Urgence climatiqueCe qui doit changer pour limiter le réchauffement à +1,5°C
ATS
25.10.2021 - 07:44
La science est limpide: pour limiter le réchauffement à +1,5°C, il faut d'abord réduire les émissions de CO2 de moitié d'ici à 2030. Mais le chemin vers cet objectif est plus épineux, impliquant une myriade de choix radicaux pour transformer tous les secteurs de l'économie.
Keystone-SDA
25.10.2021, 07:44
25.10.2021, 08:29
ATS
Selon le rapport spécial des experts sur le climat de l'ONU (GIEC) de 2018, pour respecter l'objectif idéal de l'accord de Paris et ainsi ne pas dépasser +1,5°C par rapport à l'ère pré-industrielle, le monde doit réduire de 45% les émissions de CO2 d'ici à 2030, par rapport à 2010, et poursuivre ses efforts pour atteindre la neutralité carbone autour de 2050.
Qu'est-ce que cela veut dire pour l'économie et nos modes de vie? «Il faut juste tout transformer, de façon très radicale», répond à l'AFP Henri Waisman, un des auteurs de ce rapport. «Changer la façon dont on produit et on consomme l'énergie, la façon dont on produit les biens industriels clés, la façon dont on se déplace, dont on se chauffe, dont on se nourrit».
On commence par quoi ?
Pas le temps de faire une chose après l'autre, martèlent les experts. «Nous devons tout faire en même temps, et tout de suite», insiste Anne Ohloff, une des auteurs du rapport annuel de l'ONU-Environnement qui mesure l'écart entre les engagements des Etats et les baisses réelles d'émissions.
Energie, agriculture, construction, transports, industrie et forêts: selon l'ONU-Environnement, ces six secteurs présentent un potentiel qui permettraient ensemble de réduire les émissions de l'ensemble des gaz à effet de serre (CO2, méthane, N2O, le tout mesuré en équivalent CO2) à environ 25 gigatonnes en 2030, contre près de 60 par an au total aujourd'hui.
Malgré tout, s'il fallait commencer quelque part, la production d'énergie, secteur d'émissions majeures, en particulier l'électricité, semble un bon point d'entrée. «Parce que c'est le secteur avec le potentiel de réduction le plus important et parce que nous avons les technologies pour le faire. C'est surtout une question de volonté politique», estime Anne Ohloff.
Au coeur de cette transition, le charbon. «Les centrales à charbon, qui représentent 40% des émissions de la production électrique, doivent être éliminées d'ici à deux décennies», plaide Matthew Gidden, chercheur chez Climate Analytics.
Il faudrait donc abandonner toute nouvelle construction et fermer les installations existantes. Statistiquement, «cela veut dire fermer deux centrales toutes les trois semaines» dans l'UE d'ici à 2030 ou «une par semaine» en Chine d'ici à 2040, indique-t-il à l'AFP.
La feuille de route de l'agence internationale de l'énergie envisage elle la neutralité carbone du secteur électrique pour 2040, ce qui implique d'installer d'ici à 2030 quatre fois plus de capacités solaires et éoliennes qu'en 2020, année record.
Transports, agriculture, industrie
Mais une électricité verte ne suffit pas, expliquent les experts. Dans les transports, l'AIE plaide notamment pour la fin de la vente des voitures thermiques neuves en 2035.
Dans l'agriculture, c'est s'attaquer aux pesticides responsables d'émissions de protoxyde d'azote (N2O) et «modifier les régimes alimentaires, manger moins de viande», insiste Matthew Gidden, notamment de boeuf, les vaches générant d'importantes émissions de méthane.
Sans oublier la rénovation énergétique des logements, l'élaboration de nouveaux processus de production dans divers secteurs industriels comme l'acier et le béton. Et l'arrêt de la déforestation et la restauration des sols et forêts, puits de carbone naturels.
Des choix, une «vision»
«C'est une question de choix. Il n'y a aucun chemin pour lequel nous ne devons pas faire de choix», explique à l'AFP Joeri Rogelj, de l'Imperial College de Londres.
Ce sont des choix individuels, mais aussi de société sur la place du nucléaire, des bioénergies, sur la place des technologies d'absorption du carbone encore à inventer. Et il faut «un leadership et une vision», poursuit-il, insistant sur le rôle «essentiel» des gouvernements.
Et si certains ont peur des «sacrifices» que réclament ces changements radicaux, il tente de rassurer. «Oui, nous devrons changer certaines parties de nos vies, mais sans doute pour le mieux, des modes de vie plus sains, moins de pollution de l'air». Rien à voir avec le fardeau provoqué par la pandémie de Covid-19.