Le chef d'état-major de l'armée algérienne est revenu à la charge contre le président Bouteflika. Il demandé mardi soir que soit «appliquée immédiatement» la procédure constitutionnelle permettant d'écarter le président du pouvoir, selon le ministère de la Défense.
Dans ce texte, l'armée algérienne considère comme non authentique le communiqué de la présidence ayant annoncé lundi la démission de M. Bouteflika avant la fin de son mandat, le 28 avril. L'armée estime que ce communiqué n'émane pas du chef de l'Etat mais «d'entités non constitutionnelles et non habilitées», non nommément citées.
Le communiqué ne précise pas quelles sont ces «entités». «Dans ce contexte particulier, nous confirmons que toute décision prise en dehors du cadre constitutionnel est considérée comme nulle et non avenue», poursuit le chef d'état-major, laissant entendre que l'armée pourrait ne plus se soumettre aux décisions venant de la présidence.
Le général Ahmed Gaïd Salah, longtemps un fidèle du président Bouteflika, fustige ensuite «l'entêtement, la tergiversation et la sournoiserie de certains individus qui oeuvrent à faire perdurer la crise et la rendre plus complexe». Ces individus ont pour «seul souci la préservation de leurs intérêts personnels étroits», ajoute-t-il, dans ce qui semble être une attaque contre l'entourage proche du président Bouteflika.
L'armée a pour «unique ambition» de «protéger le peuple d'une poignée de personnes qui s'est indûment accaparée des richesses du peuple algérien» et qui «à l'heure qu'il est (...) s'affaire» à fomenter «des plans douteux, tendant à déstabiliser le pays». Selon le communiqué, le général Gaïd Salah était entouré lors de cette réunion des plus hauts gradés de l'armée, notamment les commandants des forces terrestres, navales, aériennes et de défense aérienne du territoire, les commandants des régions militaires.
Etudiants dans la rue
Dans la rue, un millier d'étudiants ont de nouveau manifesté à Alger, au lendemain de l'annonce de la prochaine démission du président. «Non événement», «poisson d'avril», la démission annoncée de celui dont des millions d'Algériens ont réclamé le départ depuis plus d'un mois a suscité plus de haussements d'épaules que de joie. «Je me demande ce que ça cache», a réagi Yasmine, 30 ans, soupçonnant comme de nombreux Algériens une nouvelle manoeuvre de M. Bouteflika et de ses proches pour rester au pouvoir.
Pour le quotidien francophone El Watan, «le signal fort attendu s'apparente à une demi-mesure qui laisse tout le monde sur sa faim tant que la démission d''AB' n'aura pas été formulée et tant que le départ de tout ce qui symbolise le système n'aura pas été réellement enclenché». «La fin du long règne de Bouteflika est loin d'être synonyme de celle du système», se méfie Liberté, autre titre francophone, tout en saluant «une victoire importante pour le peuple».
Guerre des clans?
Les «importantes mesures» que le chef de l'Etat a indiqué lundi devoir prendre «pour assurer la continuité» de l'Etat durant la période de transition, avant de remettre formellement sa démission, suscitent toutes sortes de spéculations. Certains y voient la volonté de placer «ses hommes» pour garder la main durant l'intérim.
Election d'un nouveau président de la Chambre haute, que la Constitution charge de l'intérim? Limogeage du général Ahmed Gaïd Salah, chef d'état-major, fidèle soutien qui a fini par lâcher le chef de l'Etat en prônant son départ du pouvoir?
Dans le même temps, les enquêtes annoncées contre d'influents hommes d'affaires liés au proche entourage du chef de l'Etat laisse craindre une possible «guerre de clans» au sommet de l'Etat.
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