Procès en Valais Enseignant valaisan jugé pour abus sexuel

ATS

20.5.2019 - 22:33

L'affaire est jugée par le tribunal de Sierre, mais les débats ont lieu au tribunal cantonal de Sion (archives).
L'affaire est jugée par le tribunal de Sierre, mais les débats ont lieu au tribunal cantonal de Sion (archives).
Source: KEYSTONE/CHRISTIAN MERZ

Le Ministère public a requis lundi 40 mois de prison contre l'enseignant valaisan accusé notamment d'actes d'ordre sexuel avec des enfants. La défense a demandé l'acquittement, dénonçant une instruction menée à charge.

Les faits reprochés à l'accusé se sont déroulés entre août 2011 et novembre 2013. L'enseignant organisait dans le cadre de l'école des expériences sur le thème de l'éveil aux sens.

L'une d'elles consistait à inviter des élèves volontaires à prendre une douche ou à se changer à l'aveugle après un cours de gym. Ils devaient se dévêtir par groupes de deux, munis d'un bandeau ou d'un casque à la visière obturée par un ruban adhésif. L'accusé a reconnu avoir observé à leur insu les jeunes filles alors âgées de 11 à 13 ans et avoir eu des érections avant de se masturber dans un local réservé aux enseignants.

Lors d'une autre expérience, l'accusé proposait à des élèves de participer individuellement à une dégustation de fruits à l'aveugle dans une salle d'appui du centre scolaire aux stores toujours baissés. Selon le Ministère public, l'enseignant fermait la porte à clé, demandait aux élèves de se mettre à califourchon sur une chaise, le buste face au dossier, les yeux bandés, et de se tenir les mains dans le dos. Il en aurait profité pour introduire son sexe dans leur bouche.

«Sans sursis, même partiel»

Le procureur Alexandre Sudan a requis trois ans et quatre mois de prison contre l'enseignant, «sans sursis, même partiel». Il a demandé un traitement ambulatoire pour trouble mental et une interdiction d'exercer une profession en lien avec des mineurs durant cinq ans.

Le Ministère public a brossé un portait de l'accusé sur la base notamment «des constatations de l'expert psychiatre». Il a décrit un homme à «l'enfance et à la scolarité classiques et sans heurts». Un homme qui souffre toutefois de voyeurisme et «arrange les faits en fonction de sa réalité».

Le prévenu «se pose en victime et banalise ses actes qu'il considère comme des faiblesses masculines», a affirmé Alexandre Sudan. Un accusé «froid, sans remords et sans empathie» qui n'a «jamais présenté la moindre excuse à ses victimes, a poursuivi le procureur.

Dégustations «incongrues»

Les avocats des six victimes ont expliqué combien leurs clientes avait été «trahies» par ce professeur censé les «protéger et les aider à grandir». Réfutant la thèse du complot, ils ont affirmé que les récits de toutes les victimes étaient «identiques» et que les détails donnés par chacune d'elles ne pouvaient «mettre en doute leur version».

L'un des avocats a souligné le «caractère incongru» des dégustations à l'aveugle et individuelles, au sujet desquelles l'enseignant n'a, selon lui, «jamais donné d'explications cohérentes», et que ses collègues n'organisaient qu'en groupe et jamais dans un tel contexte. Il a rappelé que ce n'était pas les victimes mais une enseignante qui avait donné l'alarme, constatant le désarroi de l'une des élèves.

Expertise de crédibilité

L'avocat de l'enseignant, Me Olivier Couchepin, a rappelé que son client avait admis souffrir de voyeurisme et être traité pour cela. Mais il réfute tout acte d'ordre sexuel avec des enfants et a toujours dit qu'il n'avait jamais vu nues les élèves qu'il tirait au sort, mais en sous-vêtements, souligne l'avocat.

La défense a dénoncé et cité des déclarations qu'il estime «obscures, contradictoires et évolutives dans le dossier». Certains élèves disent que rien d'anormal ne se passait durant ces expériences, d'autres indiquent que des rumeurs circulaient durant la récréation sur le fait que l'enseignant «mettait son sexe dans la bouche» des enfants.

«On a tout mis ensemble ce qu'on savait et on a dit que c'était vrai», aurait déclaré un élève durant l'instruction. Et Me Couchepin de s'interroger, tout en regrettant qu'aucune expertise de crédibilité n'ait été menée: «Etaient-ce des discussions de récréation ou des faits qui ont réellement eu lieu? N'y a-t-il pas eu un effet d'entraînement entre les filles?»

Dans cette affaire, c'est une parole contre une autre. Le doute doit profiter à l'accusé, a souligné Me Couchepin, qui a demandé l'acquittement de son client.

Verdict mardi

Libre depuis les faits, l'accusé qui vit en Valais avec sa famille, a été incarcéré à l'issue du procès qui se déroulait à huis clos. La cour a dit craindre un «risque de fuite». Hospitalisé, l'accusé est arrivé dans la salle d'audience après qu'un mandat d'amener a été délivré contre lui.

Le tribunal du district de Sierre énoncera son verdict mardi à 14h30. La cour siégera à nouveau exceptionnellement dans une salle du tribunal cantonal à Sion.

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