Liban Les Libanais pour une nouvelle indépendance

ATS

22.11.2019 - 17:32

Des dizaines de milliers de Libanais ont célébré vendredi, dans une ferveur citoyenne hors normes, le 76e anniversaire de leur pays. Ils ont clamé leur soif d'une «nouvelle indépendance» plus d'un mois après le début d'une contestation contre la classe dirigeante.

Drapeaux libanais au vent, de nombreuses «parades civiles» ont convergé vers la place des Martyrs dans le centre-ville de Beyrouth, un haut lieu de la contestation où la foule s'est agglutinée par milliers. Des manifestants y avaient installé des barricades des deux côtés de la route pour réserver une haie d'honneur à ces délégations, dans une marée d'étendards et de chants.

«Le message important, c'est que le Liban est de nouveau uni», a dit une jeune manifestante, Jilnar Moukhayber. «La parade civile est là pour signifier que tous les citoyens sont les bienvenus.» Cette atmosphère de fête a offert un contraste saisissant avec celle, morose, du défilé militaire a minima au ministère de la Défense, en présence du président Michel Aoun et du premier ministre démissionnaire Saad Hariri.

Depuis le 17 octobre, le Liban vit au rythme d'une protestation sans précédent contre l'ensemble des dirigeants politiques, jugés incompétents et corrompus. Il a insufflé chez des centaines de milliers de Libanais de tous bords le désir d'un chamboulement du système de gouvernance. «C'est la première fois que les Libanais, toutes communautés confondues, manifestent massivement sans répondre à l'appel d'un parti», a affirmé Tamara, 21 ans. «C'est ça la vraie indépendance!«.

«D'autres nous ont occupés»

Le 22 novembre 1943, le Liban sous mandat français a accédé à l'indépendance après des manifestations populaires ayant rassemblé chrétiens et musulmans. Le pays a ensuite connu une guerre civile (1975-1990), puis deux occupations étrangères, israélienne et syrienne. Et il est resté profondément divisé, confessionnellement et politiquement.

Mais, cette année, «nous voulons prendre notre indépendance des corrompus qui nous gouvernent!«, a dit un manifestant place des Martyrs, Wajed, 26 ans. «Quand les Français sont partis, d'autres nous ont occupés», a-t-il ajouté, en référence aux partis au pouvoir, conspués sans exception.

Avec la contestation, il n'y a pas eu de défilé officiel militaire sur le front de mer comme de coutume. Ni de cérémonie protocolaire au palais présidentiel. Pour Wajed, il s'agit là d'une «victoire» supplémentaire pour un mouvement qui a déjà entraîné la démission du gouvernement Hariri, le 29 octobre, ou encore empêché l'examen au parlement d'une loi d'amnistie controversée.

Aucune issue au bras de fer avec le pouvoir n'est toutefois en vue, et la crise économique est aiguë. Si le mouvement est resté pacifique jusque-là et la réponse des autorités mesurée, deux personnes sont mortes en marge des manifestations.

«Défilés civils»

Mais à Beyrouth, comme à Saïda et Nabatiyé (sud), ou encore Tripoli (nord), des dizaines de milliers de Libanais ont ouvert une parenthèse dans les difficultés du quotidien pour laisser libre court à leur bonheur du moment. Ce souffle populaire a pris la forme de «défilés civils» organisés via les réseaux sociaux.

Autre symbole de la ferveur citoyenne, dans la vallée de Bisri, au sud-est de Beyrouth, des centaines de personnes ont marché contre un projet de barrage, dans cette région verdoyante riche de trésors architecturaux.

Dans son histoire moderne, le pays a connu d'autres mouvements populaires, comme celui en 2005 après l'assassinat de l'ex-premier ministre Rafic Hariri imputé au régime syrien, qui avait abouti au départ des troupes syriennes. Mais ils se tenaient à l'appel des partis. Galvanisés, de nombreux expatriés de tous les continents sont retournés au pays pour l'occasion.

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ATS