En froid avec le présidentAdulé en Ukraine, le général Zaloujny limogé par Zelensky
ATS
8.2.2024 - 17:49
Il est le visage de la détermination et de l'habileté des Ukrainiens face à l'invasion russe. Mais Valéry Zaloujny, commandant en chef de l'armée ukrainienne depuis juillet 2021, a été limogé jeudi par Volodymyr Zelensky, sur fond de désaccords croissants.
08.02.2024, 17:49
08.02.2024, 18:50
ATS
«Aujourd'hui, la décision a été prise de changer le commandement des forces armées ukrainiennes», a indiqué Roustem Oumerov sur Facebook, se disant «reconnaissant» envers Valery Zaloujny.
De son côté, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a salué jeudi le travail du général, lui proposant de rester dans son «équipe», quelques minutes avant que le ministère de la Défense annonce le départ du populaire commandant en chef.
«Nous avons parlé des changements dont les forces armées ont besoin. Nous avons aussi discuté de qui pourrait faire partie d'un commandement renouvelé des forces armées de l'Ukraine. Le temps du renouveau, c'est maintenant. J'ai proposé au général Zaloujny de rester dans l'équipe», a écrit le président ukrainien sur X.
Sa franchise agaçait
Agé de 50 ans, ce gaillard à la mine patibulaire s'est illustré à son poste comme un fin stratège et tacticien, faisant échouer l'offensive lancée le 24 février 2022 par Vladimir Poutine, qui croyait pouvoir prendre en quelques jours Kiev et le contrôle du pays.
Adulé en Ukraine, respecté en Occident et probablement craint en Russie, M. Zaloujny a cependant vu ces derniers mois sa relation avec la présidence se tendre, particulièrement depuis l'échec de la grande contre-offensive estivale qui n'a pas abouti à la libération des territoires occupés.
Le général a notamment agacé par sa franchise, disant en novembre 2023 dans une interview au magazine The Economist, que la guerre s'enfonçait dans une «impasse» et qu'il n'y aurait donc «probablement pas de magnifique percée». Il semblait ainsi enterrer dans l'immédiat l'ambition de libérer les 20% du territoire ukrainien occupé par la Russie, objectif affiché de la présidence.
Bien qu'ils soient liés par le destin de leur pays, les relations entre Valéry Zaloujny et Volodymyr Zelensky se sont dégradées depuis, nourrissant les spéculations quant à un limogeage.
Rumeurs et contre-rumeurs
Ces dernières semaines, les deux hommes avaient aussi affiché leur désaccord sur l'épineux sujet de la mobilisation de centaines de milliers d'hommes pour remplir les rangs décimés lors de la contre-offensive mais aussi pour relayer les vétérans, épuisés par deux ans sur le front.
Le président Zelensky n'a pas validé l'idée du général Zaloujny de mobiliser un demi-million d'hommes. Dans les derniers jours de janvier et les premiers de février, la situation a pris des allures de théâtre de l'absurde, les rumeurs, contre-rumeurs et démentis quant au limogeage imminent du populaire commandant en chef se multipliant.
Dès les premiers jours de l'invasion, le président et le général sont devenus les symboles de la détermination des Ukrainiens à repousser un adversaire réputé mieux armé et plus expérimenté. Pour ses compatriotes, M. Zaloujny est celui qui a fait échouer le plan initial du Kremlin de faire plier Kiev en quelques jours.
Aux yeux de son pays et de ses alliés occidentaux, c'est à lui aussi qu'on doit les trois humiliantes retraites russes du nord ukrainien (avril 2022), puis de la région de Kharkiv (septembre 2022) et enfin de Kherson (sud, novembre 2022).
Les projets russes de «Blitzkrieg, de changement du pouvoir et de l'orientation géopolitique de l'Ukraine ont été ruinés», s'était félicité M. Zaloujny sur Facebook deux semaines après le début de l'invasion. «Quelles que soient les difficultés, nous ne serons certainement pas humiliés», avait martelé celui que la presse a surnommé le «général de fer».