Au moins quatre manifestants ont été tués lundi dans des émeutes anti-ONU à Beni, dans l'est de la République démocratique du Congo. Les autorités ont annoncé des opérations militaires «conjointes» avec les Casques bleus face aux massacres de civils.
Des émeutiers ont attaqué un camp des Nations unies pour dénoncer leur «inaction» après le massacre de près de 80 civils en un mois, attribué à un groupe armé. «Il y a eu quatre morts dans la journée, dix blessés, tous des civils, ainsi que trois militaires Fardc (de l'armée congolaise)«, a déclaré l'auditeur (procureur) militaire, Kumbu Ngoma.
Des «enquêtes» vont déterminer l'origine des tirs, a ajouté le représentant du parquet militaire, qui évoque la possibilité d'un cinquième mort. Des Casques bleus ont procédé à des «tirs de sommation en l'air», mais «aucun n'a été dirigé vers les manifestants», selon la Mission des Nations unies au Congo (Monusco).
Les forces de sécurité congolaises (armée et police) ont également procédé à des tirs, selon le correspondant de l'AFP sur place. Un couvre-feu a été décrété jusqu'à nouvel ordre par les autorités provinciales du Nord-Kivu entre 18h00 et 06g00 à Beni et ses environs.
Opérations militaires «conjointes»
Un bureau de la Monusco a été envahi et partiellement incendié. «Des maisons du personnel des Nations unies ont été attaquées et vandalisées», a indiqué une porte-parole de la Monusco jointe par l'AFP. Des hélicoptères de l'ONU ont survolé les lieux et les personnels de la Monusco ont été «relocalisés» vers la grande base militaire de l'ONU près de l'aéroport de Mavivi proche.
A Kinshasa, la présidence de la République a annoncé la reprise d'opérations militaires «conjointes» avec la Monusco, à l'issue d'un «conseil de sécurité» national présidé par le chef de l'Etat Félix Tshisekedi, en présence de la cheffe de la Monusco Leïla Zerrougui. La présidence a également annoncé «l'installation d'un quartier général avancé des forces armées à Beni».
«La Mission va renforcer la coopération avec ses partenaires», a simplement annoncé la Monusco à l'issue de la rencontre.
Les soldats «restent dans leur base»
En visite à Paris, la présidente de l'Assemblée nationale congolaise, Jeanine Mabunda, s'est publiquement interrogée sur le rôle de l'ONU dans son pays, jugeant «légitime que les populations se demandent pourquoi cette force persiste en RDC». Avant de s'attaquer à l'ONU à Beni,des manifestants avaient incendié la mairie dans cette ville, qui a été partiellement détruite, selon le correspondant de l'AFP.
Les émeutes à Beni ont éclaté après le massacre dans la nuit de huit civils dans une nouvelle attaque attribuée au groupe des Forces démocratiques alliées (ADF), ont indiqué plusieurs sources. Au total 77 civils ont été tués depuis le 5 novembre à Beni et ses environs, dans le Nord-Kivu, selon le décompte du Groupe d'Etude du Congo (GEC) de l'Université de New York.
Dans un communiqué, Amnesty international a jugé «scandaleux que des civils meurent chaque jour, alors que la police locale et les soldats du maintien de la paix de l'ONU restent dans leur base». Les massacres des ADF sont selon les experts des représailles aux opérations militaires annoncées contre leurs bases le 30 octobre par l'armée congolaise.
Les manifestants accusent les Nations unies d'«inaction» face aux massacres des ADF. La Monusco se défendait en soulignant que l'armée congolaise a lancé ses opérations de manière unilatérale.