Un homme armé d'un couteau et criant «Allah Akbar» a tué un enseignant et blessé grièvement deux personnes dans un lycée à Arras, dans le nord de la France vendredi matin.
L'assaillant, interpellé par la police, âgé d'une vingtaine d'années, est d'origine tchétchène, selon des sources policières. Selon l'une d'elles, il est de nationalité russe, arrivé en France en 2008.
L'individu, fiché S pour sa dangerosité potentielle, était sous la surveillance des services de renseignements français et avait été contrôlé jeudi, a indiqué à l'AFP une source du renseignement. En France, les fiches S concernent les personnes qui peuvent, en raison de leur activité individuelle ou collective, porter atteinte à la sûreté de l'État.
L'homme «était sous écoute et faisait l'objet de surveillances physiques», «depuis cet été», a précisé la même source, ajoutant que «ses conversations téléphoniques n'avaient pas mis en évidence, ces derniers jours, d'éléments permettant d'annoncer un passage à l'acte».
L'enseignant tué a reçu un coup de couteau à la gorge ainsi que dans le thorax, toujours selon la police.
Entre la vie et la mort
Parmi les deux blessés figurent un agent de sécurité qui a été atteint de plusieurs coups de couteau, et un enseignant. Selon une source proche du dossier, l'agent de sécurité est «très gravement blessé, entre la vie et la mort». Aucun lycéen n'a été blessé.
Cette attaque survient trois ans presque jour pour jour après l'assassinat de Samuel Paty, un enseignant de 47 ans décapité le 16 octobre 2020 près de son collège de Conflans-Sainte-Honorine, en région parisienne, une dizaine de jours après avoir montré à ses élèves des caricatures de Mahomet lors de cours sur la liberté d'expression.
L'assaillant de 18 ans, un réfugié russe d'origine tchétchène, avait été tué par la police. Le parquet national antiterroriste a annoncé vendredi avoir ouvert une enquête.
Le frère de l'assaillant, âgé de 17 ans, a été arrêté à proximité d'un autre établissement. Et selon une source policière, «plusieurs membres de la famille ont été interpellés pour les besoins de l'enquête». Le président français Emmanuel Macron s'est rendu en début d'après-midi sur les lieux de l'attaque.
«L'horreur vient de frapper» avait réagi plus tôt Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée nationale, qui a suspendu ses travaux en solidarité avec les victimes.
«On s'est barricadés»
Un large périmètre de sécurité a été mis en place autour de l'établissement, où la police, les pompiers et les secours étaient déployés, ont constaté des journalistes de l'AFP. Des parents étaient présents devant le lycée, d'où les élèves sont visibles à travers les fenêtres.
Les lycéens et le personnel du lycée ont été confinés dans l'établissement, a précisé une source policière. Un enseignant de philosophie ayant assisté à l'attaque a décrit un mouvement de panique au moment de l'intercours, quand les élèves du collège se sont retrouvés face à un homme armé.
«Il a agressé un personnel de la cantine, j'ai voulu descendre pour intervenir, il s'est tourné vers moi, m'a poursuivi et m'a demandé si j'étais professeur d'histoire-géographie», a-t-il ajouté. «On s'est barricadés, puis la police est arrivée et l'a immobilisé».
Selon lui, la victime est un professeur de français du collège, une information confirmée à l'AFP par la secrétaire générale du Snes-FSU, un syndicat d'enseignants. Deux autres syndicats, le Snes-FSU et le SE Unsa, ont affirmé à l'AFP que l'assaillant était «un ancien élève».
Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux montraient un jeune homme, pantalon noir et veste grise, se battre avec plusieurs adultes dans la cour de l'établissement, visiblement avec une arme à la main, avant de se diriger vers la porte d'entrée.
Effroi des enseignants
«Effroi», «déflagration», «épouvantable»: les enseignants contactés par l'AFP se sont dits «sous le choc» après le meurtre d'un des leurs.
«L'école est une fois de plus une cible, car elle incarne les valeurs de la République, liberté égalité, fraternité», a ainsi témoigné Agnès Andersen, secrétaire générale d'un syndicat de chefs d'établissements. Le gouvernement a demandé de renforcer immédiatement la sécurité de tous les établissements scolaires en France.
Depuis l'attaque qui a fait 12 morts en janvier 2015 au siège parisien de l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, une vague d'attentats jihadistes a fait plus de 260 morts en France.
Ce nouvel épisode violent survient alors que la guerre fait rage en Israël, faisant craindre à l'exécutif une importation du conflit en France. Jeudi soir, le président Macron a appelé les Français à rester «unis» et a promis d'être «impitoyable avec tous les porteurs de haine», tout en réitérant son soutien à Israël. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, a annoncé jeudi avoir recensé «plus d'une centaine d'actes antisémites» depuis samedi.