Birmanie Des élections «libres et équitables» seront organisées 

clsi

4.1.2023 - 12:48

La junte birmane a annoncé qu'elle organiserait des élections multipartites «libres et équitables», mercredi à l'occasion des célébrations du 75e anniversaire de l'indépendance du pays. Ce quelques jours après la condamnation de l'ex-dirigeante civile Aung San Suu Kyi à 33 ans de prison au total.

Un groupe d'artistes traditionnels du Myanmar se produit lors d'une cérémonie marquant le 75e anniversaire de la fête de l'indépendance à Naypyitaw, au Myanmar, le mercredi 4 janvier 2023.
Un groupe d'artistes traditionnels du Myanmar se produit lors d'une cérémonie marquant le 75e anniversaire de la fête de l'indépendance à Naypyitaw, au Myanmar, le mercredi 4 janvier 2023.
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La junte birmane, qui a récemment conclu une série de procès à huis clos contre Mme Suu Kyi, se prépare à de nouvelles élections prévues plus tard dans l'année, et qualifiées par avance d'«imposture» par les Etats-Unis. «Une fois (que) les prescriptions de l'état d'urgence (seront) accomplies, des élections libres et équitables seront organisées conformément à la constitution de 2008», a déclaré le chef de la junte Min Aung Hlaing aux soldats et soutiens réunis à Naypyidaw.

L'état d'urgence imposé par la junte doit expirer fin janvier. Selon la constitution, les autorités devront ensuite planifier l'organisation de nouvelles élections.

Le chef de la junte n'a pas donné de calendrier pour ces élections. Il a expliqué que la commission électorale mandatée par la junte rencontrait en ce moment des partis politiques pour discuter du «système électoral de représentation proportionnelle», sans autre précision.

Selon des experts, la junte pourrait abandonner le système uninominal majoritaire à un tour par lequel le parti d'Aung San Suu Kyi, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), avait remporté d'écrasantes majorités en 2015 et 2020.

En février 2021, l'armée avait renversé le gouvernement élu d'Aung San Suu Kyi. Elle avait justifié son coup d'Etat en assurant avoir découvert des millions de bulletins irréguliers lors du dernier vote, pourtant considéré comme globalement libre par des observateurs internationaux.

Démonstration de force

Mercredi à l'aube, des chars d'assaut, lance-missiles et véhicules blindés ont parcouru les rues de la capitale, donnant le coup d'envoi d'une parade militaire à l'occasion du 75e anniversaire de l'indépendance de la Birmanie, ont constaté des correspondants de l'AFP. Des fonctionnaires et des lycéens ont suivi les soldats, accompagnés par une fanfare militaire, et 750 colombes de la «paix» ont été lâchées pour marquer l'occasion, selon les médias d'Etat.

Plus tard dans la journée, la junte, qui amnistie régulièrement des prisonniers à l'occasion de jours fériés, a annoncé qu'elle libérerait 7012 prisonniers, sans préciser si cela incluait des personnes détenues dans le cadre de la répression contre la dissidence. Les personnes condamnées pour meurtre, viol ou encore pour terrorisme ne seront pas éligibles, a ajouté la junte, sans plus de précisions.

Des familles se sont ensuite rassemblées à l'extérieur de la prison Insein de Rangoun, espérant voir leurs proches être libérés, selon des médias locaux. Interrogé par l'AFP pour savoir si Aung San Suu Kyi, emprisonnée, serait désormais placée en résidence surveillée, le porte-parole de la junte Zaw Min Tun n'a pas répondu.

«Nous sommes toujours en train de recueillir des informations, et nous n'avons pas encore de détails sur le nombre de prisonniers politiques qui ont été libérés», a déclaré Bo Gyi, secrétaire adjoint de l'Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP), une organisation locale. Plus de 13'000 personnes arrêtées par la junte pour dissidence se trouvent toujours en détention, selon des chiffres publiés mardi par l'AAPP.

Protestation

Depuis le putsch de 2021, une grande partie de ce pays d'Asie du Sud-Est est en proie à des affrontements entre la junte et des milices locales qui ont pris les armes contre les militaires. Ancienne colonie britannique, la Birmanie a déclaré son indépendance le 4 janvier 1948 au terme d'une longue lutte conduite par le général Aung San, le père d'Aung San Suu Kyi.

Auparavant, la fête nationale birmane était marquée par de nombreux rassemblements festifs dans les parcs et les espaces publics du pays. Mais depuis le coup d'Etat militaire de 2021, les célébrations à l'occasion de jours fériés ont été largement réduites, les habitants restant chez eux en signe de protestation contre la junte.

Des correspondants de l'AFP ont constaté un renforcement de la sécurité à Rangoun, coeur commercial du pays et frappée par une série d'attentats à la bombe ces derniers mois.

Médailles décernées par la junte

En amont de cet anniversaire, la junte a décerné des centaines de prix et médailles à ses soutiens, notamment à Ashin Wirathu, un moine bouddhiste extrémiste connu pour son rôle dans l'incitation à la haine religieuse dans le pays, en particulier envers la minorité musulmane des Rohingyas.

Ashin Wirathu, surnommé par l'hebdomadaire américain Time «le Ben Laden bouddhiste» après des émeutes communautaires meurtrières, s'est vu décerner mardi le titre de «Thiri Pyanchi» en vertu de son «travail exceptionnel pour le bien de l'Union de Birmanie».

A l'occasion de ce jour anniversaire, le président russe Vladimir Poutine, proche allié et fournisseur d'armes de la junte militaire birmane, a adressé ses «salutations sincères» et prédit le «développement futur» des relations entre les deux pays, selon le journal d'Etat Global New Light of Myanmar.

Isolée du reste du monde, la junte birmane avait jugé «justifiée» l'invasion de l'Ukraine par Moscou. Deux avions Soukhoï Su-30 et deux MiG-29, de fabrication russe, ont effectué un survol dans le cadre du défilé de mercredi, selon les médias d'Etat.