Stand de saucisses grillées à la 43e «Frairie des Petits Ventres», le 21 octobre 2016, à Limoges
Jean-Pierre Ribière, le dernier tripier de Limoges, prépare des «couilles de mouton» à la 43e «Frairie des Petits Ventres», le 21 octobre 2016
Fraises de veau et couilles de mouton : Limoges célèbre ses produits tripiers
Stand de saucisses grillées à la 43e «Frairie des Petits Ventres», le 21 octobre 2016, à Limoges
Jean-Pierre Ribière, le dernier tripier de Limoges, prépare des «couilles de mouton» à la 43e «Frairie des Petits Ventres», le 21 octobre 2016
Sur les stands abondent boudins, fraises de veau et autres «couilles de mouton» persillées : A l’heure des repas équilibrés et de la montée en puissance du véganisme, Limoges célèbre ce vendredi, avec la «Frairie des Petits Ventres», ses produits tripiers et le savoir-faire ancestral de ses bouchers.
Depuis 47 ans, chaque troisième vendredi d’octobre, commerçants, restaurateurs et artisans des métiers de bouche déploient leurs étals rue de la Boucherie en centre-ville, pour célébrer cette fête gastronomique où se pressent chaque année entre 15.000 et 30.000 personnes.
Outre les «frivolités» – des «couilles de moutons» agrémentées de sauce persillée – on déguste viande, charcuterie et produits tripiers lors de cette «Frairie des Petits Ventres» dont le nom assemble le vieux nom pour “fête” à une spécialité locale de pieds de moutons cuits au bouillon dans une panse.
«On s’y est pris trois semaines à l’avance pour tout préparer. Sur notre stand, on propose de la langue et de la tête de veau sauce tortue, des abats blancs, des grillons limousins, des boudins aux châtaignes», détaille Josette Johan, de la maison «Tripes et compagnie”.
D'autres stands offrent des bières locales, du cidre, des galetous (crèpes de blé noir) garnis de rillettes, des quiches au ris de veau, des boudins, des clafoutis.
La fête a déjà eu les honneurs du New York Times et du Frankfurter Allgemeine Zeitung. «La Frairie, c’est un élan de joie l’instant d’une journée, autour des bonnes choses et du bien-vivre», résume Laure Martin-Soutenet derrière des plaques fumantes où cuisent des andouillettes.
«Cela nous rattache à l'histoire de notre ville, de ce quartier, l’un des plus beaux de Limoges et des mieux préservés”, ajoute cette femme de 37 ans qui vient donner un coup de main chaque année de Fontainebleau, avec son mari limougeaud comme elle.
- Un rognon pour bonbon -
A l’origine, la Frairie est née d'une fronde, en 1973, contre un projet municipal de rénovation de ce quartier médiéval où étaient installés des bouchers depuis le XIIIe siècle.
Afin d’éviter la destruction de maisons à colombages, des amoureux du patrimoine créent l'association Renaissance du vieux Limoges (RVL). Avec la Confrérie Saint-Aurélien, créée en 1315 et réunissant des bouchers ainsi que l'école de musique traditionnelle l'Eicola dau Barbichet, ils ont l'idée de créer une fête en l’honneur des bouchers.
«Le maire est convié pour la première édition. Il regarde cette foule, la rue envahie par 5.000 à 10.000 électeurs», raconte Michel Toulet, président de RVL, «il se tourne vers les organisateurs et leur dit : +Vous avez gagné+».
A la fête dont l’ambiance est parfois paillarde, se mêle une tradition catholique. En fin d’après-midi, la statue de Notre-Dame-de-Pitié est descendue à travers la foule, tandis que le maire inaugure la «Frairie».
«Au XIXe siècle existait une fête patronale de Notre-Dame-de-Pitié le 15 septembre. En 1973, les créateurs de la Frairie, qui étaient de bons catholiques, ont souhaité rajouter une petite touche religieuse», explique M. Toulet.
La rue, longue de 130 m, abritait “une cinquantaine de bouchers jusqu’aux années 1960-70. L’arrivée des grandes surfaces et de l’abattoir municipal de Limoges a sonné la fin de cette époque”, ajoute Pierre Lamige, président de la confrérie Saint-Aurélien réunissant les bouchers.
Ces derniers, «très croyants, ont financé la chapelle Saint-Aurélien, au milieu de la rue, les vitraux, une statue». On voit dans cette dernière l’enfant Jésus dégustant un rognon dans les bras de sa mère. “Avant la guerre, on en donnait comme friandises aux enfants”, dit M. Lamige.
“A un moment où l’on parle de gaspillage alimentaire, cette fête permet aussi de rappeler que les produits tripiers peuvent être cuisinés de plein de manières. On dit habituellement que +tout est bon dans le cochon+. Mais c’est vrai pour les autres animaux”, ajoute M. Toulet.
Seuls, les vegans ne semblent pas les bienvenus. En 2017, l’association L.214 avait proposé un stand, refusé par la préfecture pour des raisons de sécurité.
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