Fin du suspenseEmmanuel Macron lève le voile sur son nouveau Premier ministre
ATS
13.12.2024
Le nouveau Premier ministre, le centriste François Bayrou, a souhaité la «réconciliation» des Français après sa nomination vendredi, mais fait face au défi de dénouer la crise politique dans laquelle se débat le pays depuis la dissolution de l'Assemblée en juin.
ATS
13.12.2024, 12:44
13.12.2024, 16:39
Gregoire Galley
«Il y a un chemin à trouver qui réunisse les gens au lieu de les diviser. Je pense que la réconciliation est nécessaire», a brièvement déclaré aux journalistes le nouveau chef du gouvernement qui devrait en dire davantage lors de la passation de pouvoirs prévue à 17h00.
La nomination de M. Bayrou, vétéran de la politique française âgé de 73 ans et allié historique du président Emmanuel Macron, intervient neuf jours après la chute du gouvernement de Michel Barnier, renversé le 4 décembre par une censure historique votée par des députés de gauche et d'extrême droite.
M. Bayrou devient ainsi le sixième locataire de Matignon depuis la première élection d'Emmanuel Macron en 2017 - et le quatrième en 2024, une instabilité de l'exécutif que n'avait pas connue la France depuis des décennies.
A la tête d'un «gouvernement d'intérêt général», «resserré», voulu par M. Macron, il va être confronté à une tâche immense, avec pour priorité un budget 2025 toujours non voté, alors que la France a une dette abyssale.
Dans un contexte de colère des agriculteurs et de multiplication des plans sociaux, les niveaux des déficits et de la dette seront «une réalité qui s'imposera à tout gouvernement, quel qu'il soit», avait prévenu Michel Barnier avant d'être renversé.
En attendant que le nouveau budget soit adopté, un projet consensuel de «loi spéciale» permettant d'assurer la continuité du fonctionnement de l'Etat sera examinée lundi par l'Assemblée.
Le nouveau Premier ministre devra aussi naviguer sur la scène politique éclatée issue des législatives anticipées organisées après la dissolution surprise de l'Assemblée par M. Macron. Le scrutin a débouché sur un hémicycle fracturé en trois blocs (alliance de gauche / macronistes et centristes / extrême droite), aucun ne disposant de la majorité absolue.
M. Bayrou doit «dialoguer» avec les partis hors Rassemblement national (extrême droite) et LFI (gauche radicale) pour «trouver les conditions de la stabilité et de l'action», a fait savoir l'entourage de M. Macron.
S'il n'y aura pas de censure «a priori» venant du RN, selon son président Jordan Bardella, LFI a à l'inverse affirmé qu'il voterait la censure de M. Bayrou car celui-ci n'est pas issu de la gauche.
Les Républicains (LR, droite), ont eux conditionné leur participation au gouvernement à sa feuille de route.
A gauche, pour prix de leur non-censure, les socialistes demandent à M. Bayrou de s'engager à renoncer à recourir au 49.3 - un article de la Constitution qui permet d'adopter un texte sans vote - et à procéder à une «réorientation de la politique gouvernementale». Les communistes ont exprimé une position voisine.
Les Ecologistes eux ont déjà menacé de censure le nouveau Premier ministre s'il poursuit la même politique et garde Bruno Retailleau au poste de ministre de l'Intérieur, qu'ils jugent trop à droite.
«Coopération démocratique»
M. Bayrou veut trouver, selon sa formule, les contours d'un «accord de coopération démocratique» : le gouvernement s'engagerait à ne pas recourir au 49.3 pour imposer ses lois, et les opposants de leur côté ne le censureraient pas.
Le centriste a finalement été préféré à d'autres noms qui ont circulé jusqu'au bout, comme celui de l'ex-Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve, des ministres de l'aile droite de la macronie Sébastien Lecornu ou Catherine Vautrin.
Inlassable défenseur d'un centre indépendant, François Bayrou a été trois fois candidat à la présidentielle de 2002 à 2012, sans jamais parvenir au second tour. Son alliance avec M. Macron en 2017 avait dégagé la voie à l'élection du plus jeune président français.
Nommé alors ministre de la Justice, il n'est resté en fonctions que 34 jours, empêché par une affaire de détournement de fonds européens pour payer des assistants parlementaires de son parti, le MoDem. La justice, en février, a lourdement condamné le Modem, mais a relaxé M. Bayrou. Le parquet a fait appel.
Depuis 2017, M. Bayrou, qui est maire de Pau, dans le sud-ouest, a régulièrement distillé des critiques contre la politique - trop à droite - et la pratique du pouvoir - trop personnelle - de son allié, sans jamais se départir de sa solidarité.
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