Les Egyptiens ont commencé à élire leurs députés samedi. Ces législatives s'annoncent toutefois sans suspense tant la victoire du camp favorable au président Abdel Fattah al-Sissi, un ex-général au pouvoir depuis six ans, ne fait aucun doute.
Quelque 63 millions d'électeurs, sur une population de 101 millions, sont appelés à renouveler leur Parlement en élisant 568 députés sur un total de 596. Les 28 restants seront nommés par le président, dont la mainmise croissante sur la vie politique égyptienne s'est traduite par une mise au pas quasi totale de l'opposition.
Samedi matin, les bureaux de vote étaient décorés aux couleurs nationales et placés sous protection de la police et de l'armée. Compte tenu du nombre très limité de candidatures d'opposition, la victoire de la coalition progouvernementale menée par le parti «Mostakbal Watan» («Futur d'une nation») ne fait aucun doute.
Il s'agit du second scrutin de ce type depuis l'arrivée à la tête de l'Etat du général Abdel Fattah al-Sissi, devenu président en 2014. Le vote aura lieu en deux phases: la première couvrant 14 gouvernorats et la seconde, début novembre, les 13 restants. Les seconds tours auront lieu en novembre et décembre.
Contraventions ?
Les résultats définitifs seront dévoilés le 14 décembre et les nouveaux députés prendront leurs fonctions en janvier 2021, à la fin du mandat de l'actuel Parlement. Elue en 2015, la chambre basse est dominée à une écrasante majorité par des partisans de M. Sissi.
Le «bloc des 25/30» représentant l'opposition y est très minoritaire. Constitué d'hommes d'affaires influents et de personnalités publiques, «Mostakbal Watan» a vécu une consécration supplémentaire cette semaine avec la nomination de son chef, Abdelwahab Abdelrazek, à la tête du Sénat.
«Moi, je vais voter seulement parce que j'ai peur de recevoir une amende», a déclaré, une électrice, sous couvert d'anonymat. En août, lors des sénatoriales où le taux de participation n'avait pas dépassé 14%, les autorités avaient évoqué l'imposition d'une contravention de 500 livres égyptiennes (29 francs) aux abstentionnistes.
Il a aussi été question de traduire en justice les 54 millions d'électeurs qui n'avaient pas voté. Deux mesures hautement symboliques restées lettre morte jusqu'ici.
Législatif pas représentatif
Le rétablissement du Sénat, aboli après la chute de l'ancien président islamiste Mohamed Morsi, fait partie d'une réforme constitutionnelle approuvée par référendum en 2019 et très favorable à l'actuel président.
Cette dernière prévoit la possibilité pour M. Sissi de se maintenir au pouvoir jusqu'en 2030, renforce son contrôle sur le pouvoir judiciaire et permet à l'armée d'étendre davantage son influence sur l'économie.
Ahmed Seif, un autre électeur, regrette lui, la faible représentativité du Parlement. «Depuis que je suis né, je n'ai jamais vu quelqu'un me représenter (ndlr: à la chambre). Le Parlement est bien beau maintenant mais après les élections, on n'en entend plus parler», a-t-il affirmé.
A la sortie du scrutin, Azza Fathi, elle aussi, critique l'opacité du fonctionnement de la chambre. «On ne sait pas ce qui se passe au Parlement, car les sessions sont fermées (...). Cela donne l'impression qu'ils vivent dans leur propre monde et nous dans le nôtre», s'est-elle inquiétée.
Si l'opposition était faible sous la présidence de Hosni Moubarak – chassé du pouvoir en 2011 après un règne de près de 30 ans – elle avait encore son mot à dire au Parlement. Sous la présidence Sissi, l'Egypte a réduit au silence l'opposition islamiste comme libérale: les Frères musulmans, les militants de gauche, les journalistes et blogueurs.
Retour à la page d'accueil