Autriche L'Autriche reconnaît des défaillances

ATS

4.11.2020 - 19:41

Sur les lieux de l'attaque à Vienne, quelques fleurs et bougies ont été déposées.
Sur les lieux de l'attaque à Vienne, quelques fleurs et bougies ont été déposées.
Source: KEYSTONE/EPA/CHRISTIAN BRUNA

Failles du service de renseignement et un programme de déradicalisation qui a échoué à repérer la dangerosité de l'assaillant: le gouvernement autrichien a admis des erreurs mercredi, deux jours après l'attentat islamiste meurtrier qui a endeuillé Vienne.

Kujtim Fejzulai, le jeune homme de vingt ans qui a ouvert le feu lundi soir en plein centre ville, tuant 4 personnes et faisant plusieurs blessés, avait apparemment commencé à fomenter son projet dès l'été.

Sympathisant du groupe djihadiste Etat islamique, qui a revendiqué l'attentat, il avait tenté de se procurer des munitions en Slovaquie. Les services secrets de ce pays voisin de l'Autriche avaient alors alerté leurs homologues à Vienne, a expliqué mercredi le ministre de l'Intérieur Karl Nehammer.

«Il y a manifestement eu par la suite un problème au niveau de la communication», a-t-il déploré, visiblement ébranlé. Et d'accuser son prédécesseur d'extrême droite, Herbert Kickl, «d'avoir causé des dommages durables, pour ne pas dire détruit» le BVT (Bureau pour la protection de la Constitution et la lutte contre le terrorisme).

Condamné à de la prison

Autre question qui se pose: comment Kujtim Fejzulai, «soldat du califat», a-t-il pu échapper au suivi des autorités judiciaires, dont il était connu?

Car cet Autrichien, dont les parents sont originaires de Macédoine du Nord, avait été condamné à de la prison en avril 2019 pour avoir tenté de rejoindre les rangs des combattants djihadistes en Syrie mais il avait été relâché en décembre avant d'avoir fini sa peine.

Intégré dans un programme de «déradicalisation», Kujtim Fejzulai avait réussi à «tromper» les personnes chargées de son suivi, a regretté le ministre de l'Intérieur Karl Nehammer. Ce n'était «certainement pas une bonne décision», a fustigé le chancelier conservateur Sebastian Kurz.

Ce «terrible drame aurait pu avoir lieu même si l'attaquant avait purgé la totalité de sa peine, jusqu'en juillet 2020», a toutefois fait remarquer l'association DERAD chargée de ce programme. L'agresseur «n'a à aucun moment été présenté comme déradicalisé», a-t-elle souligné dans un communiqué, tout en disant ne pas posséder les moyens de surveillance dont est équipé le renseignement autrichien.

Une «âme perdue»

«Je le décrirais comme une âme perdue, qui cherchait sa place» dans la société, a réagi auprès de l'AFP son avocat Nikolaus Rast, qui l'avait défendu lors de son procès en avril 2019. «Personne ne l'aurait cru capable d'un tel acte».

Les enquêteurs, qui ont saisi «une grande quantité de matériel» au cours de perquisitions, cherchent par ailleurs à déterminer d'éventuelles complicités.

Ils interrogeaient toujours mercredi 14 personnes, «âgées entre 18 à 28 ans, issues de l'immigration et certaines n'étant pas des citoyens autrichiens» selon le ministre. D'après la police, «il est possible qu'elles aient apporté un soutien» à l'assaillant mais leur rôle exact reste encore flou.

Les deux jeunes suspects arrêtés mardi à Winterthour (ZH) en marge de l'attentat sont sous enquêtes pénales depuis 2018 et 2019 pour des faits liés au terrorisme. Les procédures pénales touchant ces deux ressortissants suisses sont toujours en cours au niveau fédéral, indique à Keystone-ATS le Ministère public de la Confédération (MPC).

L'homme âgé de 24 ans est l'accusé principal dans l'une des deux procédures. Son camarade de 18 ans est, en outre, sous enquête dans le cadre d'une procédure de la Justice des mineurs.

La vie a repris

Sur les lieux de l'attaque, quelques fleurs et bougies, toujours les cercles de craie sur le sol tracées par les enquêteurs, mais la vie avait repris son cours mercredi.

Les Viennois se pressaient dans les métros et tramway, les boutiques accueillaient de nouveau des clients et les enfants avaient repris le chemin de l'école. Seuls les restaurants restaient fermés pour cause de confinement face à la pandémie de Covid-19.

Tueur unique

L'analyse des vidéos, transmises à la police par les nombreux témoins de l'attentat, «a conforté la théorie d'un auteur unique», a souligné le ministre de l'Intérieur.

Dans une interview à la presse allemande, Sebastian Kurz a appelé l'Union européenne à mieux lutter contre l'«islam politique», une «idéologie» qui représente un «danger» pour le «modèle de vie européen».

Dans cette optique, il a dit réfléchir à des «initiatives communes» avec le président français Emmanuel Macron, attendu lundi à Vienne pour une «courte visite».

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