«Tueur froid, organisé»Affaire le Tan: la perpétuité de nouveau requise en appel
ATS
28.6.2023 - 14:56
L'avocat général a requis mercredi devant la cour d'assises du Haut-Rhin la peine maximale contre Jean-Marc Reiser, accusé d'avoir assassiné en 2018 Sophie Le Tan. Le corps démembré de la jeune étudiante avait été retrouvé en forêt en 2019.
28.06.2023, 14:56
28.06.2023, 14:58
ATS
«Mon intime conviction, étayée par les éléments du dossier, c'est qu'il y a bien eu intention homicide et préméditation», a soutenu le magistrat, Jean-Luc Jaeg. Il a battu en brèche pendant deux heures et demie la thèse de coups ayant entraîné la mort sans intention de la donner, soutenue par la défense, pour démontrer de manière rigoureuse «l'intention criminelle» de l'accusé.
M. Reiser, 62 ans, avait été condamné à la perpétuité assortie de 22 ans de sûreté en première instance. «Ce dossier me rappelle le titre d'une fable de Jean de la Fontaine, 'Le loup et l'agneau'», a exposé M. Jaeg au début de sa plaidoirie. «L'agneau, c'est Sophie Le Tan», poursuit-il, décrivant une «fille méritante», «gentille, bienveillante, fidèle», qui avait «tout l'avenir» devant elle.
«Quant au loup, c'est Jean-Marc Reiser. Quand les enquêteurs l'ont identifié, on devine qu'un frisson d'horreur les a traversés», imagine-t-il. Et de détailler le lourd casier judiciaire de l'accusé, «criminel récidiviste ayant une appétence pour les produits stupéfiants», et de rappeler sa précédente condamnation par une cour d'assises, en 2003, pour viols et agressions sexuelles.
Attirance pour les femmes asiatiques
Dans ses rapports avec les femmes, Jean-Marc Reiser a toujours été «un homme violent, dominateur, harceleur» voire «tyrannique», soutient l'avocat général, évoquant les témoignages des ex-compagnes qui se sont succédé à la barre.
Il démonte le projet de voyage de l'accusé, soutenu par «aucun élément concret», qui lui fournirait un motif pour sous-louer son appartement. Au contraire, les petites annonces postées sous de faux noms sur le site LeBonCoin n'avaient aucun autre but que d'attirer dans l'appartement une étudiante, «avec l'intention qu'on ne puisse par remonter jusqu'à lui».
Jean-Marc Reiser fixe ainsi «11 rendez-vous» successifs à des locataires potentielles, à une adresse imprécise, à proximité de son immeuble. Les dix premiers rendez-vous ne seront pas honorés, parfois du fait des étudiants, souvent à cause de l'accusé, qui, le moment venu, ne répond plus aux sollicitations.
«Mais pour Sophie Le Tan, ça a matché», remarque Jean-Luc Jaeg. «Elle avait une double qualité. Elle était seule et elle était asiatique», souligne-t-il, en référence aux «attirances» de l'accusé. «C'est pour lui la proie rêvée.»
«Tueur froid, organisé»
Pour l'avocat général, Jean-Marc Reiser, après avoir «assouvi un fantasme tordu ou pervers» sur la jeune étudiante de 20 ans, ne pouvait se permettre de la laisser repartir, après avoir pris «un tel luxe de précautions» à ne pas laisser de traces pour l'attirer dans un «piège». Alors, «le loup a sacrifié l'agneau».
A l'issue de l'exposé précis et argumenté, le magistrat ne s'attarde pas particulièrement sur le démembrement du corps, «particularité horrible», ou sur le «nettoyage extrêmement approfondi» de l'appartement, si ce n'est pour estimer que cela renforce le caractère prémédité du crime, commis par un «tueur froid, organisé».
«Je vous demanderai donc de déclarer Jean-Marc Reiser coupable d'assassinat, en récidive légale», conclut-il. Il requiert la réclusion criminelle à perpétuité, en prenant soin de souligner «l'absence totale de remords» de l'accusé», sa «dangerosité» et le «risque de récidive» pour l'homme qui fait face depuis 10 jours à Colmar à sa sixième cour d'assises.
Il termine par une remarque plus personnelle. «La peine prononcé en première instance», la perpétuité avec une période de sûreté de 22 ans, était «lourde, mais justifiée», avance-t-il. Ce procès d'appel «n'aura servi à rien ou pas grand-chose, si ce n'est prolonger ou raviver la souffrance de la famille Le Tan».