Procès Attentat de Strasbourg: un principal accusé s'explique

ATS

21.3.2024 - 16:43

L'attentat de marché de Strasbourg avait fait cinq morts et onze blessés en décembre 2018 (archives).
L'attentat de marché de Strasbourg avait fait cinq morts et onze blessés en décembre 2018 (archives).
ATS

Avant d'aider Chérif Chekatt, le tueur du marché de Noël de Strasbourg en 2018, à se procurer une arme, l'accusé a été à la fois un délinquant multirécidiviste et un rappeur, auteur de clips controversés. Mais certainement «pas un terroriste», a-t-il assuré devant la cour d'assises de Paris.

Keystone-SDA

«J'ai tué personne (...). On peut tout me reprocher, mais pas d'être un terroriste!», a affirmé dans un sanglot l'homme de 42 ans, qui encourt la perpétuité pour complicité d'assassinats et de tentatives d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste.

Avant de se pencher sur les responsabilités respectives de l'accusé et de ses trois coaccusés dans la fourniture d'un pistolet à l'auteur de l'attentat – qui fit cinq morts et onze blessés -, la cour tente depuis mercredi de retracer le parcours du principal mis en cause, qui avait rencontré l'assaillant en prison. Ce dernier, un homme radicalisé, a été abattu après 48 heures de traque.

En l'absence de justificatifs sur les différents petits boulots que l'accusé dit avoir occupés entre deux incarcérations, «c'est votre casier judiciaire qui nous renseigne le plus sur votre parcours de vie», observe la présidente, Corinne Goetzmann.

Arrivé en France, en l'occurrence dans le quartier strasbourgeois de Hautepierre, à l'âge de neuf ans, le garçon est placé en foyer par un juge des enfants dès l'adolescence. Il entame alors rapidement un parcours judiciaire chargé: jusqu'à son incarcération dans le dossier de l'attentat de décembre 2018, il sera condamné 22 fois en 19 ans, à un total de plus de 12 ans d'emprisonnement.

«J'en suis pas fier, tout ça c'est derrière moi», répète à l'envi le quadragénaire à la silhouette massive, père de trois enfants adolescents – issus de deux unions, et qu'il n'a pas ou peu vus grandir.

Il raconte avoir écrit et composé, dès l'âge de 14 ans, des morceaux de rap, une «passion» dont il aurait tiré, à certaines périodes, jusqu'à 1200 euros de revenus mensuels.

La cour a visionné jeudi trois de ses clips. Dans le premier, intitulé «DAR» comme «Dangereux, armés et redoutables», réalisé en 2008 et toujours visible sur internet, de nombreux figurants brandissent des armes et l'un d'eux joue le rôle d'un policier molesté. La vidéo avait à l'époque suscité la colère des syndicats de policiers.

Il ne faut pourtant y voir «aucun message», soutient, depuis le box des accusés, l'auteur du clip. Il assume avoir voulu «faire le buzz», car «c'est la polémique qui fait vendre».

Apologie des armes?

«C'est pas pour faire l'apologie des armes, c'est scénarisé», soutient-il. La présidente s'étonne par ailleurs que le clip donne à voir des femmes légèrement vêtues, à quatre pattes et tenues en laisse: «Une femme traitée comme un animal, c'est un choix commercial?», interroge-t-elle.

«Je dirais plutôt un choix artistique», répond l'ancien rappeur. «Les femmes, je les respecte, tout ça c'est que de la comédie, de la mise en scène».

La présidente lui demande par ailleurs comment interpréter une scène d'un autre clip, où on le voit s'agenouiller pour faire la prière musulmane, alors même que cet homme né dans une famille protestante affirme ne pas s'être converti à l'islam.

«J'ai rien à voir avec la religion. J'ai eu des enfants avec des femmes musulmanes, mais je ne me suis jamais converti», martèle-t-il. La cour lui fait pourtant observer que dans les «remerciements» accompagnant un de ses CD en 2009, il mentionnait «Dieu le miséricordieux... Allah tout-puissant». «C'est sorti du contexte», répond-il. «J'ai dit ça comme ça, j'aurais pu dire Abraham, Jésus, Marie, Joseph. Ca n'a rien à voir avec l'islam».