La justice genevoise ne cautionne pas l'action d'un militant pro-climat. Le Tribunal de police a condamné l'activiste du collectif Breakfree Suisse pour dommages à la propriété sur un bâtiment de Credit Suisse (CS) en 2018.
Statuant contradictoirement, le tribunal a toutefois diminué jeudi la peine du militant. Celui-ci a écopé de 10 jours-amendes à 30 francs avec sursis, contre 20 jours-amendes dans sa première condamnation par ordonnance pénale. Le tribunal a tenu compte de la situation financière de cet homme de 23 ans, qui a abandonné ses études d'ingénieur agronome et vit de petits boulots.
Contrairement à la justice vaudoise qui a jugé une affaire semblable en janvier à Renens, la juge n'a pas retenu l'état de nécessité licite dans lequel le militant aurait agi. Le prévenu devra aussi payer les frais de nettoyage de 2250 francs réclamés par la banque, ainsi que les frais de procédure. Le jugement relève que la prise de conscience du militant n'est pas bonne.
Danger pas immédiat
Les faits remontent au 13 octobre 2018, dans le cadre de la première grande Marche pour le climat à Genève. Une quinzaine de manifestants avaient apposé leurs mains couvertes de peinture rouge sur les pages du rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) sur la façade du siège genevois de CS, afin de symboliser les victimes du réchauffement climatique.
Sans remettre en cause l'urgence climatique, le Tribunal de police estime que les conditions pour faire valoir l'état de nécessité ne sont pas remplies. Le prévenu n'a pas agi dans une situation de danger immédiat et impossible à détourner autrement qu'en portant atteinte à autrui.
«L'action 'mains rouges' n'était pas nécessaire et n'a pas empêché le réchauffement climatique», a déclaré la présidente Françoise Saillen Agad en lisant le jugement. Et de préciser que d'autres moyens, comme le fait de participer à des manifestations qui ont eu un fort écho médiatique, permettaient précisément à l'activiste de faire passer son message.
«Esprit sacrifié»
Le jeune homme s'était opposé à sa condamnation par ordonnance pénale pour obtenir un débat public. Mardi, lors du procès, son avocate Laïla Batou avait plaidé l'acquittement. Elle a fait part de sa déception à l'issue du verdict: «On renvoie la jeunesse manifester, tandis que les personnes détentrices du pouvoir se défaussent de leurs responsabilités.»
L'avocate a rappelé qu'elle place de grands espoirs dans la justice et dans le «courage» des magistrats. Un second acquittement, après celui de Renens, aurait contraint l'Etat à légiférer sur le désinvestissement dans les énergies fossiles. Selon Me Batou, le droit pénal permet d'agir. «Mais à trop s'accrocher à la lettre du droit, on en sacrifie l'esprit», a-t-elle déploré, n'excluant pas un recours.
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