«Maître menteur» Un influent avocat jugé coupable du meurtre de sa femme et son fils

ATS

3.3.2023 - 01:33

Un influent avocat du sud des Etats-Unis, Alex Murdaugh, a été reconnu coupable jeudi du meurtre de sa femme et de son fils après un procès fleuve. Cette véritable chronique de la dérive d'un puissant a captivé tout le pays.

Après six semaines d'audiences, le sort de cet homme de 54 ans s'est décidé en moins de trois heures. «Les preuves de culpabilité sont accablantes», a commenté le juge Clifton Newman à la lecture du verdict.

Debout, Alex Murdaugh n'a laissé paraître aucune émotion, clignant seulement des yeux de façon répétée. Il encourt la réclusion à perpétuité et sera fixé sur sa peine vendredi matin.

«Maître menteur»

Cet homme roux au physique imposant était accusé d'avoir volé des sommes folles à son cabinet d'avocat, à ses amis et même au fils de sa femme de ménage, et d'avoir abattu ses proches pour éviter d'être démasqué. S'il a reconnu ces vols, destinés selon lui à nourrir une addiction coûteuse aux opiacés et à compenser de mauvais investissements, il n'a jamais admis le double meurtre.

«Alex Murdaugh a tenté un dernier coup pour éviter d'avoir à rendre des comptes, comme il l'avait fait toute sa vie, mais le jury n'a pas été dupe», s'est félicité le procureur Creighton Waters qui l'avait qualifié de «maître menteur» dans son réquisitoire.

«Cela prouve que quel que soit son pouvoir ou sa position sociale, personne n'est au-dessus de la loi», a ajouté le procureur général de l'Etat, Alan Wilson: «Le château de cartes d'Alex Murdaugh, construit sur des mensonges, des manipulations et des vols, s'est effondré».

Netflix

Selon l'accusation, Alex Murdaugh a abattu avec deux fusils distincts sa femme Maggie, 52 ans, et leur fils cadet Paul, 22 ans, le 7 juin 2021, près du chenil de leur immense propriété, baptisée Moselle, où les hommes aimaient chasser le cochon sauvage.

Les jurés s'y étaient rendus mercredi pour mieux comprendre l'agencement des lieux. C'était la première fois en un mois et demi que les caméras de télévision étaient tenues à l'écart des débats.

Car l'affaire a fasciné aux Etats-Unis, où tous les médias, y compris les plus sérieux, ont disséqué la vie de cette famille opulente, fière de ses trois générations de procureurs et juges locaux, ainsi que la déchéance du père. Plusieurs podcasts ont déjà été consacrés à l'affaire et un documentaire, «Murdaugh Murders: un scandale du Sud», figure dans les programmes les plus regardés sur Netflix, avec 40 millions d'heures visionnées dans le pays la semaine dernière.

Pendant tout le procès, les chaînes d'information ont retransmis en direct le défilé de collègues et d'amis floués, qui ont raconté comment Alex Murdaugh leur avait volé des millions de dollars pendant des années sans qu'ils ne s'en rendent compte. Mais son image avait fini par se fissurer, notamment après la mort d'une jeune fille dans un accident de bateau piloté par son fils Paul, quand les enquêteurs avaient commencé à s'intéresser à ses finances.

«Absurde»

«Toute l'illusion de sa vie allait s'effondrer, il ne pouvait pas le supporter», a assuré le procureur Waters. Pour lui, Alex Murdaugh a tué ses proches afin de s'acheter du temps, avant de tenter de mettre fin à ses jours dans une nouvelle arnaque: début septembre, il avait demandé à un complice de l'abattre pour que son fils survivant touche 10 millions de dollars d'assurance-vie. La balle l'avait juste effleuré.

A la barre, son avocat Jim Griffin a dénoncé une «théorie absurde», assuré qu'il «adorait» sa femme et son fils, et souligné l'absence d'ADN ou de traces de sang pour l'incriminer. Mais il a dû reconnaître un élément troublant: une vidéo filmée par Paul quelques minutes avant de mourir, dans lequel on entend la voix du père, alors qu'Alex Murdaugh avait toujours nié s'être rendu près du chenil ce soir-là.

La semaine dernière, dans un témoignage éprouvant, l'avocat déchu avait reconnu ce mensonge, l'attribuant à une paranoïa causée par sa dépendance à la drogue, tout en maintenant ne pas avoir commis le double meurtre. Quand il est confronté à la vérité, «il fait marche arrière, pivote et invente une nouvelle histoire», avait rétorqué le procureur.