Ira, n'ira pas? Nancy Pelosi en Asie, avec une possible étape délicate à Taïwan

hl

1.8.2022 - 10:27

La présidente de la Chambre des représentants américaine Nancy Pelosi est en visite à Singapour lundi. Il s'agit de la première étape d'une tournée asiatique qui pourrait comprendre un passage à Taïwan, au risque d'envenimer encore plus les relations déjà tendues entre Pékin et Washington.

Sur cette photo fournie par le ministère des Communications et de l'Information de Singapour, la présidente de la Chambre des États-Unis Nancy Pelosi, à gauche, et la présidente de Singapour Halimah Yacob se serrent la main au palais présidentiel d'Istana à Singapour, le lundi 1er août 2022.
Sur cette photo fournie par le ministère des Communications et de l'Information de Singapour, la présidente de la Chambre des États-Unis Nancy Pelosi, à gauche, et la présidente de Singapour Halimah Yacob se serrent la main au palais présidentiel d'Istana à Singapour, le lundi 1er août 2022.
KEYSTONE

Keystone-SDA, hl

Après avoir longtemps entretenu le flou autour de son programme en Asie, Mme Pelosi a annoncé dimanche conduire «une délégation du Congrès dans la région indo-pacifique pour réaffirmer l'engagement inébranlable de l'Amérique envers ses alliés et amis dans la région».

«À Singapour, en Malaisie, en Corée du Sud et au Japon, nous tiendrons des réunions de haut niveau pour discuter de la manière dont nous pouvons promouvoir nos valeurs et nos intérêts communs, notamment la paix et la sécurité, la croissance économique et le commerce, la pandémie de Covid-19, la crise climatique, les droits de l'homme et la gouvernance démocratique», a-t-elle ajouté, sans mentionner Taïwan dans son itinéraire.

Le Premier ministre de Singapour Lee Hsien Loong a appelé la présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, Nancy Pelosi, à oeuvrer pour des relations «stables» avec Pékin lors d'une rencontre lundi entre les deux responsables dans la cité-Etat.

«Le Premier ministre Lee a souligné l'importance de relations stables entre les États-Unis et la Chine pour la paix et la sécurité régionales», a déclaré le ministère des Affaires étrangères.

«Ambiguité stratégique»

Depuis des semaines, les tensions entre les Etats-Unis et la Chine se sont accrues à la suite d'informations selon lesquelles elle pourrait se rendre sur l'île autonome, que la Chine considère comme faisant partie de son territoire. Pékin verrait un passage, même bref, de la présidente de la Chambre des représentants sur l'île comme une provocation.

Des délégations de responsables américains se rendent fréquemment à Taïwan pour exprimer leur soutien, mais une visite de Mme Pelosi, un des plus hauts personnages de l'Etat et un des poids lourds de la vie politique américaine, serait sans précédent depuis celle de son prédécesseur Newt Gingrich en 1997.

Les Etats-Unis pratiquent à l'égard de Taïwan une diplomatie dite d'«ambiguïté stratégique», consistant à ne reconnaître qu'un seul gouvernement chinois, celui de Pékin, tout en continuant à apporter un soutien décisif à Taipei mais en s'abstenant de dire s'ils défendraient ou non militairement l'île en cas d'invasion. C'est ce concept qui a permis jusqu'à présent de maintenir une certaine stabilité dans la région.

Une visite à Taïwan de Mme Pelosi, figure centrale de la majorité démocrate du président Joe Biden, compliquerait singulièrement la tâche de la diplomatie américaine, qui s'efforce de ne pas envenimer les relations avec la Chine.

Tension militaire

Elle interviendrait également alors que la tension militaire monte dans la région. La semaine dernière, à l'occasion d'un rare échange direct avec son homologue chinois Xi Jinping, le président américain Joe Biden avait assuré que la position des Etats-Unis sur Taïwan n'avait «pas changé» et que son pays «s'opposait fermement aux efforts unilatéraux pour modifier le statut quo ou menacer la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan».

De son côté, Xi Jinping avait appelé Joe Biden à ne «pas jouer avec le feu», et un porte-parole de la diplomatie chinoise avait parlé d'un déplacement de Mme Pelosi sur l'île comme d'une «ligne rouge».

Lundi, quelque 4000 soldats américains et indonésiens ont entamé un important exercice militaire conjoint, mais Washington a assuré que ces manoeuvres ne visaient aucun pays.

L'armée taïwanaise a pour sa part effectué, la semaine dernière, ses plus importants exercices militaires annuels, qui comprenaient des simulations d'interception d'attaques chinoises, depuis la mer.

Dans le même temps, le porte-avions américain USS Ronald Reagan et sa flottille ont quitté Singapour pour se diriger vers la mer de Chine méridionale dans le cadre d'une opération programmée, a indiqué l'US Navy. Et samedi, en guise de réponse, la Chine a organisé un exercice militaire «à munitions réelles» dans le détroit de Taïwan.