«Mettre la Suisse à feu et à sang»15 ans après la crise, le fils de Kadhafi demande l'asile à Genève
Lea Oetiker / trad.
12.6.2025 - 09:41
Hannibal Kadhafi, autrefois à l'origine d'une crise diplomatique entre la Suisse et la Libye, demande aujourd'hui l'asile à Genève depuis une prison libanaise. L'ironie de l'histoire ne pourrait pas être plus grande.
Hannibal al-Kadhafi est détenu au Liban depuis 2015 (photo d'archives).
Morten Juh/epa/Scanpix/dpa
Lea Oetiker / trad.
12.06.2025, 09:41
12.06.2025, 13:55
Il y a 15 ans, Hannibal Kadhafi a provoqué une grave crise diplomatique entre la Suisse et la Libye. Aujourd'hui, il est incarcéré dans une prison libanaise et demande l'asile en Suisse. C'est ce que rapporte le «Blick».
Le fils de l'ancien dictateur libyen Mouammar Kadhafi - qui a été renversé en 2011 - espère recevoir de l'aide de Genève, la ville qu'il a dû quitter après son arrestation en 2008.
En juillet 2008, Hannibal Kadhafi a été arrêté à Genève. La réaction de Tripoli, la capitale libyenne, a été brutale : menaces, réduction des livraisons de pétrole, arrestations, fermeture de l'ambassade suisse. Le régime a menacé de «mettre la Suisse à feu et à sang».
Le dictateur a même fait arrêter deux hommes d'affaires suisses. Ils sont restés bloqués pendant des mois dans le pays et ont été quasiment retenus en otage. Le président de la Confédération de l'époque, Hans-Rudolf Merz, s'est rendu en Libye pour présenter des excuses, mais il est revenu sans succès.
Aujourd'hui, le clan Kadhafi n'a plus d'État, plus d'armée, plus d'ambassades. Et Hannibal Kadhafi est détenu sans procès au Liban depuis 2015, dans le cadre de la disparition de l'imam chiite Moussa Sadr en 1978. Pourtant, le fils Kadhafi avait trois ans au moment de l'incident.
Officiellement, le Libyen est poursuivi pour «détention d'informations». Mais ses avocats, sa femme, ses deux enfants et sa sœur accusent les autorités d'une détention arbitraire, résultant d'une vengeance et de pressions politiques.
Pour la Suisse, le nom d'Hannibal Kadhafi est probablement associé à l'humiliation et au chantage de l'Etat. Mais il veut désormais revenir en Suisse. Il veut demander l'asile à Genève, où il menait autrefois une vie luxueuse.
Son avocat, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) et le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) n'ont pas voulu donner d'informations au «Blick» sur ses efforts en matière d'asile. Le SEM souligne toutefois que chaque demande d'asile est examinée individuellement.
Ces derniers mois, les proches de Kadhafi ont intensifié leurs efforts diplomatiques pour attirer l'attention sur son emprisonnement. Ils se sont adressés à des personnalités internationales telles que le président américain Donald Trump et le secrétaire général de l'ONU António Guterres.
Prisonnier sans procès équitable et exposé à des traitements potentiellement inhumains, Hannibal Kadhafi pourrait théoriquement bénéficier de la protection de plusieurs instruments juridiques internationaux, dont ceux des Conventions de Genève.
La décision d'accorder l'asile à Kadhafi appartient au pays dans lequel il dépose sa demande ce qui constitue un désavantage pour lui. De plus, la coopération avec les autorités locales est difficile car il est loin. Tant que le litige concernant le religieux chiite ne sera pas résolu, cela ne changera probablement pas.
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