Fini les files d'attente aux péages L'autoroute de Normandie adopte le «flux libre»

Elles rythmaient la circulation sur l'A13 entre Paris et la Normandie depuis plus de 60 ans: les cinq barrières de péage de cet axe très fréquenté ont disparu dans la nuit de lundi à mardi pour laisser la place au «flux libre»... qui n'est pas synonyme de gratuité.

«Autoroute en flux libre, payez votre péage sur Sanef.com». De grandes banderoles jaunes parfois traduites en anglais sont tirées sur les ponts enjambant l'autoroute de Normandie.

A Buchelay, à l'ouest de Paris, l'énorme barrière de péage devant laquelle les files de voitures s'étiraient, notamment lors des longs week-ends du printemps, peut désormais être franchie sans ralentir, ou presque.

Deux fois trois voies permettent de la contourner par la droite dans les deux sens, alors que des ouvriers sont affairés à accrocher une de ces fameuses banderoles invitant les automobilistes à payer en ligne. D'ici deux ans, le temps de la démonter, la barrière aura totalement disparu, comme toutes les autres de l'A13.

«C'est quand même la plus grosse révolution de l'autoroute A13, voire de l'autoroute en France, depuis que ça existe», s'enthousiasme Arnaud Quémard, le directeur général de la Sanef, le concessionnaire de cette portion d'autoroute.

30 minutes en moins

Ce n'est pas le premier axe à basculer en flux libre: l'A79 dans l'Allier a déjà sauté le pas et l'A14, qui relie le quartier d'affaires de La Défense à Poissy à l'ouest de Paris aussi, en juin dernier.

Mais c'est la première fois qu'une autoroute aussi importante, avec huit millions de clients annuels, adopte ce modèle.

L'A13 – qui prolonge l'A14 – relie sur 210 km la région parisienne à Caen en passant par Rouen. Elle est aussi bien empruntée par des travailleurs du quotidien que des occasionnels souhaitant s'échapper de la capitale le week-end.

Le passage en flux libre, va permettre de gagner 30 minutes sur le trajet entre Paris et Caen lorsque la circulation est dense, assure M. Quémard. En l'absence de barrières de péage, les plaques d'immatriculation sont scannées par des caméras installées sur une trentaine de portiques tout au long de l'autoroute.

«On considère que c'est l'équivalent de 30.000 tonnes de CO2 qui vont être économisées chaque année. Et en carburant, c'est l'équivalent de la consommation annuelle de 11.000 véhicules», poursuit le patron de la Sanef.

L'association «40 millions d'automobilistes» a salué la mise en service du péage en flux libre sur cette autoroute, qui sera bénéfique «notamment en terme de fluidification du trafic». Pour autant, certains craignent déjà d'être surfacturés en cas d'oubli.

La Sanef assure avoir déployé 200 panneaux, quasiment un tous les kilomètres, pour rappeler aux automobilistes de régler la note.

Retard français

Pour cela trois moyens: le télépéage pour ceux qui en sont équipés, se rendre sur le site de la Sanef – où on peut opter pour un prélèvement automatique en associant sa carte bleue à sa plaque d'immatriculation – ou bien chez un buraliste.

Les clients ont 72 heures pour payer la facture. Au-delà, une contravention peut être appliquée allant de 10 euros pendant les 15 premiers jours à 90 euros jusqu'à 60 jours de retard. Ensuite, l'amende monte à 375 euros.

D'après Arnaud Quémard, sur l'A14 – également gérée par la Sanef –, «la très très grande majorité ont réglé dans les délais» depuis le mois de juin, sans préciser la proportion exacte d'automobilistes sanctionnés.

Le passage en flux libre sur l'A13 et l'A14 va coûter à la Sanef 120 millions d'euros. L'opération est neutre économiquement car si l'opérateur économise sur les frais d'exploitation – éclairage des barrières de péage la nuit, maintenance des équipements –, il a dû recruter 150 personnes «pour la relation client».

La France accuse du retard sur le flux libre, même si toutes les nouvelles autoroutes – des projets devenus rares si l'on excepte la controversée A69 – doivent en être équipées.

A l'étranger en revanche, ces systèmes sont communs au Portugal, au Royaume-Uni, en Irlande et surtout aux Etats-Unis où «la plupart des autoroutes sont en flux libre», d'après M. Quémard.