AllemagneLa possible chancelière Verte ciblée par les «fake news»
ATS
30.4.2021 - 08:51
«Se débarrasser des chiens» pour réduire les émissions de CO2: attribuée à Annalena Baerbock, cette proposition totalement farfelue est une des «fake news» qui ciblent désormais la candidate Verte, favorite des sondages pour succéder à Angela Merkel.
30.04.2021, 08:51
ATS
Depuis sa désignation comme cheffe de file des écologistes aux élections législatives allemandes de septembre, cette ancienne juriste de 40 ans suscite curiosité, espoirs mais aussi critiques dans une Allemagne qui s'apprête à tourner la page Merkel.
Face à des conservateurs usés par une guerre des chefs et 16 années au pouvoir, les Verts sont désormais donnés en tête par certains instituts de sondage.
Sans expérience gouvernementale mais fine connaisseuse des dossiers, Mme Baerbock pourrait ainsi devenir la première dirigeante écologiste d'une grande puissance. «Ses chances sont très réelles, mais les prochaines semaines vont être très importantes car l'image de Baerbock est en train de se développer et de s'installer auprès du public», explique à l'AFP le politologue Thorsten Faas, de l'Université libre de Berlin.
Elève de Soros
Si les fausses informations qui la ciblent sont un baromètre de ses chances de l'emporter, alors Annalena Baerbock est bien aux portes de la chancellerie.
Sa supposée proposition d'interdire les animaux de compagnie ou de taxer le CO2 qu'ils émettent est «l'intox» la plus relayée sur les réseaux sociaux. La candidate écologiste serait aussi tombée dans les bras de militants sans masque ni distanciation après sa désignation, ce que le parti a fermement démenti.
Une prétendue photo de Mme Baerbock nue, accompagnée de la mention «Elle était jeune et avait besoin d'argent», a été abondamment diffusée, alors qu'il s'agit d'un modèle lui ressemblant.
Des montages, relayés notamment par un député d'extrême droite, la présentent comme une ancienne élève du milliardaire hongrois George Soros, une des bêtes noires des sphères complotiste et antisémite. Mme Baerbock ne l'a en fait croisé qu'une fois, en 2019 lors d'une conférence à Munich.
Situation prise «très au sérieux»
Les écologistes sont eux-mêmes devenus ces derniers mois des cibles privilégiées, devant les autres partis, y compris les conservateurs d'Angela Merkel.
En Allemagne, où les «Grünen» sont depuis 2019 la deuxième force politique, de récentes «fake news» ont ainsi affirmé qu'ils voulaient interdire les barbecues, désarmer les policiers ou encore rendre obligatoire l'enseignement du Coran à l'école.
La situation est prise très au sérieux par l'entourage de la candidate, qui confirme que «l'affaire a pris une nouvelle dimension» depuis sa désignation face à l'autre dirigeant écologiste, Robert Habeck.
Pour contrer ces attaques visant «plus fortement les femmes que les hommes sur le net», les écologistes ont formé une «brigade» chargée de scruter les réseaux sociaux et démonter la moindre «fake news».
Le défi est de taille car ces informations bidon semblent de plus en plus déserter Facebook pour se propager via des boucles Telegram ou WhatsApp, moins accessibles à la riposte.
Manipulations russes
La pandémie et son cortège de restrictions ont également un effet délétère, qui risque d'avoir des répercussions sur une campagne électorale où réunions publiques et contacts avec les candidats seront réduits.
«Le confinement a joué un rôle (dans la propagation des «fake news"), les gens étant isolés de leur environnement social et passant un temps extrêmement important en ligne», confirme Miro Dittrich, de la fondation antiraciste Amadeu-Antonio.
Un autre facteur déterminant est l'attitude de la Russie, qui a fait de l'Allemagne son terrain privilégié en Europe d'opérations de désinformation.
L'Allemagne a ainsi fait l'objet depuis 2015 de plus de 700 tentatives de manipulations russes, contre 300 en France ou 170 en Italie, selon EUvsDisinfo, plateforme européenne dédiée à la lutte contre la désinformation russe.
Dans ce contexte, Mme Baerbock, opposée au chantier controversé du gazoduc germano-russe Nord Stream 2, pourrait là aussi être particulièrement visée durant la campagne électorale. La chaîne pro-kremlin RT, un vecteur-phare de ce type de manoeuvres, a ainsi prévu de doubler ses effectifs en Allemagne avant le scrutin, selon l'hebdomadaire Der Spiegel.