«Violent, alcoolique et jaloux» Procès d'un féminicide en France: les images glaçantes diffusées à l'audience

AFP

10.12.2024

«Je reconnais les faits de meurtre qu'on me reproche, je ne peux pas les nier parce qu'il y a des vidéos»: Liridon Berisa a reconnu d'emblée mardi le meurtre de sa compagne en 2021 à Hayange, au premier jour de son procès devant les assises de la Moselle, où ont justement été diffusées les images glaçantes de la vidéo-surveillance.

L'audience a été suspendue mardi soir et reprendra mercredi matin. Le verdict est attendu vendredi.
L'audience a été suspendue mardi soir et reprendra mercredi matin. Le verdict est attendu vendredi.
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L'homme de 26 ans, né au Kosovo, a tué sa compagne Stéphanie Di Vincenzo sous les yeux de leur fille, un meurtre particulièrement sordide qui avait généré une polémique autour du rôle joué par la justice et la police: Liridon Berisa avait en effet arraché son bracelet électronique la veille des faits, sans que cela ne déclenche la moindre alarme.

«Au début de mon incarcération, je n'y croyais pas. J'ai fini par accepter avec le temps le geste que j'ai fait. Je sais que j'ai pas fait un petit geste, que j'ai pu choquer des personnes, mais je ne suis pas un voyou», a déclaré mardi l'accusé, qui encourt la perpétuité.

Serge Ebel, psychologue, note que l'accusé a une «maigre tolérance à la frustration» et une «appétence pour les substances toxiques qui peuvent majorer ses dispositions caractérielles».

Une description qui ne plaît pas du tout à Liridon Berisa: «Ce monsieur essaye de me faire passer pour une personne malade, je suis pas un psychopathe, je suis un père de famille moi ! Si ça va pas je prends mes cliques et mes claques et je vous laisse débattre», menace-t-il.

Elle s'échappe, affaiblie et ensanglantée

Dans la nuit du 23 au 24 mai 2021, une violente altercation avait opposé Liridon Berisa à la victime à leur domicile de Hayange.

Stéphanie Di Vincenzo, 22 ans, s'échappe par la fenêtre, affaiblie et ensanglantée. Plusieurs témoins la voient courir en direction du poste de police, situé à 40 mètres du domicile. Mais le commissariat est fermé...

L'accusé la rattrape dans la rue et lui assène plusieurs coups de couteau, devant des voisins et sous les yeux de leur fille de 3 ans. Il jette ensuite dans une poubelle son arme longue de 25 centimètres et s'enfuit.

Dix interventions au domicile du couple

Dans l'après-midi, l'enregistrement glaçant de la caméra de vidéo-surveillance du commissariat de police d'Hayange, devant lequel une partie des faits s'est déroulée, a été projeté dans la salle d'audience.

On peut y voir Stéphanie Di Vincenzo tentant de repousser son agresseur mais recevant trois coups de l'accusé, muni d'une grande lame.

Questionné à l'audience sur la fermeture du commissariat de nuit, le directeur d'enquête répond que «n'importe quel citoyen dira que oui», un commissariat doit être ouvert 24 heures sur 24. «Si le commissariat avait été ouvert... Mais avec des si...»

Entre janvier 2018 et novembre 2020, les forces de l'ordre étaient intervenues dix fois au domicile du couple. Stéphanie Di Vincenzo souhaitait quitter son compagnon, décrit par des témoins comme «extrêmement violent, alcoolique et jaloux». Mme Di Vincenzo avait déposé plainte contre lui en novembre 2020, mais la plainte n'aurait pas été signalée au parquet.

Alors procureur de la République de Metz, Christian Mercuri avait réfuté, au lendemain du drame, tout «dysfonctionnement des services judiciaires», reconnaissant néanmoins que «dans un monde idéal», des plaintes déposées par la victime à l'encontre de son conjoint violent auraient dû être signalées au parquet.

«La brûler ou de la mettre sur le trottoir»

Une mission d'inspection lancée par plusieurs ministres n'avait relevé «aucun manquement» dans les décisions prises avant le meurtre. «L'attitude souvent déroutante de ce couple, aux confrontations suivies, parfois dans la foulée, de réconciliations, a pu conduire à une banalisation de cette situation par les services de police», était-il écrit.

Il est pourtant rappelé à l'audience mardi que Liridon Berisa, alors âgé de seulement 17 ans, avait déjà séquestré sa première petite amie, enlevée en Belgique, et qu'il menaçait de «la brûler ou de la mettre sur le trottoir». Ce qui lui avait valu une première peine de prison.

Réfugié politique, l'accusé avait par ailleurs été condamné à un an de prison pour divers délits routiers. Il avait bénéficié d'un aménagement de peine et été placé sous bracelet électronique quelques jours avant les faits. Un bracelet dont il s'était débarrassé la veille du meurtre.

Selon le rapport d'inspection, l'appareil avait souffert d'un «dysfonctionnement inexpliqué» dans la mesure où, bien qu'ayant été arraché, il n'avait déclenché «aucune alarme au centre de surveillance».

L'audience a été suspendue mardi soir et reprendra mercredi matin. Le verdict est attendu vendredi.