«Pression psychologique»La Russie entame des manoeuvres militaires au Bélarus
vf
10.2.2022 - 23:03
Les armées russe et bélarusse ont entamé jeudi de grandes manoeuvres au Bélarus, aux portes de l'Ukraine qui est au centre d'extrêmes tensions entre la Russie et les Occidentaux. D'intenses efforts diplomatiques se poursuivent pour désamorcer la crise.
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10.02.2022, 23:03
10.02.2022, 23:18
ATS
Le déploiement de ces soldats a été immédiatement qualifié par la présidence ukrainienne de moyen de «pression psychologique» employé par Moscou, qui a par ailleurs massé depuis novembre plus de 100'000 soldats près de sa propre frontière avec l'Ukraine.
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a regretté «un geste d'une grande violence». Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a lui parlé de «moment dangereux pour la sécurité en Europe».
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a quant à lui jugé «incompréhensible» l'inquiétude des Occidentaux à propos des manoeuvres au Bélarus.
Sur fond d'intensification des efforts diplomatiques ces dernières semaines, le chancelier allemand Olaf Scholz a de son côté averti la Russie qu'elle ne devait pas sous-estimer «l'unité» et «la détermination» des Européens.
«Nous attendons maintenant de la Russie qu'elle prenne des mesures claires pour réduire les tensions actuelles», a-t-il insisté après une rencontre avec les dirigeants des pays baltes, trois ex-républiques soviétiques frontalières de la Russie et devenues membres de l'Otan et de l'UE.
Les Occidentaux sont ouverts à «un dialogue sérieux avec la Russie», a-t-il ajouté, précisant que «des propositions concrètes» avaient été soumises à Moscou, sans toutefois entrer dans les détails.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson, en visite à Varsovie, a également insisté sur la nécessité de convaincre Vladimir Poutine d'"engager une désescalade». Et ce le jour-même où le Royaume-Uni a adopté la législation qui lui permet de durcir son régime de sanctions contre la Russie, destiné à contribuer à la dissuader d'envahir l'Ukraine.
A l'ONU, l'ambassadrice américaine, Linda Thomas-Greenfield, a réclamé à la Chine «d'encourager les Russes» à faire les bons choix, s'attirant une réplique immédiate de son homologue chinois, Zhang Jun, lui demandant «d'arrêter d'attiser la tension».
Eviter des «incidents»
A la veille des manoeuvres, l'armée russe a diffusé une vidéo montrant une batterie antiaérienne S-400 pointant ses missiles vers le ciel à partir d'un terrain enneigé de la région bélarusse de Brest, frontalière de l'Ukraine.
Affirmant vouloir éviter que ne se produisent des «incidents malencontreux» au moment où commençaient ces exercices militaires, le chef d'état-major américain, le général Mark Milley, a eu un entretien téléphonique avec son homologue bélarusse, le général Viktor Goulevitch.
Le Kremlin est accusé de préparer une nouvelle opération militaire contre l'Ukraine, après l'annexion de la Crimée en 2014, des accusations rejetées par la Russie qui affirme vouloir assurer sa sécurité face à l'hostilité de Kiev et de l'Otan.
Les manoeuvres russo-bélarusses «se déroulent avec l'objectif de se préparer à arrêter et repousser une agression extérieure dans le cadre d'une opération défensive», a expliqué le ministère russe de la Défense.
Selon lui, elles ont lieu jusqu'au 20 février sur cinq terrains militaires, quatre bases aériennes et «différents sites» au Bélarus, notamment dans la région de Brest, au nord-ouest de la frontière ukrainienne.
Le nombre des soldats et des équipements participant à ces exercices n'a pas été officiellement fourni. Mais les Occidentaux affirment que 30'000 militaires russes ont été déployés au Bélarus dans ce cadre. La Russie a en outre annoncé jeudi l'arrivée en Crimée de six navires de guerre en vue de prochaines manoeuvres en mer Noire, qui borde le sud de l'Ukraine.
Dialogue difficile
Les tensions ont suscité cet hiver un ballet diplomatique pour tenter de désamorcer la crise. Le président français Emmanuel Macron s'est ainsi rendu lundi à Moscou, puis le lendemain à Kiev. En cas d'attaque russe, les Occidentaux ont menacé la Russie de sanctions économiques majeures qui s'ajouteront à celles prises en 2014.
L'annexion de la Crimée a été suivie par le déclenchement d'un conflit dans l'est de l'Ukraine entre les forces de Kiev et des séparatistes soutenus par Moscou, une guerre qui a fait plus de 14'000 morts en huit ans, selon un dernier bilan de l'ONU.
La Russie nie chercher à déstabiliser l'Ukraine et jure vouloir se défendre face à l'Otan, que ce pays voisin souhaite rejoindre. Les négociations restent très difficiles entre les deux camps, dont les positions semblent irréconciliables.
Moscou exige la fin de la politique d'élargissement de l'Alliance atlantique, l'engagement à ne pas déployer d'armes offensives à proximité des frontières russes et le retrait d'infrastructures de l'Otan sur les frontières de 1997, avant que cette organisation n'accueille d'ex-territoires qui appartenaient au bloc soviétique.