Bande de GazaIsraël en deuil après la mort de trois otages tués «par erreur»
ATS
16.12.2023 - 11:12
Israël est en deuil samedi après la mort de trois otages tués «par erreur» par ses soldats dans la bande de Gaza assiégée où l'armée israélienne en guerre contre le mouvement islamiste palestinien Hamas multiplie les raids aériens.
Keystone-SDA
16.12.2023, 11:12
16.12.2023, 11:34
ATS
Les victimes, Yotam Haïm, 28 ans, Samer al-Talalqa, 25 ans et Alon Lulu Shamriz, 26 ans, ont été tués au cours d'opérations dans un quartier de la ville de Gaza, selon l'armée.
Tous trois faisaient partie des quelque 250 personnes prises en otage lors de l'attaque sans précédent lancée le 7 octobre par le Hamas sur le sol israélien, qui a fait environ 1200 morts, en majorité des civils, selon les autorités. A ce jour, 129 otages sont toujours retenus à Gaza.
En représailles, Israël a promis de «détruire» le Hamas et bombarde sans relâche la bande de Gaza. L'armée mène depuis le 27 octobre une offensive terrestre contre le Hamas à présent étendue à tout le territoire, y compris au sud où se sont massés des centaines de milliers de civils déplacés par la guerre.
Selon un dernier bilan du ministère de la Santé du Hamas, au pouvoir à Gaza, 18'800 personnes, à 70% des femmes, des enfants et adolescents, ont été tuées par les bombardements israéliens.
Peu après l'annonce de l'armée israélienne, des familles d'otages et des sympathisants ont défilé avec des photos de captifs devant le ministère israélien de la Défense à Tel-Aviv pour demander un accord immédiat en vue de leur libération.
Seconde trêve?
«Chaque jour, un otage meurt», pouvait-on lire sur une affiche alors qu'un drapeau israélien placé dans la rue a été aspergé de peinture rouge évoquant du sang.
«Le seul moyen de libérer les otages vivants est la négociation», a déclaré sur place Motti Direktor, un manifestant de 66 ans. «Nous sommes ici après une soirée bouleversante, et je meurs de peur. Nous exigeons un accord maintenant», a déclaré Merav Svirsky, dont le frère Itay est otage à Gaza.
Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a, dès l'annonce de l'armée, regretté «une insupportable tragédie» qui plonge «tout l'Etat d'Israël dans le deuil», tandis qu'à Washington la Maison Blanche évoquait une «erreur tragique».
«Des leçons immédiates ont été tirées de cet événement, qui ont été transmises à toutes les troupes sur le terrain», a indiqué l'armée dans un communiqué publié vendredi soir.
Un accord de trêve obtenu grâce à une médiation du Qatar avait permis fin novembre une pause d'une semaine dans les combats, la libération d'une centaine d'otages détenus par le Hamas et de 240 prisonniers palestiniens écroués en Israël, ainsi que l'acheminement d'une aide humanitaire d'urgence.
Après l'annonce de la mort des trois otages, le site Axios a indiqué que David Barnea, le chef du Mossad, les services secrets extérieurs israéliens, doit rencontrer dans le week-end le Premier ministre qatari, Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani.
La rencontre est prévue en Europe et doit porter sur une seconde phase de trêve, afin de permettre la libération d'otages, poursuit Axios sans préciser le lieu de cette rencontre ni le nombre d'otages qui pourraient être ainsi libérés.
Entrée «temporaire» de l'aide
Après plus de deux mois de guerre et un siège total imposé par Israël depuis le 9 octobre, les conditions de vie sur le petit territoire surpeuplé sont décrites comme cauchemardesques par l'ONU et les ONG pour les civils palestiniens acculés dans des zones toujours plus petites.
Quelque 1,9 million d'habitants, soit 85% de sa population, ont été déplacés, selon l'ONU, dont beaucoup ont dû fuir plusieurs fois face aux bombardements et combats qui s'étendaient.
Tôt samedi, le Hamas a fait état de «combats acharnés» dans le secteur de Jabaliya (nord), de frappes aériennes et de tirs d'artillerie intenses à Khan Younès, nouvel épicentre des combats dans le sud du territoire.
Israël continue par ailleurs à être visé par des roquettes lancées depuis la bande de Gaza. Des journalistes de l'AFP en ont vu vendredi soir plusieurs d'entre elles être interceptées au-dessus de Jérusalem, peu de temps après le déclenchement des sirènes d'alerte, qui n'avaient pas retenti sur la ville depuis fin octobre.
Face aux pressions internationales, notamment de son allié américain, Israël a autorisé vendredi l'ouverture «temporaire» d'un nouveau point d'entrée pour l'aide humanitaire dans la bande de Gaza via le terminal de Kerem Shalom.
Cette décision vise à décongestionner celui de Rafah, unique point d'entrée de vivres et de médicaments, alors qu'Israël resserre l'inspection des camions acheminant de l'aide. C'est actuellement l'unique point d'entrée des camions de vivres et médicaments dans l'étroite bande de terre, et à un rythme très inférieur à celui d'avant la guerre.
Journaliste tué
Les journalistes à Gaza continuent par ailleurs de payer un très lourd tribut: un journaliste d'Al Jazeera a été tué vendredi. Le chef de bureau d'Al Jazeera à Gaza, Waël Dahdouh, qui avait perdu son épouse et deux de ses enfants au début de la guerre, a lui été blessé au bras par des éclats d'obus et transféré dans un hôpital de Khan Younès.
«Hier, il est venu nous dire au revoir (...) Il n'a rien mangé. Il est mort le ventre vide», a dit samedi à l'AFPTV, la voix brisée par l'émotion, la mère de Sameer Abou Daqa, le journaliste d'Al Jazeera qui a été enterré à Khan Younès.
Accompagnant sa dépouille, enveloppée dans un linceul, un gilet pare-balles «Presse» et un casque de protection.
Plus de 60 journalistes et employés de médias sont morts depuis le début de la guerre, selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
Un journaliste de l'agence de presse turque Anadolu a lui aussi été blessé à Jérusalem-est, annexée et occupée par Israël. Dans des images récupérées par l'AFP, on voit ce photographe, Mustafa Alkharuf, d'abord frappé au visage puis roué de coups de pieds.
Un porte-parole de la police israélienne a précisé que les officiers observés dans la vidéo avaient fait l'objet d'une «suspension opérationnelle immédiate».
De passage en Israël jeudi et vendredi, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, Jake Sullivan a demandé aux responsables israéliens de passer à court terme à une phase de «plus faible intensité».
Dans un signe de crispation inédit face à l'ampleur des pertes palestiniennes, le président américain Joe Biden avait d'ailleurs dénoncé des bombardements «aveugles», prévenant son allié israélien qu'il risquait de perdre son soutien international.
La cheffe de la diplomatie française Catherine Colonna est attendue samedi au Liban et dimanche en Israël pour tenter d'éviter un embrasement régional à l'heure de tensions croissantes à la frontière libano-israélienne et en mer Rouge où les rebelles yéménites Houthis, proches du Hamas, menacent le trafic maritime.