L'arrivée de Sarah Knafo, conseillère et compagne d'Eric Zemmour, sur la liste de Reconquête! pour les européennes doit relancer la campagne de Marion Maréchal, dont les détracteurs reprochent une forme de mansuétude pour ses anciens amis du Rassemblement national.
«Non, ça n'est pas +Tout va bien, madame la marquise+»: à quarante jours du scrutin européen, les cadres du parti d'Eric Zemmour ne font plus semblant de nier leurs «divergences» - selon eux en cours de résolution.
Deux ans après la quatrième place arrachée à la présidentielle de 2022 (7,07%) et six mois après la nomination de Marion Maréchal pour conduire leur liste, les zemmouristes peinent autant à se faire entendre qu'à sortir de la zone rouge des 5 à 6% d'intentions de votes, sur le fil du seuil pour envoyer des eurodéputés à Strasbourg.
En cause, selon l'entourage de l'ex-polémiste, le peu d'entrain dont Marion Maréchal - qui portait encore le nom Le Pen il y a quelques années - fait montre pour s'attaquer à son ancien parti, le Rassemblement national.
Proverbiale mésentente
Point d'orgue: une vidéo publiée mi-avril, dans laquelle la nièce de Marine Le Pen appelle son concurrent Jordan Bardella «à ne pas (se) taper dessus» mutuellement, en disant par ailleurs «aspirer» à «construire» une «coalition», sous-entendu avec lui, pour arriver au pouvoir en 2027.
«On a traversé un mois où l'on s'est un peu cherché sur la stratégie vis-à-vis du RN...», euphémisait encore en début de semaine un cadre du parti, constatant tout en ironie «qu'au moins, avec cette vidéo, on est allé au bout de la méthode douce».
L'heure est désormais au haussement de ton, incarné par l'arrivée de Sarah Knafo à la troisième place de la liste.
La pièce maîtresse de la campagne présidentielle de son compagnon a donné le ton dès sa première interview, en fin de semaine dernière dans Le Figaro, en qualifiant Jordan Bardella de «prestidigitateur» qui «fait croire que grâce à lui, Emmanuel Macron quittera le pouvoir le 10 juin au matin», au lendemain du scrutin.
Sauve-qui-peut? «Peut-être, mais en tout cas, on va être sauvé», applaudit un zemmouriste, alors que 45% des électeurs d'Eric Zemmour à la présidentielle ont l'intention de voter pour Jordan Bardella aux européennes, selon un sondage Ipsos publié lundi.
«Union des droites»
«Donc, maintenant, il faut réunir toutes les énergies», plaide le même. Finie, la mésentente proverbiale entre l'entourage d'Eric Zemmour et celui de Marion Maréchal: il s'agit désormais de louer «la force» du «duo» des deux personnalités. «Marion peut se revendiquer d'être l'héritière du FN alors qu'Eric est l'héritier du RPR de Pasqua et Séguin: c'est l'union des droites», sourit un cadre.
Illustration le 1er mai lors d'un déplacement de la petite-fille de Jean-Marie Le Pen dans le village natal de Jeanne d'Arc, Domrémy-la-Pucelle (Vosges), manière d'assumer une forme de continuité du Front national originel.
Pourtant, une fois de plus, Eric Zemmour n'était pas à ses côtés, préférant se rendre à une fête de village dans les Bouches-du-Rhône aux côtés du sénateur Reconquête Stéphane Ravier.
Et qu'importe si la dernière apparition publique des deux leaders côte-à-côte remonte au meeting de lancement de campagne, début mars à Paris, «le but est qu'ils se démultiplient», jure un cacique.
Les deux devraient toutefois se retrouver sur la même photo le 18 mai, à Madrid, à l'invitation du parti d'extrême droite espagnol Vox. La liste complète doit par ailleurs être annoncée le 6 mai, une semaine avant le programme.
Laurence Trochu, présidente du Mouvement conservateur (ex-Sens commun) a déjà annoncé qu'elle serait sur la liste en 5ème position, tout comme plusieurs figures de l'extrême droite, dont Jean Messiha, figure médiatique de l'extrême droite, en 8ème position.
«Marioniste»
Quid de Sarah Knafo ? Inconnue du grand public mais incontournable dans les milieux politique et médiatique, le jeune femme a déjà eu les honneurs d'une émission de télévision et doit tenir un meeting sur son propre nom lundi prochain. Celle qui se définit comme «marioniste» jure pourtant ne pas vouloir faire d'ombre à la tête de liste.
Mais Mme Maréchal a encore semblé frileuse, jeudi, à totalement embrasser la nouvelle doctrine anti-RN de sa campagne, en répétant sur TF1 que «demain, nous sommes capables de construire une coalition, notamment pourquoi pas avec le Rassemblement national».
Reste qu'à quarante jours du scrutin, Marion Maréchal comme Eric Zemmour n'ignorent pas qu'ils jouent leur survie politique. Et qu'un échec de la première obèrerait la capacité de l'ex-vedette de CNews à se présenter à nouveau à l'élection présidentielle de 2027.