«L'acte d'amour»Une jeune femme rejugée pour le meurtre de son grand-père
ATS
23.6.2025 - 16:59
Elle a tué son grand-père totalement grabataire en mettant le feu à son lit: le procès en appel d'une femme, condamnée à cinq ans de prison avec sursis en première instance, s'est ouvert lundi à Bourg-en-Bresse.
Selon son avocat, l'accusée "a fait face comme elle pouvait à une situation dramatique. On n'est pas du tout dans un militantisme de l'euthanasie" (image d'illustration).
ATS
Keystone-SDA
23.06.2025, 16:59
23.06.2025, 17:02
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En octobre, Emilie G., 33 ans, avait plaidé «l'acte d'amour», affirmant avoir agi pour abréger les souffrances du vieil homme de 95 ans qui, selon elle, réclamait de mourir. C'était un «acte cruel et égoïste», avait rétorqué l'avocat général, réclamant quinze ans de réclusion pour la jeune femme, accusée d'avoir agi «pour exorciser sa frustration, ses échecs multiples».
Les jurés ayant choisi la clémence, le parquet a fait appel du verdict, la renvoyant devant la cour d'assises de l'Ain, de lundi à mercredi, où elle risque la réclusion criminelle à perpétuité.
Entre-temps, le parlement a adopté en première lecture un projet de loi sur l'aide à mourir et la fin de vie, un sujet sensible qui devrait à nouveau affleurer dans les débats.
Pas de militantisme
«On l'a dit et on l'a toujours dit: on n'est absolument pas dans une position militante aujourd'hui», a déclaré avant l'audience son avocat Thibaud Claus. «Elle a fait face comme elle pouvait à une situation dramatique. On n'est pas du tout dans un militantisme de l'euthanasie.»
«Par contre, oui, force est de constater qu'on est effectivement dans un cas d'euthanasie d'une famille qui a fait comme elle pouvait face à une situation désespérée, avec pas forcément les bonnes solutions», a-t-il ajouté.
En août 2020, le nonagénaire avait été retrouvé mort brûlé et asphyxié dans son lit médicalisé chez une de ses filles, à Saint-Laurent-de-Mure (Rhône). Placée en garde à vue deux mois après l'incendie, Emilie G. avait reconnu avoir mis le feu à son lit.
«Etat dissociatif»
Lors de son premier procès, la jeune femme, qui souffre de troubles dépressifs, a expliqué avoir eu du mal à gérer en parallèle la prise en charge de son grand-père, l'éducation de ses enfants, ses problèmes de couple et ses multiples échecs au Capes, le concours professoral.
Très proche du vieil homme, dont elle s'occupait au quotidien, elle a témoigné du choc ressenti quand elle l'a vu équipé d'une sonde urinaire et de couches, dans un état lamentable, une première fois dans une résidence médicalisée, puis chez ses parents qui l'avaient récupéré.
Le matin du crime, son conjoint lui a révélé qu'il l'avait trompée, déclenchant le passage à l'acte. Selon l'expertise psychiatrique, elle était dans un «état dissociatif» «de nature à altérer son discernement» quand elle a versé de l'essence sur le matelas et a jeté une feuille de papier enflammée sur le lit.
Le grand-père, piégé, a agonisé pendant quelques minutes et est mort de l'inhalation des fumées et de brûlures profondes. «Est-il mort dignement?», s'était interrogé l'avocat général Romain Ducrocq en première instance.
«Fusionnel»
L'avocat de l'accusé a «bien conscience que le procureur avait sollicité une peine plus lourde et qu'aujourd'hui il souhaiterait une peine plus lourde».
Mais «je crois qu'on est tous d'accord dessus, même du côté du ministère public: le lien entre cette petite-fille et son grand-père est extrêmement fusionnel», a-t-il ajouté. Selon lui, le dossier a prouvé qu'il n'y avait «aucun antagonisme» entre les deux, «aucune dette, aucun héritage».
«C'est un peu caricatural à dire, j'entends que les mots peuvent choquer. Mais oui, c'est un geste d'amour parce qu'entre ces deux-là, il n'y avait que ça», a assuré l'avocat.