Droits humains Encore des crimes internationaux au Burundi

ATS

17.9.2020 - 12:43

De nouveaux crimes internationaux ont été observés dans le récent contexte électoral au Burundi (archives).
De nouveaux crimes internationaux ont été observés dans le récent contexte électoral au Burundi (archives).
Source: KEYSTONE/AP/BERTHIER MUGIRANEZA

L'arrivée d'Evariste Ndayishimiye à la présidence du Burundi est «préoccupante et alarmante» pour les droits de l'homme. La Commission d'enquête indépendante de l'ONU sur ce pays a ciblé jeudi à Genève de possibles crimes contre l'humanité dans le contexte électoral.

Elle a observé «peu de changements positifs depuis l'entrée en fonction du président Ndayishimiye», affirme le chef des trois enquêteurs Doudou Diène. Et les libertés restent restreintes, l'impunité subsiste et aucune indication ne laisse penser que les violations des droits de l'homme aient diminué, selon lui. Celles-ci «ont continué alors que les élections sont terminées», a déploré une membre de la Commission, Françoise Hampson.

Certaines personnes ciblées par des sanctions internationales pour leur responsabilité présumée dans les crimes perpétrés dans le contexte de la précédente présidentielle ont été désignées à des fonctions importantes. Aucune avancée contre l'impunité n'a été atteinte, a dit à la presse M. Diène, qui relève que de nombreux militaires ont reçu un certain nombre de mandats. Les victimes redoutent toujours des représailles, a renchéri une autre membre de la Commission Lucy Asuagbor.

Exécutions, détentions ou encore torture

Dans son rapport établi après plusieurs centaines de témoignages, la Commission d'enquête internationale relève des actes qui équivalent à des crimes contre l'humanité en lien avec les récents scrutins généraux. Des exécutions sommaires, des détentions et arrestations arbitraires, des tortures et des violences sexuelles ont été observées.

Les responsables ont voulu empêcher le principal parti d'opposition d'obtenir des sièges parlementaires, selon les enquêteurs. Outre les membres de celui-ci, des représentants de la société civile et la population ont été contrôlés.

Les jeunes ont été parfois largement ciblés, notamment lorsqu'ils étaient contraints de rejoindre les milices des jeunes du parti au pouvoir. Les huit facteurs établis par l'ONU pour les atrocités criminelles sont toujours présents après les élections, déplore la Commission. Notamment en raison de cette milice de jeunes et des forces de sécurité qui restent toutes les deux les premiers responsables des violations des droits de l'homme.

Appel aux acteurs économiques

Les enquêteurs ont aussi observé de nombreuses malversations économiques. Les effets sur les droits de l'homme sont larges alors que 74% de la population fait face à une importante pauvreté. La corruption «semble si répandue que chaque organisation, entreprise ou individu apportant des fonds au Burundi devrait faire preuve d’une extrême prudence», dit Mme Hampson.

M. Diène affirme pour autant que l'arrivée du nouveau président, même si le gouvernement ne collabore pas avec la Commission, doit pouvoir être accompagnée d'un réengagement avec l'ONU et la communauté internationale et d'une amélioration des droits de l'homme. Ces dernières années, le bureau du Haut-Commissariat aux droits de l'homme a été fermé et une expulsion du représentant de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) avait été décidée, même si celui-ci a été convié depuis à revenir.

«C'est le moment de donner des signaux d'ouverture pour relancer le dialogue avec le Burundi sur les droits de l'homme», avait aussi récemment dit à Keystone-ATS le nouvel ambassadeur suisse à l'ONU à Genève Jürg Lauber. «Il faut soulever les problèmes mais aussi adopter une approche plus collaborative», avait ajouté celui qui a présidé ces dernières années le mécanisme sur ce pays dans la Commission de consolidation de la paix de l'ONU.

M. Diène appelle lui Evariste Ndayishimiye à des actions concrètes. Il ne serait pas difficile de «mettre un terme» aux activités des milices de jeunes, estime aussi Mme Hampson. De son côté, Mme Asuagbor demande une «volonté politique». Sans changement, «la communauté internationale se doit de continuer à être fortement préoccupée», disent ces spécialistes.

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