«Massacre de Shakahola» Kenya: un influent pasteur a été remis en liberté

ATS

4.5.2023 - 17:31

Un tribunal a ordonné jeudi la remise en liberté sous caution de l'influent pasteur Ezekiel Odero. Il avait été arrêté la semaine dernière dans le cadre de l'enquête sur la mort de 109 personnes dans une forêt du sud-est du Kenya.

 Ajouter à la lightbox mise en page 565231735 (AE|RM)   PHOTOS DE LA SEMAINE GALERIE PHOTOS EUROPE ET AFRIQUE La police et les résidents locaux chargent les corps exhumés des victimes d'un culte religieux à l'arrière d'un camion dans le village de Shakahola, près de la ville côtière de Malindi, dans le sud du Kenya, le dimanche 23 avril 2023.
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Keystone-SDA

Les enquêteurs soupçonnent que certains adeptes de son Eglise de la Vie Nouvelle figurent parmi les victimes du «massacre de la forêt de Shakahola», une affaire qui secoue depuis plusieurs semaines ce pays religieux d'Afrique de l'Est.

Plus d'une centaine de corps, dont une majorité d'enfants, ont été retrouvés dans cette forêt de la côte kényane, où se réunissaient les adeptes d'une secte évangélique appelée Eglise Internationale de Bonne Nouvelle, dirigée par le pasteur Paul Nthenge Mackenzie.

Ce dernier, qui prônait de pratiquer un jeûne extrême pour «rencontrer Jésus», va être poursuivi pour «terrorisme» avec 17 autres personnes.

Libéré sous caution

Les procureurs avaient demandé vendredi le maintien en détention d'Ezekiel Odero pour une durée de 30 jours, afin que les enquêteurs puissent pousser leurs investigations. Ce télévangéliste célèbre et fortuné «est une personne influente à la tête de milliers de croyants» et «s'il est libéré, (il) est susceptible d'interférer avec les témoins», avaient-ils fait valoir. Les avocats d'Ezekiel Odero dénonçaient, eux, une détention sans «aucune preuve», ni «aucune plainte».

«En ne fournissant pas d'informations adéquates sur l'état de l'enquête (...), je suis convaincu que l'État n'a pas agi de bonne foi en cherchant à (le) maintenir en détention», a déclaré le juge Joe Omido, du tribunal de Mombasa.

Il a été libéré contre une caution de 1,5 million de shillings kényans (10'000 euros environ), avec obligation de se présenter à la police une fois par semaine et interdiction de s'exprimer sur l'affaire.

Asphyxie et strangulation

La décision a été accueillie par des cris et des chants de ses fidèles réunis à l'extérieur du bâtiment. Cette libération n'entraîne toutefois pas l'abandon des enquêtes qui le visent pour «meurtre», «aide au suicide», «enlèvement», «radicalisation, «crimes contre l'humanité», «cruauté envers des enfants» et «fraude et blanchiment d'argent», entre autres.

Les enquêteurs doivent terminer leurs investigations sur la possible présence de personnes mortes dans l'enceinte de l'Eglise de la Vie Nouvelle, un complexe de 26 hectares situé à Mavueni, près de la ville côtière de Malindi, dans la forêt de Shakahola.

Les procureurs ont évoqué de «nouvelles raisons impérieuses» de le maintenir en prison, après les premières autopsies de corps retrouvés à Shakahola.

Selon les résultats des examens médico-légaux menés sur 40 premiers corps, une majorité de victimes sont mortes par manque de nourriture, mais d'autres ont été asphyxiées ou étranglées. Un corps portait également une trace de coups avec un objet contondant.

Polémiques

Ce scandale a placé les autorités sous le feu des critiques pour ne pas avoir empêché les agissements du pasteur Mackenzie, pourtant arrêté à plusieurs reprises pour ses prêches extrêmes.

Le ministre de l'Intérieur, Kithure Kindiki, a annoncé la semaine dernière un vaste remaniement dans les services de sécurité de la région côtière avec le transfert des principaux responsables. Ce «massacre» a également ravivé le débat sur l'encadrement des cultes au Kenya, pays majoritairement chrétien qui compte 4000 «églises», selon des chiffres officiels.

Le président William Ruto est lui-même un fervent protestant «born again», soutenu par les milieux évangéliques lors de son élection en août 2022.

Peu après la révélation du «massacre de Shakahola», il a promis des mesures contre ceux qui «utilisent la religion pour faire avancer une idéologie louche et inacceptable», qu'il a comparés à des «terroristes». Un «groupe de travail présidentiel» sur le sujet doit être lancé dans les prochains jours, a annoncé lundi le ministre de l'Intérieur.

Les précédentes tentatives de réglementation des cultes se sont heurtées à une vive opposition, au nom notamment de la liberté de culte.