Syrie Renforts américains sur les sites pétroliers

ATS

25.10.2019 - 03:50

Les Etats-Unis ont annoncé jeudi l'envoi de renforts militaires pour protéger les champs pétroliers de l'est syrien. Sur le plan diplomatique, les membres de l'OTAN ont eu une «discussion musclée» sur l'attitude à adopter face à la Turquie.

Malgré le retrait américain du nord, les Forces démocratiques syriennes (FDS) – la coalition arabo-kurde sur laquelle Washington s'est appuyée dans la lutte contre le groupe Etat islamique (EI) – coopèrent encore avec les Etats-Unis dans la province de Deir Ezzor (est), non loin de la frontière irakienne, où se trouvent les plus grands champs pétroliers du pays. Quelque 200 soldats américains y sont encore postés.

«L'objectif est d'empêcher ces champs pétroliers de tomber entre les mains de l'EI ou d'autres groupes déstabilisateurs», a ajouté ce responsable ayant requis l'anonymat. «Nous devons interdire à l'EI cette source de revenus pour prévenir toute résurgence» du groupe djihadiste. Le président américain Donald Trump avait dit mercredi qu'un «petit nombre de soldats» américains resterait en Syrie, «dans les zones où il y a du pétrole». Il a précisé que le chef des FDS, Mazloum Abdi, l'avait remercié et s'était montré «extrêmement reconnaissant».

Les forces kurdes, dont les rêves d'autonomie ont été anéantis, ont quitté jeudi des positions tenues de longue date près de la frontière turque.

Patrouilles russes, menaces turques

L'armée russe continuait de son côté les patrouilles, en vertu d'un accord russo-turc conclu mardi, qui prévoit un retrait kurde et un contrôle commun d'une large partie de la frontière turco-syrienne.

Allié de Moscou, le régime syrien de Bachar al-Assad a également déployé ses troupes dans la zone. L'accord russo-turc permet à l'armée syrienne de reprendre un territoire où se trouvent des puits de pétrole et des zones agricoles fertiles.

C'est une offensive sanglante lancée le 9 octobre par la Turquie dans le nord syrien qui a poussé les forces kurdes à s'éloigner de sa frontière. L'assaut a été interrompu pour permettre aux YPG (Unités de protection du peuple, milice kurde) de se retirer de leurs positions frontalières.

L'accord turco-russe avait été précédé d'un accord entre Ankara et Washington prévoyant le retrait des YPG sur une zone de 120 km, respecté par les Kurdes. Les forces turques contrôlent désormais cette zone mais souhaitent le départ de cette milice sur l'ensemble des 440 km. M. Erdogan a menacé de prendre «toutes les mesures nécessaires» si l'accord de retrait des YPG n'était pas respecté. Il a aussi appelé les Etats-Unis à livrer Mazloum Abdi à son pays, le qualifiant de «terroriste».

«Discussion musclée» à Bruxelles

A Bruxelles, une réunion des ministres de la Défense de l'OTAN, dont la Turquie fait partie, a donné lieu à «une discussion musclée». Il n'est «pas question» pour l'Alliance de «perdre» un allié stratégique en l'humiliant avec une mise en accusation, selon un diplomate. Les Etats-Unis s'inquiètent de voir un «bon allié tourner sur l'orbite de la Russie plutôt que sur l'orbite de l'Otan», a dit le chef du Pentagone Mark Esper.

La ministre allemande a elle défendu son idée de créer, sous l'égide de l'ONU, une zone de protection internationale dans le nord de la Syrie. Cette initiative, accueillie avec scepticisme par la communauté internationale, a reçu le soutien du chef des FDS.

L'offensive d'Ankara a chassé quelque 300'000 civils kurdes qui ont désormais très peu de chances de pouvoir rentrer chez eux, selon l'OSDH. Les Kurdes, qui avaient établi une autonomie dans le nord et le nord-est de la Syrie à la faveur du conflit syrien, s'inquiètent d'un déplacement forcé de populations impliquant le retour d'une partie des 3,6 millions de réfugiés syriens ayant fui en Turquie.

Propos acrimonieux à l'ONU

Devant le conseil de sécurité de l'ONU, la Syrie et la Turquie ont échangé jeudi des propos acrimonieux lors de leur première confrontation. L'ambassadeur syrien à l'ONU, Bashar Ja'afari, a vivement dénoncé «l'agression» de la Turquie contre son pays, trouvant «étrange» l'utilisation par Ankara de l'article 51 de la Charte de l'ONU sur la légitime défense pour justifier son opération militaire.

«Je rejette et condamne fermement toute présentation erronée de notre opération de lutte contre le terrorisme comme un acte d'agression», a répliqué son homologue turc, Feridun Sinirlioglu. Il s'agissait d'une «opération limitée de lutte contre le terrorisme» qui visait notamment à «garantir l'intégrité territoriale et l'unité de la Syrie». «Elle n'a visé que des terroristes et leurs repaires, leurs armes et leurs véhicules», a-t-il insisté.

Appel à rapatrier les djihadistes

Il a d'autre part estimé que la «seule solution durable» pour les djihadistes étrangers et leur famille détenus en Syrie était qu'ils soient rapatriés par leur pays d'origine. «Priver des gens de leur nationalité n'est pas le bon moyen pour lutter contre le terrorisme». «Cela revient simplement à se laver les mains du problème», a-t-il jugé.

Feridun Sinirlioglu s'est enfin voulu rassurant sur le retour en Syrie de réfugiés accueillis en Turquie. Il s'effectuera de manière «volontaire, sûre et dans la dignité», a-t-il promis.

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