Colère des Européens Le Bélarus intercepte un avion de ligne, colère des Européens

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23.5.2021 - 19:09

Un chasseur bélarusse a intercepté dimanche un avion de ligne de la compagnie RyanAir. A son bord se trouvait un militant de l'opposition qui, selon cette dernière, a été interpellé à son arrivée à Minsk, suscitant la colère des Européens.

Image d'illustration 
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KEYSTONE/DPA/Boris Roessler

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Le média d'opposition Nexta a affirmé que son ancien rédacteur en chef Roman Protassevitch avait été arrêté par les services de sécurité après l'atterrissage d'urgence à l'aéroport de la capitale du Bélarus de ce Boeing 737-800 en provenance d'Athènes et avec pour destination Vilnius, en Lituanie.

Les dirigeants de l'Union européenne ont appelé de concert le Bélarus à laisser repartir cet appareil et permettre à «tous ses passagers» de poursuivre leur voyage. Ils ont fustigé «une action complètement inacceptable», à l'instar de plusieurs de ses Etats membres comme l'Allemagne, la France et la Pologne.

Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki, dénonçant un «acte de terrorisme d'Etat», a demandé au président du Conseil européen Charles Michel que l'UE discute dès lundi de «sanctions immédiates» contre le Bélarus. Un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des 27 est prévu pour lundi et mardi.

Le ministère bélarusse de l'Intérieur a confirmé dans un premier temps sur Telegram l'interpellation de Roman Protassevitch, avant de supprimer ce message, a constaté une journaliste de l'AFP.

«Alerte à la bombe»

Selon les autorités, l'avion a dévié de sa trajectoire à cause d'une «alerte à la bombe». Nexta a affirmé que l'atterrissage d'urgence avait été suscité par une «bagarre» déclenchée par des agents des services de sécurité bélarusses, présents à bord et qui affirmaient qu'un engin explosif se trouvait dans l'appareil.

L'aéroport de Minsk, cité par l'agence de presse officielle Belta, a affirmé que l'alerte à la bombe s'était révélée «erronée» après une fouille du Boeing.

Le président bélarusse Alexandre Loukachenko a quant à lui donné l'ordre personnellement à un avion de chasse MiG-29 d'intercepter l'avion après cette alerte, a dit son service de presse.

A l'été et à l'automne derniers, M. Loukachenko a été confronté à mouvement de contestation historique ayant rassemblé pendant plusieurs semaines des dizaines de milliers de personnes à Minsk et dans d'autres villes, une mobilisation énorme pour un pays d'à peine 9,5 millions d'habitants.

Mais la protestation s'est progressivement essoufflée face à des arrestations massives, des violences policières ayant fait au moins quatre morts, un harcèlement judiciaire permanent et de lourdes peines de prison infligées à des militants et à des journalistes.

«Bagarre avec le KGB»

En novembre dernier, les services de sécurité bélarusses (KGB), hérités de la période soviétique, avaient placé M. Protassevitch, âgé de 26 ans, et le fondateur de Nexta, Stepan Poutilo, sur la liste des «individus impliqués dans des activités terroristes».

L'actuel rédacteur en chef de Nexta, Tadeusz Giczan, a assuré que des agents du KGB bélarusse étaient à bord de l'appareil. «Quand l'avion est entré dans l'espace aérien bélarusse, les officiers du KGB ont déclenché une bagarre avec le personnel de Ryanair», a affirmé M. Giczan, les agents soutenant qu'une bombe était à bord.

Contactée par l'AFP, une porte-parole des aéroports lituaniens a dit avoir reçu comme première explication de la part de l'aéroport de Minsk un conflit entre des passagers et l'équipage.

D'après les images du site internet spécialisé flightradar24, le Boeing a été intercepté au-dessus du territoire bélarusse, juste avant la frontière avec la Lituanie, un pays balte membre de l'Union européenne.

«Peine de mort»

Roman Protassevitch est l'ancien rédacteur en chef de Nexta, un média ayant joué un rôle clé dans la récente vague de contestation de la réélection en 2020 du président Loukachenko, qui occupe ces fonctions depuis 1994. Fondé en 2015, Nexta ("Quelqu'un» en bélarusse) avait notamment coordonné les rassemblements à travers le Bélarus, diffusant des mots d'ordre et permettant de partager les photos et les vidéos des rassemblements et des violences.

L'arrestation du militant a été immédiatement condamnée par la figure de l'opposition bélarusse en exil, Svetlana Tikhanovskaïa. Sur Twitter, elle a assuré que Roman Protassevitch encourait «la peine de mort». L'ancienne république soviétique du Bélarus est le dernier pays en Europe à appliquer la peine capitale.

L'Allemagne a réclamé une «explication immédiate» après le déroutage de l'avion et la France a dénoncé un «détournement» d'avion «inacceptable». Le président de la Lituanie, Gitanas Nauseda, dont le pays a accordé le statut de réfugié à Roman Protassevitch, a quant à lui condamné «un événement sans précédent», accusant le régime bélarusse d'avoir été derrière «cet acte abject». Svetlana Tikhanovskaïa vit elle aussi en exil en Lituanie.

La répression en cours au Bélarus a valu à Minsk une batterie de sanctions occidentales qui ont conduit Alexandre Loukachenko à se rapprocher davantage de son homologue russe Vladimir Poutine.