InsoliteDans la banlieue d'Athènes, la récolte d'olives sur les trottoirs bat son plein
ATS
2.12.2024 - 13:24
A deux pas de l'une des artères les plus fréquentées de la banlieue d'Athènes, des ouvriers agricoles se livrent à une activité si insolite que des automobilistes s'arrêtent pour les contempler: à côté d'un arrêt de bus, ils étendent des filets sur le sol et récoltent des olives.
ETX Studio, ATS
02.12.2024, 13:24
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Avec des centaines d'oliviers dans ses rues, le conseil municipal de Glyfada, banlieue balnéaire de la capitale grecque, a eu l'idée de produire de l'huile, distribuée ensuite aux plus nécessiteux.
«Ici, nous produisons de la bonne huile (...) comme partout en Grèce», explique à l'AFP Stavros Giakoumakis, maire adjoint en charge des espaces verts, qui supervise le projet depuis son lancement en 2014.
«Notre terre est une terre d'abondance. Tout ce que nous plantons prend racine», se réjouit cet homme de 70 ans.
Outre Glyfada (90.000 habitants), plusieurs autres banlieues d'Athènes ont lancé de telles initiatives.
Patras, le grand port du Péloponnèse, s'y est également mise, tout comme Thessalonique, la seconde ville du pays, cette année.
«En plus d'empêcher la perte de ces fruits précieux, cela préserve les oliviers et évite également aux piétons» de glisser sur les trottoirs, selon la municipalité de la banlieue athénienne d'Alimos dans un appel aux volontaires début novembre.
Un litre d'huile d'olive, aliment de base du régime méditerranéen depuis des siècles, coûte aujourd'hui entre 9 et 18 euros dans les supermarchés grecs.
«Personne ne les ramassait»
La récolte de Glyfada, estimée à environ une tonne d'olives cette année – de quoi produire dans les 150 litres d'huile -, est donnée aux associations d'aide aux personnes en difficulté.
«Si toutes les municipalités faisaient la même chose, les familles vulnérables auraient assez d'huile d'olive pour toute l'année», assure M. Giakoumakis.
Eleni Papachristopoulou, une habitante du quartier depuis les années 1970, assure que les arbres dans sa rue ont été plantés il y a plus de 50 ans.
«Pendant des années, les olives tombaient par terre et personne ne les ramassait», raconte-t-elle.
Avec l'Espagne et l'Italie, la Grèce est un important producteur d'huile d'olive dans l'Union européenne.
Elle détient la plus forte consommation annuelle par habitant parmi les Vingt-Sept, environ 12 kilos par personne, selon les données de l'UE.
L'huile produite avec les olives des rues de Glyfada a un goût acidulé et pique la gorge, deux signes de pureté.
Mais des experts jugent que les produits cultivés dans les zones urbaines devraient être spécifiquement testés pour détecter d'éventuels produits chimiques nocifs.
Alerte aux hydrocarbures
La Société scientifique des encyclopédistes de l'olive (4E) estime que cette huile d'olive «urbaine» était «chargée de polluants qui, avec des concentrations élevées, constituent des produits chimiques dangereux».
Les hydrocarbures aromatiques minéraux (MOAH) sont particulièrement préoccupants car, selon l'Autorité européenne de sécurité des aliments, ils peuvent provoquer des cancers.
«Les oliviers des zones où l'atmosphère est polluée par les gaz d'échappement peuvent contenir une quantité accrue de MOAH dans les fruits, et par conséquent aussi dans l'huile d'olive», explique Constantinos Demopoulos, membre du groupe 4E et professeur émérite en biochimie et chimie alimentaire à l'Université d'Athènes.
«L'huile d'olive non étiquetée qui circule sur les comptoirs n'a peut-être pas la composition requise, pas forcément par malveillance, mais par ignorance», soutient-il.
«Je ne consommerais pas d'huile d'olive qui n'a pas été analysée, même si elle vient d'un ami», précise-t-il à l'AFP.
Le groupe 4E déplore que les municipalités «semblent ignorer» les risques, et que l'inspection de l'huile d'olive provenant de la rue se concentre généralement sur l'acidité et d'autres caractéristiques gustatives.
Les tests supplémentaires nécessaires pour détecter la présence d'hydrocarbures doivent être faits dans des laboratoires plus «spécialisés» et sont plus coûteux, note-t-elle.
Au laboratoire chimique de l'Etat grec, les tests d'acidité coûtent 20 euros. Les tests pour les hydrocarbures aromatiques coûtent, eux, entre 150 et 180 euros.