Brexit Le Brexit et les élections européennes

ATS

19.3.2019 - 11:36

Les élections européennes, un casse-tête en cas de report du Brexit.
Les élections européennes, un casse-tête en cas de report du Brexit.
Source: KEYSTONE/MARTIN RUETSCHI

Les Européens sont toujours dans le brouillard sur la durée du report du Brexit que pourrait demander Londres. Mais ils se préparent déjà à l'éventuelle participation du Royaume-Uni aux élections européennes, un scénario aux allures de casse-tête.

Car même s'ils gardent le cap d'une sortie de l'UE, les Britanniques pourraient bien être contraints d'organiser ce scrutin, programmé du 23 au 26 mai 2019. Une «ironie de l'histoire», comme l'a récemment souligné le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker.

Un consensus juridique a émergé à Bruxelles: si le Brexit, prévu officiellement le 29 mars, est retardé au-delà du 2 juillet, date de la première réunion des nouveaux eurodéputés, le Royaume-Uni serait obligé d'organiser le scrutin européen.

Cette contrainte «correspond au droit fondamental des citoyens de l'Union de voter et de se présenter comme candidats aux élections pour le Parlement européen dans l'Etat membre où ils résident», souligne le service juridique du parlement dans une note confidentielle. Si le gouvernement britannique ne s'y pliait pas, il s'exposerait à des poursuites devant la justice européenne.

Elus en «stand-by»

Pour l'UE, la première conséquence serait de devoir renoncer au moins provisoirement à la nouvelle composition du Parlement qui avait été décidée en vue du Brexit, et qui devait le voir passer de 751 à 705 sièges.

Sur les 73 sièges devant être laissés vacants par le départ britannique, l'UE a en effet prévu d'en redistribuer 27 à certains pays, tandis que les 46 autres seront «gardés en réserve» en prévision de futurs élargissements.

Il y a près d'un an, les chefs d'Etat européens avaient cependant déjà imaginé que le Brexit pourrait ne pas avoir eu lieu au moment des élections de mai 2019: dans ce cas, le parlement garderait sa composition actuelle «jusqu'à ce que le retrait du Royaume-Uni de l'Union produise ses effets juridiques», avaient-il décidé dans les conclusions d'un sommet en juin 2018.

Pour des pays comme la France ou l'Espagne, censés gagner cinq sièges dans le Parlement post-Brexit, «ça pourrait signifier qu'il faudra que certains nouveaux élus restent en 'stand-by' en attendant que les Britanniques veuillent bien partir, c'est assez étrange comme situation», souligne un diplomate.

Le risque des eurosceptiques

Sur un plan plus politique, «laisser le Royaume-Uni participer pourrait conduire à une poussée plus forte des députés eurosceptiques, avec des conséquences négatives pour l'équilibre des forces au sein du parlement européen», relèvent Larissa Brunner et Fabian Zuleeg, analystes à l'European Policy Center (EPC).

Et cela pourrait avoir «des conséquences encore plus négatives au sein du système politique du Royaume-Uni», où ce scrutin pourrait devenir un «quasi-référendum» sur la relation du pays avec l'UE, ajoutent-ils dans une publication récente.

Dans les coulisses de Bruxelles, on s'inquiète déjà de la possibilité que de nouveaux députés britanniques participent, même provisoirement, au processus législatif européen, voire à l'élection du successeur de Juncker à la tête de la Commission.

Insécurité pour l'UE

Avant d'en arriver là, un autre risque préoccupe les Européens: quelles seraient les conséquences pour l'UE si Londres ne se pliait pas à son obligation d'organiser le scrutin européen? «Le nouveau Parlement européen serait tout de même validement constitué», estime le service juridique de l'institution dans sa note confidentielle.

Mais cet avis ne semble pas partagé par les juristes d'une autre instance, le Conseil de l'UE, qui réunit les Etats membres. Les institutions cesseraient d'«opérer dans un contexte juridique sûr» si un Royaume-Uni toujours membre de l'UE au 2 juillet n'avait pas organisé d'élections, mettent-ils en garde dans un document distribué la semaine passée aux ambassadeurs des 27.

Ils redoutent que toutes les décisions du nouveau Parlement puissent être attaquables sur le plan légal, ce qui entraînerait une paralysie de la machine européenne. Pour éviter ce scénario à tout prix, «aucune extension ne doit être accordée au-delà du 1er juillet si des élections européennes ne sont pas organisées» fin mai au Royaume-Uni, insistent-ils.

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