Assaillant de RambouilletRadicalisation «peu contestable» mais d'autres troubles
ATS
25.4.2021 - 12:39
L'attaque mortelle vendredi d'une agente dans le commissariat de police de Rambouillet, près de Paris, a été commise par un Tunisien de 36 ans dont la radicalisation «paraît peu contestable». L'homme présentait «certains troubles de personnalité», a indiqué dimanche le procureur antiterroriste.
Plusieurs éléments accréditent la piste du passage à l'acte de cet habitant de Rambouillet, radicalisé en quelques mois, a annoncé devant la presse le procureur national antiterroriste, Jean-François Ricard.
Une «rapide exploitation» du téléphone de l'agresseur, Jamel Gorchene, a révélé «qu'il avait, immédiatement avant de passer à l'acte, consulté des vidéos de chants religieux glorifiant le martyr et le jihad», a-t-il précisé.
Publications sur Facebook
Le procureur a aussi évoqué ses publications sur Facebook qui ont révélé, à compter de l'automne dernier, «une adhésion à une idéologie légitimant la violence contre ceux ayant offensé le prophète».
Ainsi, «le 24 octobre 2020, quelques jours après l'assassinat de Samuel Paty (par un islamiste dans les Yvelines, ndlr), l'auteur s'associait à une campagne de soutien au prophète face aux offenses qui lui seraient faites», a souligné M. Ricard.
«Un Coran» et «un tapis de prière» ont été saisis dans son scooter et son cabas. Et, peu avant le drame, une caméra de vidéosurveillance a filmé l'assaillant se dirigeant vers «une salle de prière provisoire», sans que les images ne permettent d'affirmer qu'il y est entré «directement». Il a été vu rejoindre le centre-ville un peu plus d'une heure après.
«Si la radicalisation de l'agresseur paraît peu contestable, la présence de certains troubles de personnalité a pu aussi être observée», a relevé M. Ricard.
Troubles du comportement
En garde à vue, le père de l'assaillant a évoqué la «pratique rigoureuse de l'islam» de son fils et «des troubles du comportement» observés chez lui «en début d'année».
Il avait bénéficié de deux consultations psychiatriques à l'hôpital de Rambouillet en février. Cependant «son état n'a nécessité ni hospitalisation ni traitement», a relevé M. Ricard.
La Tunisie, dont la France sollicite la collaboration dans cette enquête, a condamné «énergiquement» l'attaque, dans un communiqué de son ambassade. Elle dénonce un «acte barbare (intervenant) en plein mois de Ramadan, mois saint qui incarne plutôt les valeurs de la tolérance et de la fraternité entre les individus».
A 14H25, vendredi, l'auteur, «écouteurs sur les oreilles», a poignardé à l'abdomen et à la gorge une agente administrative de 49 ans sans arme ni uniforme – dans le sas du commissariat. Selon des témoins, l'assaillant a crié «Allah Akbar».
En riposte, un brigadier de police a fait feu à deux reprises sur l'agresseur qui refusait «de lâcher le couteau» avec «une lame de 22 cm». Tombé au sol, il a lancé «son couteau en direction des policiers», selon le procureur.
Cinquième garde à vue
Une cinquième personne, un de ses cousins, a été placé en garde à vue dimanche. Son père – qui habitait avec lui – un couple qui le domiciliait administrativement et un autre cousin étaient déjà en garde à vue depuis vendredi et samedi.
L'assaillant, chauffeur-livreur, était inconnu des services de renseignement et de la justice. Mais son mode opératoire correspond aux appels récurrents du groupe Etat islamique à s'attaquer aux forces de l'ordre.
Il «n'avait pas été porteur de menaces, on n'avait pas détecté de signes de radicalisation», a déclaré samedi le coordonnateur national du renseignement Laurent Nuñez, ajoutant: «cela devient très compliqué (...) de détecter ce genre de profil» commun aux «huit attaques» commises en France depuis la tuerie de la préfecture de police de Paris en octobre 2019.
«Dépressif»
Originaire de Msaken, sur la côte est de la Tunisie, le meurtrier était arrivé clandestinement en France en 2009 et avait été régularisé dix ans plus tard. Il avait obtenu en décembre un titre de séjour valable un an.
Revenu en Tunisie entre le 25 février et le 13 mars, il était apparu «dépressif», ont dit à l'AFP un cousin et une cousine à Msaken.
L'attaque de Rambouillet est «la 17e action terroriste islamiste commise en France depuis 2014 contre les forces de l'ordre», a rappelé M. Ricard.
Un hommage sera rendu à la victime lundi à 17h30 devant l'hôtel de ville de Rambouillet. A la même heure, les syndicats Unité-SGP-Police et FSMI FO ont appelé les forces de l'ordre à «se rassembler symboliquement devant leur bâtiment».