Le Conseil des droits de l'homme a entamé à Genève un débat historique sur le racisme. Alors que l'ONU cible la «brutalité» contre George Floyd, le frère de celui-ci a appelé à «aider» les Afro-Américains. Une commission d'enquête internationale sera examinée jeudi.
Le débat urgent, qui a démarré mercredi après-midi, avait été demandé la semaine dernière par le Burkina Faso, au nom du groupe des Etats africains après le décès de l'Afro-Américain de 46 ans après une intervention policière. Il n'est que la cinquième discussion sous ce format depuis le lancement du Conseil des droits de l'homme, utilisé à plusieurs reprises sur le conflit syrien.
Lors de ce débat «historique» selon la rapporteuse spéciale de l'ONU contre le racisme, Philonise Floyd a dénoncé la «torture» dont a été victime son frère. «Vous avez le pouvoir de nous aider à obtenir justice», a-t-il dit. «Je vous demande de l'aider. Je vous demande de m'aider. Je vous demande de nous aider, nous les Afro-Américains», a-t-il lancé en appelant à une commission d'enquête internationale.
Une minute de silence a été observée pour toutes les victimes du racisme. Côté ONU, la secrétaire générale adjointe Amina Mohammed a relevé la «responsabilité» des Nations Unies à répondre aux victimes de racisme. La Haute commissaire aux droits de l'homme Michelle Bachelet a elle dénoncé «la brutalité gratuite» du policier qui a étouffé George Floyd.
Actes de manifestants visés
Après avoir condamné ces dernières semaines le «racisme structurel» aux Etats-Unis, elle a appelé à des réformes «rapides et cruciales» dans ce pays, mais aussi dans les autres. Elle a déploré également les actes criminels de quelques manifestants. Cette semaine, une vingtaine de hauts responsables africains de l'ONU, dont des chefs d'entités à Genève, ont publié une tribune dans laquelle ils appellent à faire davantage que de simples condamnations.
Dans un projet de résolution qui doit être examiné par les 47 membres du Conseil jeudi au terme du débat urgent, les pays africains demandent une commission d'enquête internationale sur «le racisme systémique» et les violences policières aux Etats-Unis et dans d'autres pays. Celle-ci, soutenue aussi par l'ONG Human Rights Watch (HRW), serait nommée pour un an et devrait également se prononcer sur la répression contre les manifestants.
Lors du débat, la Suisse s'est dite «inquiète» du «recours disproportionné à la force» par la police contre les Afro-Américains. Mais selon elle, tous les Etats doivent étendre leur engagement pour protéger tous les citoyens contre les discriminations.
Les Etats-Unis, qui se sont retirés du Conseil des droits de l'homme, n'assistent pas en salle aux débats. Dès la semaine dernière, la mission américaine auprès de l'ONU à Genève avait tenté de désamorcer les reproches en condamnant le décès de George Floyd mais en relevant que ce pays oeuvrait à davantage «d'égalités». Et que son attachement aux libertés fondamentales permettait à la communauté internationale de «dialoguer ouvertement» avec lui pour trouver des solutions.
Autre avancée, le président américain Donald Trump a prononcé mardi un décret pour interdire l'étranglement comme mode opératoire policier, sauf en cas de danger. Un allègement estimé insuffisant par ses opposants démocrates.
Affront pour les Etats-Unis
Le scénario d'une commission d'enquête internationale est considéré comme un affront par Washington. «Nous ne sommes pas exempts d'une surveillance» mais toute résolution devrait mentionner les «nombreux pays» où du racisme est observé, a dit mercredi avant le débat l'ambassadeur américain à l'ONU à Genève Andrew Bremberg.
Et selon certaines sources, les Etats-Unis ont manoeuvré en coulisses pour demander à certains de ses alliés membres du Conseil de tout faire pour que le projet de résolution ne soit pas approuvé. Le débat a montré les divergences entre ceux-ci et les adversaires de M. Trump.
Confrontée à des manifestations dans plusieurs de ses membres, l'UE a demandé une «réponse mondiale ferme» contre les discriminations raciales. Le Brésil, proche du président américain et où des violations des droits des minorités ont été régulièrement ciblées, a appelé à «s'unir plutôt qu'à se diviser davantage».
Parmi les ennemis, la Chine a appelé les Etats-Unis à se conformer à leurs obligations internationales. L'Iran a dénoncé la situation américaine et la Corée du Nord a vu dans celle-ci «le problème le plus brûlant» pour les droits de l'homme. Le Venezuela a lancé une salve contre M. Trump et dénoncé sa proximité avec l'extrême droite dans son pays.
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