Birmanie La junte birmane refuse de rencontrer l'émissaire de l'ONU, en tournée en Asie

ATS

9.4.2021 - 18:21

Christine Schraner Burgener se dit prête pour le dialogue (archives).
Christine Schraner Burgener se dit prête pour le dialogue (archives).
ATS

La junte militaire au pouvoir a affirmé vendredi refuser de rencontrer l'émissaire de l'ONU pour la Birmanie, en tournée diplomatique en Asie. Washington a de son côté exhorté le Conseil de sécurité à agir pour «sauver la vie des Birmans».

La tournée de la Suissesse Christine Schraner Burgener, qui vise à tenter de trouver une issue à la crise, intervient dans un contexte d'inquiétude croissante sur la situation en Birmanie, secouée par des manifestations quotidiennes depuis le coup d'Etat le 1er février qui a renversé le gouvernement civil d'Aung San Suu Kyi. Le bilan de la répression a passé le cap des 600 morts.

La diplomate a entamé par la Thaïlande sa tournée qui devrait la conduire aussi en Chine, alliée traditionnelle de l'armée birmane. Mais elle ne sera pas reçue en Birmanie, où elle réclame de se rendre depuis plus de deux mois pour rencontrer en tête-à-tête les généraux.

«Nous n'avons pas permis cela. Et nous n'avons nullement l'intention de permettre cela maintenant», a déclaré vendredi à l'AFP le porte-parole de la junte, Zaw Min Tun.

«Prête au dialogue»

Mme Burgener a confirmé que la junte avait refusé sa visite. «Je regrette que Tatmadaw m'ait répondu hier qu'ils ne sont pas prêts à me recevoir», a-t-elle dit sur Twitter, employant le nom officiel de l'armée en Birmanie.

«Je suis prête pour le dialogue. La violence ne mène jamais à des solutions durables», a-t-elle ajouté, indiquant être arrivée à Bangkok.

Au moins 614 civils ont été tués par les forces de sécurité lors des manifestations, selon l'Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP). Mais le bilan pourrait être plus lourd: plus de 2800 personnes ont été arrêtées. Beaucoup, sans accès à leurs proches ou à un avocat, sont portées disparues.

De nouveaux morts

Le sang a de nouveau coulé vendredi matin. Selon les secours, au moins quatre personnes ont été tuées lorsque les forces de sécurité ont détruit des barricades de contestataires dans la ville de Bago, à environ 65 km au nord-est de Rangoun.

Cette féroce répression continue de faire des remous au sein de la communauté internationale.

Dernier incident en date: l'ambassadeur birman à Londres, favorable à Aung San Suu Kyi, a été évincé de son poste, suscitant jeudi la condamnation de Londres qui n'a cependant eu d'autre choix que d'accepter la décision de la junte.

Le Royaume-Uni a indiqué qu'il offrirait sa protection à l'ambassadeur déchu, «étant donné le comportement d'intimidation» à son égard. Mercredi soir, des diplomates proches de la junte s'étaient emparés de l'ambassade.

De leur côté, les Etats-Unis ont annoncé des sanctions contre une entreprise d'Etat birmane de production de pierres précieuses, disant vouloir priver la junte de cette manne.

«Sauver la vie des Birmans»

A l'initiative du Royaume-Uni, une réunion informelle du Conseil de sécurité de l'ONU s'est tenue vendredi, au cours de laquelle les Etats-Unis ont exhorté cette instance à agir rapidement et à faire monter la pression sur la junte militaire afin de sauver la vie des Birmans.

«Est-ce que le Conseil va tergiverser sur la formulation dans une nouvelle déclaration ou va-t-il agir pour sauver la vie des Birmans?», a demandé l'ambassadrice américaine à l'ONU, Linda Thomas-Greenfield.

La réunion devait entendre Daw Zin Mar Aung, membre civil élu du Parlement birman et un universitaire, Sai Sam Kham. Daw Zin Mar Aung doit s'exprimer au nom du groupe de résistance baptisé CRPH, le Comité pour représenter le Pyidaungsu Hluttaw, l'organe législatif birman.

270'000 éléments récoltés

Le CRPH assure avoir déjà rassemblé quelque 270'000 éléments prouvant des violations des droits humains «de grande ampleur». Il a déjà entamé cette semaine des discussions avec des enquêteurs de l'ONU.

La junte estime qu'elle répond de manière proportionnée à de violentes manifestations. Lors d'une conférence de presse vendredi dans la capitale Naypyidaw, des membres des forces de sécurité ont montré des armes qu'ils disent avoir pris à des manifestants.

Le porte-parole de la junte a en outre accusé le personnel médical de «tuer des gens de sang froid» en refusant de travailler.

Dans le cadre de la mobilisation pro-démocratie, des dizaines de milliers de travailleurs sont en grève et des secteurs entiers de l'économie paralysés.