interpellation du conseiller national Angelo Barrile (PS/ZH), datant de septembre dernier. «Le Conseil fédéral indique qu'il n'est pas possible de baisser les coûts de la santé en instaurant des licences obligatoires pour les médicaments nouveaux et onéreux», explique Grégoire Gogniat.

D'une part, la loi sur les brevets exige qu'une licence obligatoire passe par une procédure judiciaire, selon lui. D'autre part, le Tribunal fédéral des brevets n'accorde cette licence que pour les exceptions prévues dans cette loi et uniquement pour un acteur spécifique, à savoir le demandeur de brevet (une entreprise pharmaceutique désireuse de produire le médicament).

«De plus, la législation sur les produits thérapeutiques prévoit une protection des données sur les préparations originales d'une durée de dix ans au moins», ajoute Grégoire Gogniat. «Même en cas de licence obligatoire, le titulaire doit soumettre à son tour toutes les données cliniques à l'autorité compétente pour l'octroi de l'autorisation du médicament, une procédure coûteuse et s'étendant sur plusieurs années.»

La loi sur les produits thérapeutiques, révisée en 2016, ne prévoit ni révocation ni report sur autrui de l'autorisation de mise sur le marché, précise le porte-parole. «C'est pourquoi le Conseil fédéral est d'avis que, pour les médicaments protégés par un brevet, d'autres mesures s'imposent pour maîtriser les coûts, par exemple, les modèles de prix et les examens minutieux dans le cadre d'admissions limitées dans la liste des spécialités.»

Campagne lancée l'année dernière

Public Eye a lancé sa campagne en faveur de la licence obligatoire en mai 2018. Un porte-parole de Roche avait alors déclaré à l'Agence télégraphique suisse (ats) que ces licences étaient injustifiées. «Aucune base légale n'existe et un bon système de brevets est indispensable pour l'industrie pharmaceutique.»

La faîtière suisse Interpharma avait, quant à elle, souligné que les innovations contre le cancer permettent de «soigner un cancer sur deux». En revanche, Santésuisse avait dit accueillir favorablement le scénario de licences obligatoires sur le principe.

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