«Un territoire occupé»L'AIEA en route vers la centrale de Zaporijjia
ATS
31.8.2022 - 16:35
Une mission de l'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA) est arrivée mercredi à Zaporijjia, en zone de guerre dans le sud-est de l'Ukraine, en route vers la centrale atomique où les bombardements font craindre depuis des semaines un accident nucléaire.
31.08.2022, 16:35
31.08.2022, 16:45
ATS
Le convoi comptant une vingtaine de voitures, dont la moitié avec inscrit «UN» (Onu), et une ambulance, est entré dans la ville, située à environ 50 kilomètres à vol d'oiseau de la centrale, mercredi en début d'après-midi, selon les journalistes de l'AFP sur place.
«C'est une mission qui cherche à éviter un accident nucléaire et à préserver cette importante centrale nucléaire, la plus grande d'Europe», a dit le directeur général de l'AIEA Rafaelo Grossi, à la tête de la mission.
La mission, qui a été reçue par le président ukrainien Volodymyr Zelensky la veille à Kiev, a quitté la capitale tôt mercredi matin.
Selon l'agence russe TASS, citant un responsable prorusse, la délégation de 14 personnes doit arriver à la centrale jeudi.
«Nous avons une tâche très, très importante à accomplir là-bas, pour évaluer la situation réelle, pour aider à stabiliser la situation autant que possible», a dit M. Grossi dans la matinée. «Nous allons passer quelques jours là-bas».
Il a indiqué avoir reçu des garanties de sécurité de la part des autorités russes et ukrainiennes.
«Un territoire occupé»
«Ces opérations sont très complexes: nous allons dans une zone de guerre, nous allons dans un territoire occupé», a souligné le responsable.
L'Ukraine a appelé les forces russes à arrêter de tirer sur la route menant à la centrale.
«Les troupes d'occupation russes doivent arrêter de tirer sur les couloirs empruntés par la délégation de l'AIEA et ne pas entraver ses activités à la centrale», a souligné sur Facebook le porte-parole de la diplomatie ukrainienne Oleg Nikolenko.
Les Russes, qui contrôlent la centrale et Energodar, ville sur le territoire de laquelle se trouve la centrale, ont bombardé cette ville pour donner l'impression à la mission de l'AIEA que c'était Kiev qui bombardait les environs de la centrale, a affirmé Ievguen Ievtouchenko, chef de l'administration de Nikopol, située en face d'Energodar, de l'autre côté du fleuve Dniepr.
A Moscou, le ministère russe de la Défense a symétriquement accusé mercredi les forces ukrainiennes de «provocations» visant à «perturber le travail de la mission de l'AIEA», en affirmant qu'un des bombardements de l'artillerie ukrainienne avait «frappé» mardi «un bâtiment de retraitement de déchets radioactifs» du complexe.
Kiev et Moscou s'accusent depuis des semaines de mettre en danger la sécurité de la centrale et risquer un accident nucléaire.
La centrale, la plus grande d'Europe, est occupée par l'armée russe depuis début mars, après l'invasion de l'Ukraine lancée le 24 février. Kiev a accusé Moscou d'y avoir déployé des centaines de soldats et d'y stocker des munitions.
Volodymyr Zelensky, recevant mardi les experts de l'AIEA, avait répété qu'il fallait obtenir de la Russie «une démilitarisation immédiate» de la centrale et le départ du site «de tous les militaires russes avec tous leurs explosifs, toutes leurs armes».
La centrale de Zaporijjia, une des quatre centrales nucléaires fonctionnant en Ukraine, compte six réacteurs d'une capacité de 1000 mégawatts chacun.
La semaine dernière, elle avait été brièvement débranchée du réseau électrique pour la première fois de son histoire, après l'endommagement de lignes électriques.
Guerre du gaz
Sur le terrain, «des combats se déroulent actuellement pratiquement sur toute la ligne de front: dans le sud, dans la région de Kharkiv (nord-est) et dans le Donbass (est)», a déclaré mardi soir le président Zelensky.
Mercredi matin, les autorités ukrainiennes ont notamment fait état de quatre morts dans la région de Donetsk (est), l'une des deux provinces du bassin du Donbass, en partie contrôlé par des forces prorusses depuis 2014, et dont la conquête totale est la priorité stratégique de Moscou.
Dans cette région, «des combats acharnés se poursuivent en direction de Bakhmout et Avdiïvka», où «les Russes ont tenté sans succès d'avancer» mais ont dû «se replier», ont-elles ajouté.
Elles ont également fait état d'au moins un mort à Mykolaïv, dans le sud, où deux morts et 24 blessés avaient déjà été signalés la veille.
Dans cette région, l'armée ukrainienne poursuit sa contre-offensives, notamment autour de Kherson, l'une des rares grandes villes ukrainiennes conquises par Moscou.
Le ministère russe de la Défense a de son côté assuré mercredi que ses forces avaient repoussé ces deux derniers jours les offensives ukrainiennes, infligeant de lourdes pertes à l'ennemi avec notamment «huit hélicoptères» et «63 tanks» détruits et «1700 hommes» tués.
Ces informations étaient invérifiables de sources indépendantes.
La présidence ukrainienne a fait état mardi de «puissantes explosions» dans la région de Kherson ainsi que de la destruction d'"un certain nombre de dépôts de munitions» russes et de «tous les grands ponts» qui permettent aux véhicules de traverser le Dniepr, le fleuve arrosant cette partie de l'Ukraine. Et ce afin de couper le ravitaillement en provenance de la Crimée.
Mardi, les autorités de Kharkiv (nord-est), la deuxième ville d'Ukraine, avaient annoncé la mort d'au moins cinq personnes dans des frappes russes.
Dans une autre guerre livrée en parallèle, celle du gaz, le géant russe Gazprom a annoncé mercredi avoir «entièrement» suspendu ses livraisons de gaz vers l'Europe via le gazoduc Nord Stream en raison de travaux de maintenance devant durer trois jours.
Sur le terrain diplomatique, les ministres des affaires étrangères de l'UE se sont entendus mercredi pour suspendre un accord de 2007 avec la Russie facilitant de manière réciproque la délivrance des visas de court séjour.
Y compris sur cet aspect, les relations avec Moscou «ne pouvaient pas rester inchangées», a souligné le responsable de la politique étrangère de l'Union européenne Josep Borrell.