Immense réseau Les associations étudiantes noires, discrète armée derrière Harris

ats

2.9.2024 - 09:37

L'immense réseau d'une association étudiante de femmes noires à laquelle Kamala Harris a adhéré dans sa jeunesse pourrait être la botte secrète de la candidate démocrate, lancée dans une campagne éclair pour la Maison Blanche.

Kamala Harris veut devenir la première présidente des États-Unis.
Kamala Harris veut devenir la première présidente des États-Unis.
Stephanie Scarbrough/AP/dpa

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Au début des années 1980, la jeune native de Californie étudiait sur les bancs de l'université Howard, établissement historiquement noir situé dans la capitale Washington. Là, elle adhère à une sororité, l'une de ces associations typiques de la vie des campus américains réservées aux femmes – les fraternités sont leur équivalent masculin.

Mais, au sein du «Harvard noir», la sororité que rejoint Kamala Harris n'est pas tant un club pour faire la fête qu'un immense réseau constitué de femmes noires, étudiantes et professionnelles. Nommée Alpha Kappa Alpha (AKA), elle compte quelque 360'000 membres à travers le pays.

La sororité est elle-même non partisane, mais nombre de ses membres sont prêtes à mouiller le maillot pour faire de leur «soeur» Kamala Harris la première femme noire présidente des Etats-Unis.

«Nous allons nous démener»

«Nous allons nous démener pour mener à bien ce qu'elle a besoin que nous fassions», explique Tanya Baham, membre d'Alpha Kappa Alpha, rencontrée par l'AFP lors de la récente convention d'un Parti démocrate très dépendant du vote des femmes et des Afro-Américains.

«Nous allons faire en sorte que nos plus jeunes, comme les anciens, puissent s'inscrire et aller voter», ajoute cette travailleuse sociale de Louisiane.

C'est en 1908 qu'Alpha Kappa Alpha a été fondée au sein de l'université Howard, elle-même créée en 1867. D'autres sororités et fraternités sont depuis nées au sein des universités historiquement noires, une particularité bien américaine, héritage d'une histoire marquée par l'esclavage, la ségrégation et les discriminations à l'encontre des Afro-Américains; et qui ont souvent fait office de refuge.

Ces associations transcendent l'éducation supérieure. Si elles comptent des groupes destinés aux étudiants d'aujourd'hui, elles comprennent aussi des cercles réservés aux diplômés universitaires.

Responsables invités à la Maison Blanche

En tant que vice-présidente, Kamala Harris a invité des responsables de ces réseaux d'entraide à la Maison Blanche. Et début juillet, juste avant qu'elle ne remplace au pied levé Joe Biden comme candidat des démocrates pour la présidentielle du 5 novembre, elle s'est rendue à la convention d'Alpha Kappa Alpha au Texas.

Elle s'est également déplacée depuis pour assister aux rassemblements de deux autres sororités noires.

Fonds de financement électoral

Avec d'autres, les membres d'AKA ont levé par visioconférence 1,5 million de dollars sous la bannière «La victoire avec les femmes noires». La sororité a établi un fonds de financement électoral, une ancienne présidente a été intégrée à l'équipe de campagne des démocrates... La nébuleuse autour de ces sororités se mobilise pour faire battre Donald Trump.

«On est toutes prêtes à travailler pour y arriver», a déclaré au journal Chicago Sun-Times Donna Miller, une élue de l'Illinois qui a participé à cette visioconférence. «Ça a remotivé tant de monde, des jeunes, des vieux, qu'importe la génération ou l'ethnicité.»

Motus

Difficile néanmoins d'estimer l'impact réel d'une telle mobilisation sur les bulletins qui seront mis dans l'urne, d'autant plus qu'AKA verrouille sa communication.

De nombreux membres interrogés par l'AFP ont refusé de s'exprimer sur l'élection. Le bureau national de la sororité n'a pas répondu aux messages de l'AFP, tout comme plusieurs de ses branches locales.

Le chercheur en sciences politiques Daniel Hopkins préfère tempérer leur influence électorale: «il n'y a qu'un nombre limité d'électeurs américains qui font quatre ans d'université, et qui sont membre de ces associations.»

Même si l'électorat afro-américain a historiquement été très pro-démocrate, ce soutien s'est effrité ces dernières années, notamment chez les plus jeunes, souligne ce spécialiste à l'université de Pennsylvanie.

«Outils cachés»

A l'inverse, Amanda Wilkerson, professeure à l'université UCF en Floride et qui a étudié l'électorat afro-américain, estime que les sororités et fraternités noires constituent des «outils cachés», souvent négligés par les instituts de sondage et les médias alors même qu'elles se sont déjà mobilisées pour des élections locales comme nationales.

Et elles sont rompues à l'art de faire campagne, souligne-t-elle. Kamala Harris est ainsi «la première candidate dans son cas à être en mesure d'utiliser ces réseaux de soutien». Mais pour les sororités, «ce n'est pas complétement nouveau».

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