FranceIVG dans la Constitution: un vote crucial au Sénat
ATS
28.2.2024 - 09:34
Suspense à la chambre haute du Parlement français: l'inscription de l'IVG dans la Constitution se heurte mercredi aux réticences de la droite lors d'un vote indécis au Sénat. Certains élus pourraient tenter de freiner la réforme à défaut d'être suffisamment nombreux pour la rejeter.
Keystone-SDA
28.02.2024, 09:34
ATS
Les débats s'annoncent tendus à partir de 16h30. D'un côté, le gouvernement soutenu par la gauche en faveur de cette révision promise par le président Emmanuel Macron. De l'autre, une partie de la droite et des centristes encore sceptiques devant la formulation retenue par l'exécutif.
«La loi détermine les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté garantie à la femme d'avoir recours à une interruption volontaire de grossesse». Le texte soumis au vote des 348 sénateurs peine à convaincre les rangs de la majorité sénatoriale, une alliance entre Les Républicains (LR) et le groupe centriste.
Procédure complexe
Pourtant, un vote favorable, et sans modification, de la chambre haute est un préalable à la révision constitutionnelle soutenue par 86% des Français, selon un sondage publié en novembre 2022.
Modifier le texte suprême n'est pas simple: l'Assemblée nationale et le Sénat doivent valider la réforme à l'identique, avant la réunion d'un Congrès du Parlement à Versailles où une majorité des trois cinquièmes sera requise.
Après l'Assemblée nationale, quasiment unanime fin janvier, le vote du Sénat est l'étape la plus périlleuse du processus: les trois chefs de la majorité sénatoriale – le président du Sénat Gérard Larcher, le président du groupe LR Bruno Retailleau et celui du groupe centriste Hervé Marseille – sont opposés à la réforme.
«Il n'y a pas de menace qui pèse sur l'avortement en France», note M. Retailleau. «Le gouvernement ne peut pas nous imposer un calendrier au mépris du débat parlementaire», reprend-il, encore échaudé par l'agenda avancé fin 2023 par M. Macron.
Congrès en suspens
Le chef de l'Etat avait envisagé de réunir le Congrès le 4 mars, ce qui impliquait un vote du Sénat sans modification rédactionnelle... Rien de pire pour froisser la droite sénatoriale. Depuis, l'exécutif reste muet sur l'agenda, même si une source gouvernementale confirme que le 4 mars est toujours un «scénario privilégié».
«Nous prendrons le temps qu'il faut», répète à l'envi le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, assurant que la France deviendrait «le premier pays au monde à protéger (constitutionnellement) la liberté des femmes à disposer de leur corps», alors que celle-ci est remise en cause aux Etats-Unis ou dans certains pays d'Europe.
Les associations de défense des droits des femmes comme les collectifs d'opposition à l'IVG ont multiplié les initiatives ces derniers jours pour convaincre les sénateurs. Plusieurs rassemblements pro et anti-constitutionnalisation sont annoncés aux abords du Sénat dans l'après-midi.
A droite, la pression sociale ou familiale a fait basculer certains votes: en privé, plusieurs sénateurs reconnaissent qu'ils ont changé d'avis et ne s'opposeront pas à la réforme, laissant entrevoir une nette majorité en faveur de l'inscription de l'IVG dans la Constitution.
Amendements
La question est surtout de savoir si le texte sera modifié, ce qui obligerait l'Assemblée nationale à s'en saisir à nouveau et repousserait le calendrier de la réforme. «Il n'y a pas d'opposition pour la constitutionnalisation, à condition que ce soit fait proprement», résume la rapporteure Agnès Canayer (LR). Cette dernière s'interroge sur la notion de «liberté garantie».
Un amendement de suppression du mot «garantie», au profit d'une simple «liberté», est ainsi défendu par une partie de la droite et des centristes... Cette rédaction avait déjà été approuvée par le Sénat en février 2023. «Le seul objectif: faire échouer le texte», a dénoncé l'écologiste Mélanie Vogel, déterminée comme toute la gauche à obtenir une adoption sans modification.
Une trentaine de sénateurs LR portent, par ailleurs, un autre amendement pour inscrire dans la Constitution la clause de conscience des médecins, non tenus de pratiquer l'IVG s'ils ne le souhaitent pas. Parviendront-ils à réunir une majorité? «J'ai des doutes», reconnaît un élu LR. De quoi relancer le suspense.