Viols et agressions sexuellesLe «paysan guérisseur» passe du JT de TF1 à la prison
AFP
2.10.2023
Un «paysan guérisseur» connu en Auvergne pour ses dons de rebouteux va être jugé à partir de mercredi devant la cour criminelle départementale de Riom (Puy-de-Dôme) pour trois viols et neuf agressions sexuelles sur des patients, sous couvert de pratique thérapeuthique.
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02.10.2023, 13:49
02.10.2023, 16:17
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Michel Boudon, 72 ans, agriculteur à la retraite, a soigné pendant des années des centaines de personnes. Il a conquis une certaine célébrité grâce à plusieurs reportages télévisés, à un court-métrage et à une biographie écrite par un auteur local sur les talents de celui qu'il décrit comme un «paysan montagnard, dresseur de boeufs et guérisseur».
L'homme qui vivait jusqu'à son arrestation dans la ferme héritée de ses parents à Saint-Jean-des-Ollières (Puy-de-Dôme) explique dans un film toujours disponible sur YouTube avoir découvert son «don» à 42 ans et recevoir des patients chez lui du matin au soir.
«Il a imposé une fellation en évoquant la nécessité de manipuler la zone basse du bassin»
Mais en 2020, à l'issue d'une consultation, un jeune homme alors âgé de 23 ans, fait état d'une fellation pratiquée par le guérisseur qu'il était venu voir après un grave accident de la route.
Entendue par les gendarmes, la victime précise que les faits se sont déroulés dans la cuisine de l'accusé, lors de la consultation.
«Il a imposé une fellation à mon client comme à la plupart des autres victimes en évoquant la nécessité de manipuler la zone basse du bassin, et entendait ainsi soigner les verrues, les maux de dos, etc.», explique Pierre-Emmanuel Girard, l'avocat du jeune homme.
Placé en détention dans l'attente de son procès
Sur commission rogatoire, les enquêteurs vont entendre d'autres victimes, des hommes dont les plaintes avaient précédemment été classées sans suite.
Le paysan est alors placé sous contrôle judiciaire avec interdiction d'exercer toute activité de magnétiseur ou rebouteux.
Mais quand d'autres victimes se font connaître en 2021, il est accusé d'avoir poursuivi ses consultations et réitéré des actes sexuels, selon les informations recueillies par l'AFP. Il a depuis été placé en détention dans l'attente de son procès.
Dans l'incapacité de réagir
Parfois jeunes, les victimes ont pour point commun leur vulnérabilité liée à la maladie, à un handicap ou à leur âge.
Venues consulter pour des douleurs à la jambe, un eczéma, des problèmes intestinaux, toutes font état de leur «sidération» et de leur «surprise» face à celui qu'elles accusent. Elles disent avoir été dans l'incapacité de réagir.
«Quand vous faites cette démarche, il y a une part de confiance, un laisser-aller. Mais dans la conscience collective, l'approche est compliquée: ce sont des hommes, majeurs, et ils n'ont pas réagi», souligne Me Maud Vian, avocate de deux autres victimes.
Pour but de «débloquer»
Lors de ses différentes auditions, l'accusé a reconnu les faits, assurant que cette pratique avait pour but de «calmer les nerfs» ou de «débloquer».
Le septuagénaire qui dit n'avoir jamais eu de relation sentimentale, a toujours vécu avec ses parents et sa grande-mère maternelle, se retrouvant seul dans la ferme familiale après leur décès.
«Le procès fera la part des choses entre le bien qu'il a procuré à des centaines voire des milliers de personnes, et le mal qu'il a fait, selon d'autres personnes, qui étaient soignées sans perversion de sa part», a déclaré à l'AFP son avocat Me Patrick Roesch, qui n'a pas souhaité s'exprimer davantage.
Poursuivi pour trois viols et neuf agressions sexuelles, son client encourt 20 ans de réclusion criminelle.
Des livres et des commentaires élogieux
«Malgré cela, il bénéficie toujours d'une certaine aura, se voit conforté dans son art de guérison avec un court-métrage, des livres et des commentaires élogieux sur internet alors que mon client a toujours du mal à se reconstruire et que le procès va être une épreuve pour lui» déplore Me Girard.
Michel Boudon était également connu en France depuis que TF1 avait braqué ses caméras sur ce «paysan guérisseur». D’autres chaînes de TV s'étaient également intéressées.
L'avocat est persuadé que la liste des victimes pourrait s'allonger et que «certains n'ont pas parlé par sentiment de honte». Me Vian assure aussi que ses clients «sont très gênés à l'approche du procès, à l'idée d'en parler».